Des précisions pour une meilleure compréhension de ces chroniques journalières, notamment pour celles et ceux qui rejoignent leur lecture récemment ou de façon discontinue : le compte rendu précis et factuel des violences et violations du droit, commises par Israël, que compile Marsel quotidiennement dans un récit prennent leur source dans une observation documentée à la fois sur le terrain et à partir de différentes déclarations officielles ou médiatiques. Cet ensemble en constitue un document essentiel.

L’emploi très fréquent dans ces chroniques du mot « martyr » fait référence au fait « d’être assassiné par la guerre », c’est à dire mort. En ce moment, journellement il y a entre 150 et 200 morts par jour dans toute la bande de Gaza.


 

En fin de journée du 16 Avril Marsel envoie ces nouvelles informations sur le nord de Gaza :

« Un résumé de ce qui se passe à Beit Hanoun et à Jabalia Est : nous confirmons que l’occupation israélienne mène depuis hier une opération militaire à Beit Hanoun et à Jabalia Est. Des véhicules militaires ont avancé vers les abris de Beit Hanoun. L’école de Mahdia Al-Shawa est assiégée depuis hier soir, lorsque des centaines de personnes déplacées ont été localisées — et un centre d’enquête de terrain a été établi derrière l’école et il a été demandé aux femmes d’enlever le voile — et toutes les familles de Beit Hanoun ont été contraintes de fuir avec l’arrestation d’un certain nombre de jeunes hommes. Cette zone a été la cible de violents bombardements d’artillerie, d’avions de combat et de tirs nourris — jusqu’à présent, des véhicules militaires se trouvent près de la zone d’Abou Safiya, à l’est de Jabalia et de Beit Hanoun. »

Ces informations sont confirmées ensuite par Abu Amir

« Un nouveau crime contre notre peuple dans lequel l’occupation cherche à vider la ville de Beit Hanoun et la région orientale de Jabalia, au nord de Gaza. Hier soir, l’armée d’occupation a mené une opération militaire et ses bulldozers et ses chars ont avancé vers les centres d’hébergement de Beit Hanoun. L’école Mahdiya al-Shawa, où se trouvent des centaines de personnes déplacées, a été assiégée. L’armée d’occupation a également établi un centre d’enquête sur le terrain derrière l’école et a demandé à tout le monde de partir sous la menace des armes. Les femmes ont été forcées d’enlever leur hijab. Les hommes ont été dépouillés de leurs vêtements de dessus. Toutes les familles de Beit Hanoun ont été contraintes de partir et plusieurs jeunes hommes ont été arrêtés. Ce nouveau crime a eu lieu sous le couvert de violents bombardements d’artillerie, de bombardements d’avions de guerre et de tirs nourris. Des véhicules militaires sont toujours présents à l’heure actuelle près de la zone d’Abou Safiya, à l’est de Jabalia et de Beit Hanoun.

L’occupation n’était pas satisfaite des centaines de massacres qu’elle a commis dans ces zones, détruisant complètement les maisons de ses citoyens et obligeant ses habitants à les fuir pendant de nombreux mois. Et aujourd’hui, il répète le scénario du déplacement forcé de ses habitants par la force des armes… après leur retour au cours des dernières semaines et leur travail pour redonner de la vie à ce qui en restait.

Parlant des crimes de l’occupation, cet après-midi, l’avion d’occupation a bombardé le camp d’Al-Maghazi, tuant 10 enfants et en blessant plusieurs. Le scénario de destruction, de bombardement de maisons et de déplacements se poursuit dans le camp de Nuseirat, alors que l’occupation concentre ses attaques sur le nord de Nuseirat. Depuis plus d’une semaine, l’occupation a brutalement détruit en masse des maisons et des hélicoptères ont été largement déployés dans la région de Nuseirat, tirant continuellement sur les citoyens, blessant des dizaines de citoyens dans la région. Les habitants de la région de Nuseirat ne se sentent plus en sécurité dans leurs maisons et, en une semaine, nous constatons que la plupart des habitants du nord de Nuseirat ont de nouveau été déplacés de leurs maisons vers le sud.

