Des parlementaires américains de gauche ont déposé le 26 juillet un projet de loi visant à pousser les États-Unis à mener leur propre enquête sur la mort de la journaliste américano-palestinienne Shireen Abu Akleh.


 

La journaliste Shireen Abu Akleh, reporter de la chaîne Al Jazeerah a été tuée d’une balle juste sous la coupe de son casque, le 11 mai 2022, alors qu’elle couvrait une opération militaire israélienne aux abords du camp de réfugiés de Jénine en Cisjordanie. Shireen Akleh portait également un gilet pare-balles marqué « presse ».

La reconstruction des faits par Associated Press ainsi que l’enquête de l’ONU établissent une responsabilité israélienne.

Toutes les informations recueillies « y compris de l’armée israélienne et du procureur général palestinien, corroborent le fait que les tirs qui ont tué Mme Abu Akleh et blessé son collègue Ali Sammoudi provenaient des forces de sécurité israéliennes et non de tirs indiscriminés de Palestiniens armés comme l’affirmaient initialement les autorités israéliennes », a déclaré Ravina Shamdasani, porte-parole du Haut commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme, le 24 juin 2022. « Les auteurs doivent être tenus comme responsables », a-t-elle fait valoir.

Ce scénario a été jugé « vraisemblable » par les États-Unis qui ont publié un rapport le 4 juillet : l‘analyse américaine n’a pu atteindre de conclusions définitives, le projectile étant « très endommagé ». L’hypothèse d’un tir intentionnel n’a pas été retenue, le communiqué du département d’État indiquant qu’il s’agirait plutôt du « résultat de circonstances tragiques ».

Selon Reporters sans frontières (RSF), les États-Unis n’ont pas fourni les détails de l’enquête. RSF dénonce des conclusions floues et appelle à davantage de transparence.

L’armée israélienne, qui avait également procédé à une expertise balistique en présence de « responsables sécuritaires américains », n’a pas relevé dans son communiqué que la journaliste avait été « vraisemblablement » victime d’un tir israélien, précisant plutôt qu’il n’y avait pas de « conclusion définitive ».

L’Autorité palestinienne soulignent quant à elle des « tentatives de cacher la vérité ».

Lors de sa visite en Cisjordanie le 15 juillet dernier, le président Joe Biden a a appelé à faire « toute » la lumière sur cette affaire.

Invités par Antony Blinken, chef de la diplomatie américaine, les proches de Shireen Abu Akleh se sont rendus le 26 juillet à Washington pour rencontrer les élus du Congrès et demander une enquête américaine indépendante, « approfondie, crédible et transparente » sur les circonstances de la mort de la journaliste qui mènerait « à une véritable responsabilité ».

« Si nous permettons que le meurtre de Shireen soit oublié, nous envoyons le message que les vies des citoyens américains n’ont pas d’importance, que les vies des Palestiniens qui vivent sous occupation israélienne n’ont pas d’importance, que les journalistes les plus courageux du monde, qui couvrent l’impact humain des conflits armés et de la violence peuvent être sacrifiés », a affirmé la famille de Shireen Abu Akleh avant les entretiens.

Les échanges n’ont mené à aucun engagement significatif de la part du secrétaire d’État, ni du président Joe Biden.

Le même jour, des élus de la gauche du parti démocrate ont annoncé l’élaboration d’un projet de loi qui pousserait les autorités américaines à mener leur propre enquête afin d’établir l’origine du tir. « Nous appelons nos collègues à voir cela comme relevant de la liberté de la presse, a déclaré à la presse Andre Carson, élu démocrate, à mettre de côté la politique politicienne autour d’Israël et des Palestiniens pour bien voir de quoi il s’agit : une attaque visant le journalisme indépendant et le meurtre d’une de nos compatriotes ».
Les parlementaires des partis de gauche ont donc déposé, le 28 juillet dernier, le texte visant à rendre obligatoire une enquête pour tout journaliste américain tué à l’étranger.

Avec AFP, RSF

 

Shireen Abu Akleh Photo AP

 

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