La Cour de cassation a rendu sa décision mercredi 30 novembre 2022. EDF a été définitivement condamnée à indemniser France Nature Environnement pour la mort d’une espèce protégée de faucons dans le parc d’éoliennes d’Aumelas dans l’Hérault.


 

Le bras de fer dure depuis une dizaine d’années. Et en dernier ressort, la Cour de Cassation a finalement donné raison aux défenseurs de l’environnement. La justice, saisie par l’association France Nature Environnement (FNE), a constaté que « vingt-huit faucons crécerellettes (…) avaient été tués entre 2011 et 2016 par collision avec les éoliennes des parcs du Causse d’Aumelas ».

« Cette destruction perdurait malgré la mise en place » en 2014 d’un système électronique d’effarouchement. Or, en vertu d’une directive européenne, toute destruction de ces espèces protégées est illégale, sauf stricte dérogation préfectorale.

EDF Énergies nouvelles (devenue EDF Renouvelables France) et les entreprises exploitantes du parc n’ont pourtant jamais demandé cette dérogation qui aurait autorisé la survenue d’un nombre restreint d’accidents mortels. C’est ce qu’avait déjà fait remarquer la cour d’appel de Versailles dans son jugement rendu le 2 mars 2021.

Les juges avaient alors reconnu « l’imprudence » des exploitants et les avaient condamnées à verser 3 500 euros de dommages et intérêts à FNE.

Contestant le droit de l’ONG d’agir en justice dans ce dossier, EDF avait attaqué la décision devant la Cour de cassation. Celle-ci a donc officiellement rejeté ce pourvoi mercredi 30 novembre 2022, en rendant la condamnation définitive.

« À travers cette importante jurisprudence, c’est toute la doctrine construite par la filière éolienne et le ministère de l’Environnement concernant les destructions d’espèces protégées par les éoliennes qui est remise en cause », s’est félicitée France Nature Environnement Languedoc-Roussillon dans un communiqué.

 

Des éoliennes et des faucons

 

Une trentaine d’éoliennes ont fleuri entre 2006 et 2012 sur le Causse d’Aumelas, au sud-est de Lodève dans l’Hérault, sur un site Natura 2000 désigné pour la protection d’espèces d’oiseaux menacées. Ce parc industriel géré est exploité par sept filiales de la société EDF.

Mais, selon FNE, la plus importante colonie de France de faucons crécerellettes niche à proximité de ces éoliennes, dans les villages de Saint-Pons-de-Mauchiens, Villeveyrac et Saint-Pargoire. Ce petit rapace grégaire a failli disparaître dans les années 1980, mais grâce aux actions des associations de protection de la nature et de l’État, via le ministère de la Transition Écologique qui a investi dans un Plan national d’action spécifique (PNA : près de 1,7 millions d’euros engagés depuis 2007), l’espèce a pu être sauvée de l’extinction.

« Depuis 10 ans, parmi les 30 espèces protégées impactées par les éoliennes d’Aumelas, une soixantaine de spécimens de Faucons crécerellette ont été retrouvés morts au pied des éoliennes de ce parc, assure néanmoins FNE Languedoc-Roussillon. Selon le bilan du PNA pour cette espèce, ces 60 spécimens ne constituent que la part visible de la mortalité causée par le parc, estimée au triple. »

 

De l’électricité dans l’air

 

« Une infrastructure de production d’énergie renouvelable ne peut pas se prétendre écologique si elle ne respecte pas le droit de l’environnement », explique France Nature Environnement, très impliquée dans le débat parlementaire sur les énergies renouvelables. Avec plusieurs des principales associations environnementales, FNE critique vivement le projet de loi du gouvernement en cours d’examen à l’Assemblée nationale.

Le texte vise à rattraper le retard de la France sur ses engagements de développement des renouvelables, notamment en limitant les recours contre les projets éoliens et solaires. Mais beaucoup, parmi ces défenseurs de l’environnement, craignent de voir la biodiversité sacrifiée au profit d’objectifs climatiques.

Certains parcs ont été construits au mauvais endroit, de telles erreurs doivent pouvoir être corrigées.

Simon Popy, président de France Nature Environnement Languedoc-Roussillon.

L’association demande aujourd’hui « l’arrêt des éoliennes d’Aumelas pendant la période de présence des faucons crécerellettes » et que le Causse d’Aumelas soit sorti des « zones favorables à l’éolien dans la nouvelle planification régionale en cours d’élaboration ».

 avec AFP