L’Assemblée nationale vote un nouveau délit  pour créer un « choc ». L’auteur de harcèlement scolaire pourra être un élève ou un adulte exerçant dans l’établissement. La proposition de loi de la majorité (LREM, MoDem et Agir) a été validée en première lecture par 69 voix.


 

« Définir un interdit clair » et provoquer « un choc dans la société ». L’Assemblée nationale unanime a voté mercredi 1er décembre la création d’un nouveau délit de harcèlement scolaire. Un peu plus de trois semaines après les mesures annoncées par Emmanuel Macron, les députés ont validé en première lecture par 69 voix une proposition de loi de la majorité (LREM, MoDem et Agir). Cinq députés de gauche, sceptiques sur le besoin d’une infraction spécifique de harcèlement scolaire, se sont cependant abstenus. Le Parti socialiste met en garde contre une loi « d’émotion ». « Nous ne sommes pas favorables à une criminalisation des mineurs et à une augmentation de la répression », a prévenu la députée Michèle Victory (PS) lors de l’examen en commission. Le texte doit désormais être examiné au Sénat en vue d’une adoption définitive d’ici la fin des travaux parlementaires en février prochain.

Jean-Michel Blanquer s’est félicité du « signal » envoyé. « Nous ne nous habituerons jamais à ce que des vies d’enfants soient brisées », a déclaré le ministre de l’Éducation nationale. Près d’un élève sur dix serait concerné chaque année par un harcèlement scolaire qui peut pousser la victime à mettre fin à ses jours, comme en témoignent plusieurs drames récents tel le suicide de la jeune Dinah dans le Haut-Rhin en octobre. Ce phénomène est ancien mais a été nettement aggravé par le développement des nouvelles technologies, passant souvent sous le radar des parents et des adultes. « Les effets de groupe sont amplifiés et il n’y a plus de limite, ni de temps, ni d’espace », souligne l’auteur de la proposition de loi Erwan Balanant (MoDem).

La proposition de loi aborde les questions de formation initiale ou continue des adultes, ainsi que la prévention. Les plateformes numériques auront une obligation de modération des contenus. La mesure phare consiste en la création d’un délit spécifique de harcèlement scolaire, celui-ci était jusqu’alors sanctionnable sous d’autres chefs dont le harcèlement moral. Le harcèlement scolaire sera punissable de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende lorsqu’il causera une incapacité totale de travail (ITT) inférieure ou égale à huit jours, voire s’il n’a pas entraîné d’ITT. L’âge de l’auteur sera pris en compte.

La mesure sera durcie si l’ITT excède 8 jours, et pourra même atteindre dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende lorsque les faits auront conduit la victime à se suicider ou à tenter de le faire. L’auteur pourra être un élève ou un adulte exerçant dans l’établissement.

Dans ses trois premiers articles, la proposition de loi traite de la prévention et de l’accompagnement des victimes et des auteurs. « Parce que l’essentiel dans le harcèlement scolaire, c’est la prévention », constate Erwan Balanant. Le droit à la protection contre ce phénomène est donc pleinement reconnu et s’applique à tous les établissements d’enseignement scolaire publics et privés sous contrat avec l’État, ainsi qu’à l’enseignement supérieur.

Afin d’assurer l’efficacité d’une première prise en charge des victimes par le personnel médical affecté au sein des écoles, des collèges, des lycées et des établissements d’enseignement supérieur, une formation, initiale ou continue, est prévue. Les médecins, les infirmiers et les psychologues scolaires seront formés à la prévention et à la prise en charge des victimes de harcèlement scolaire. De même, les établissements devront définir, dès la promulgation de la loi, un « protocole de prise en charge » des victimes.

Avec AFP

 

 Dessin de Jacques Azam Milan presse

 

Si vous êtes victime ou témoin de harcèlement scolaire, vous pouvez contacter le 3020, un numéro d’écoute et de prise en charge gratuit et anonyme. Le 3020 est joignable du lundi au vendredi, sauf jours fériés, de 9 heures à 20 heures du lundi au vendredi et de 9 heures à 18 heures le samedi.