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Mettre fin au trafic des données personnelles

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Miao Xiaochun. — « Fluoroscopy », 2012 © Miao Xiaochun – Galerie Paris-Beijing, Paris

 

 

 

 

Longtemps, les États ont toléré toutes les infractions des industries numériques, qu’il s’agisse de fiscalité, de propriété intellectuelle ou de vie privée. Il fallait « agir vite et casser des choses », selon le mot de M. Mark Zuckerberg. Mais le rapport de forces avec les puissances publiques bascule. La question n’est plus de savoir si l’activité de ces groupes sera réglementée, mais comment et au profit de qui.

a vie de Mme Catherine Taylor a basculé le jour où un courtier en données personnelles a inscrit par erreur dans son dossier : « Tentative de vendre et de fabriquer des méthamphétamines ». Cette fausse accusation s’est répandue comme une traînée de poudre, par le truchement des ventes effrénées d’informations relatives aux consommateurs. Lorsqu’elle postulait à un emploi, ce stigmate numérique lui collait à la peau et faisait fuir les recruteurs. Elle ne pouvait même pas s’acheter un lave-vaisselle à crédit.

ChoicePoint, l’une des nombreuses entreprises de collecte de données personnelles, a fini par corriger sa bévue. Mais beaucoup d’autres sociétés à qui elle avait vendu le dossier de Mme Taylor n’ont pas suivi. L’intéressée a dû les harceler et les poursuivre en justice ; des démarches dont elle sort épuisée. « Je ne peux pas passer mon temps à monter la garde », confiait-elle à la journaliste du Washington Post qui a révélé son histoire. Il lui a fallu quatre ans pour obtenir un emploi et, ne parvenant toujours pas à se loger, elle a dû acheter une maison par l’intermédiaire de sa sœur. Elle affirme que le stress provoqué par cette situation a aggravé ses problèmes cardiaques.

Pour chaque Catherine Taylor, consciente de l’origine de sa mauvaise réputation, des milliers de personnes subissent sans le savoir profilage et espionnage numériques. Les mêmes entreprises qui utilisent des algorithmes sophistiqués pour nous surveiller et nous manipuler se cachent derrière le secret des affaires lorsqu’elles sont sommées de rendre des comptes.

Journalistes et lanceurs d’alerte entrouvrent périodiquement une fenêtre sur le fonctionnement opaque de la nouvelle économie numérique. Leurs révélations sur la manière dont l’entreprise Cambridge Analytica a siphonné des informations d’utilisateurs de Facebook ont attiré l’attention sur la nécessité d’une politique des données. Mis sous pression, les États se sentent tenus d’agir pour réguler leur usage.

Frank Pasquale 

Source  Le Monde Diplomatique Mai 2018 (lire la suite de l’article)

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Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.