1985, elle a treize ans. Elle passe le pas de la porte de chez ses grands parents pour aller faire du sport avec ses amis, elle ne reviendra jamais. Trente deux ans plus tard, Viviane* une proche de la famille, vient d’apprendre l’identité de l’assassin de Christel. Pour une partie de la famille le mystère s’élucide. Elle nous a envoyé ce texte bouleversant, un récit intime qui remue de douloureux souvenirs et arpente les conséquences du vide qu’a laissé le départ de Christel. Un témoignage aussi féroce qu’embarrassant y compris pour nous qui n’avons pas vocation à publier des faits divers, mais il y avait dans l’idée d’ouvrir notre dossier sur la violence aux citoyens, ce risque…

* Le prénom a été changé à la demande de l’auteur.

L’ordure qui a tué leur « petite dernière » a bousillé 5 vies ! 

Il s’appelle Jacques Rançon, c’est le tueur de la gare de Perpignan, violeur et assassin de Moktaria Chaïb et de Marie-Hélène Gonzalez. Il a été condamné à perpétuité en 2018 et l’enquête qui continue vient de faire découvrir un nouveau crime. Le 27 juin dernier , l’assassinat de Christel Oudin, 13 ans lui était attribué , 32 ans après son méfait.

En1985, j’étais enceinte de mes jumeaux, alors que j’allais donner la vie, à quelques centaines de kilomètres de chez moi, Christel 13 ans perdait la sienne. Ce qui n’était qu’un douloureux faits divers pour la plupart des français. Il a pris une importance différente au sein de notre grande famille. Je n’ai pas fait le rapprochement aussitôt avec ma tante, la sœur de ma mère, mon oncle Bernard et mes cousins germains qui portaient le même nom, jusqu’au terrible appel téléphonique de mon père qui, la voix étranglée m’a confirmé ce qu’inconsciemment nous redoutions tous. La petite fille dont la disparition faisait la Une des médias était bien Christel, la fille de Jean-Pierre, le frère de mon oncle Bernard et de Lydie et la petite sœur de Nathalie et Valérie âgées respectivement à l’époque de 16 et 17 ans. « Je l’ai connue tout bébé puisqu’elle est née en 1972 et que j’ai épousé son oncle en 1973. On se voyait très souvent et on passait même parfois nos vacances ensemble » rappelle ma tante. « Son corps a été retrouvé en avril 1986 sur une autoroute en construction à 2 pas de chez ses grands-parents. Malgré tous les efforts de la police de Saint-Quentin, où Jean-Pierre, son papa était lui-même policier, de Laon et de tous les services concernés, pendant 34 ans, ils n’ont eu aucune piste qui se soit avérée.

Ses sœurs Nathalie et Valérie qui avaient à l’époque 16 et 17 ans, ont été très choquées par le meurtre de leur petite sœur, Nathalie a développé une maladie dont elle est morte en 2010 et Valérie en est restée marquée à vie, elle est persuadée que c’est elle qui était visée et que Christel a été tuée à sa place. Si seulement la découverte du meurtrier pouvait lui faire comprendre qu’elle n’est pas responsable de la mort de sa sœur ! Actuellement, elle est soignée pour des troubles psychologiques. Malheureusement en 2013 le père de Christel a développé un cancer et il en est décédé il y a 1 an1/2. « Il me répétait souvent « tu te rends compte, je connais peut-être le coupable et peut-être que je lui parle et lui serre la main, sans savoir qu’il a tué ma fille » C’était insupportable pour lui. Ses parents ont énormément souffert de la mort de leur fille mais également de ne pas savoir qui et pourquoi avait retiré la vie d’une petite fille innocente de 13 ans Lydie, sa maman a fait de lourdes dépressions à tel point qu’il a fallu l’opérer du cœur affaibli par les nombreux empoisonnements.

L’ordure qui a tué leur « petite dernière » a bousillé 5 vies et bouleversé à jamais toute une famille. J’espère qu’il croupira toute sa vie en prison ; Le plus triste aujourd’hui, c’est que jamais son père et sa sœur ne connaîtront la vérité. Et encore quelle vérité vaudra-t-il bien donner ? Ce n’est peut-être pas là son dernier crime j’espère qu’il lui reste une once d’humanité pour permettre à d’autres familles toujours dans l’angoisse et dans le questionnement de connaitre enfin la vérité et pouvoir entamer alors leur processus de deuil.

Viviane

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