Le chanteur et musicien guinéen Mory Kanté, est décédé ce vendredi à l’âge de 70 ans à l’hôpital sino-guinéen de Conakry. Mory Kanté, surnommé le « griot électrique », a contribué à populariser la musique africaine et guinéenne à travers le monde. Il laisse un héritage immense pour la culture, trop vaste pour qu’on puisse tout citer », a dit son fils.   Il y a une dizaine d’années dans le cadre des Internationales de la guitare Mory Kanté évoquait à Montpellier les fondements de son engagement artistique.


 

 

Mory Kanté Photo DR

 

Ce concert de musique traditionnelle s’inspire de votre album  « Sabou » pourquoi ce retour aux sources ?

La musique traditionnelle est l’identité même de ma musique, je pense que cela participe d’une recherche d’authenticité. Je suis préoccupé par la disparition progressive des instruments traditionnels de plus en plus remplacés par les claviers. Je dispose d’une connaissance approfondie de ces instruments qui produisent par nature des sons discontinus. Dans l’album Sabou nous avons travaillé sur les sonorités en ajoutant des nappes sonores pour prolonger la continuité tout en préservant pleinement l’environnement artistique et culturel.

 

Vous avez créé à Conakry* un institut culturel. Quel en est l’objectif ?

Le complexe vient d’être terminé. Il sera inauguré en novembre. On y enseignera la pratique des instruments traditionnels comme leur conception. Ce lieu sera aussi consacré à la conservation de l’histoire orale. La tradition est tenue par les vieux griots. Nous allons archiver leur savoir ancestral et le rendre disponible au peuple et aux pays étrangers. L’institut culturel dispose aussi d’un studio d’enregistrement professionnel qui accueillera des musiciens du monde entier.

 

Étiez-vous à Conakry lorsque les hommes de Camara ont ouvert le feu sur la population le 28 septembre dernier ?

En tant que musicien, je ne souhaite pas m’exprimer sur les événements politiques.

 

Vous avez reçu les enseignements des griots ** quel est leur rôle ?

Le griot sert à réunir les gens. Il rassemble et évoque des questions en rapport avec la moralité et la paix. On n’obtient pas la paix en imposant un cessez-le-feu temporaire. La paix est le fruit d’un comportement. Il en est de même pour la question du développement.

 

Vous êtes aussi ambassadeur de la FAO***

La question de la faim dans le monde donne lieu à beaucoup de planifications mais leur mise en œuvre se heurte à des problèmes liés à la démocratie. Le monde sous-développé est géré par le monde développé. Aujourd’hui, le coût du sous-développement est plus élevé que celui qui serait utile au développement.

 

Où en est la conscience du peuple africain ?

Personne n’aime se trouver dans l’anarchie. L’Afrique a le droit de se développer. Il est nécessaire qu’elle soit respectée et que l’on cesse de vendre des armes pour que le peuple s’entretue. Le sous-sol de l’Afrique est riche et les Africains sont pauvres…

 

Recueilli Par Jean-Marie Dinh
 
 
Notes:

* Conakry capitale de la République de Guinée
** Les Griots occupent une place de chef spirituel
*** FAO organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture
 
Article paru dans La Marseillaise le 7 octobre 2009


 
 
 

 

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Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.