Parlant de la région de Khan Yunis, d’où l’occupation s’est retirée après avoir détruit la plupart de ses bâtiments, les habitants ont lancé de nombreux appels demandant à la Défense civile d’évacuer les corps de leurs proches, estimés à des centaines, sous les décombres de leurs maisons. De plus, les équipes de protection civile ne sont toujours pas en mesure de mener à bien leur travail en raison du manque de capacités pour le faire. Pendant des années, l’occupation a refusé d’apporter du matériel aux équipes de la protection civile, ce qui les rend incapables d’effectuer leur travail, que je considère comme l’une des choses nécessaires à apporter.

Avant-hier, je suis entré dans la ville de Khan Yunis, en provenance de Rafah pour retourner à Nuseirat, échappant aux embouteillages sur la route côtière. J’ai décidé d’emprunter la route Salah al-Din, qui traverse le centre de la ville de Khan Yunis. Quelle horreur j’ai vue. Les bâtiments étaient en morceaux. Il n’y avait ni infrastructure ni rues. Les destructions ont été massives, à un taux de 70 %, selon ce que j’ai vu. De par mon travail dans la région sud, je connais bien la ville de Khan Yunis, mais je jure que je ne reconnaissais pas les rues et que je ne savais comment sortir de la ville qu’avec difficulté. C’est ce que fait l’occupation lorsqu’elle pénètre dans une zone de la bande de Gaza et fait des ravages sur le territoire. »


 

« Voilà ce que fait l’occupant lorsqu’il pénètre dans n’importe quelle zone de la bande de Gaza. Il y fait des ravages. » Ces propos d’Abu Amir écrits le 16 Avril au soir résument et imagent une situation apocalyptique qui ne cesse d’empirer jour après jour. Toujours silencieuse et passive, la communauté internationale braque les projecteurs sur l’Iran ce qui permet à Israël d’intensifier son offensive sur Gaza et de préparer son attaque terrestre à Rafah.

Marsel le 16 Avril au soir

« Les développements les plus marquants des événements survenus dans le camp de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, depuis ce matin :

Des tireurs d’élite de l’occupation tirent sur des citoyens à proximité du pont de Wadi Gaza sur le nouveau camp. Le minaret de la mosquée Al-Qassam au centre de Nuseirat a été visé par trois obus d’artillerie. Hôpital Al Awda à Nuseirat : 4 martyrs et 40 blessés suite au ciblage du camp de Nuseirat par l’occupation israélienne. Un certain nombre de martyrs et de blessés ont été tués suite à la prise pour cible d’une maison appartenant à la famille Zomlot à proximité de la mosquée Al-Quds dans le nouveau camp. Des bombardements d’artillerie ciblent le bâtiment Al-Sharif dans le territoire d’Al-Mufti, au nord du camp d’Al-Nuseirat. Destruction des derniers étages de la tour Fayed à l’intérieur du nouveau camp et destruction de la tour Harzallah au pays des Mufti. La maison de la famille Abu Rahma, dans le quartier d’Al-Rahma, dans le nouveau camp, a été prise pour cible et les maisons voisines ont été endommagées. Deux morts et blessés dans le bombardement d’une maison familiale dans le nouveau camp, à l’ouest de Nuseirat. Destruction de plusieurs tours Al-Salhi sur la route menant au nouveau camp. Les forces d’occupation ont ouvert le feu sur tous ceux qui se déplaçaient à l’intérieur du camp. L’artillerie d’occupation a visé une maison d’habitation dans le bloc C du camp et des blessés ont été signalés. »

Chanel 13 : Première parution : Israël se prépare à tenter de faire face à l’envoi d’une flotte humanitaire à Gaza depuis la Turquie, « Marmara 2 ». La flotte humanitaire destinée à Gaza devrait quitter la Turquie au début de la semaine prochaine, et de hauts responsables de la sécurité en Israël mènent un dialogue avec les Turcs pour trouver des solutions qui permettraient d’éviter une crise politique. On estime que la flotte comprendra trois navires, dont deux transporteront des passagers, dont des journalistes et des parlementaires turcs, tandis que le troisième navire comprendra une assistance. Un certain nombre de solutions sont envisagées, notamment l’arrivée de la flotte pour inspection en Égypte, et de là vers les côtes de Gaza, et le dialogue se poursuit avec les Turcs.

Piège sordide

Les habitants du camp de réfugiés de Nuseirat ont été abattus après avoir suivi les cris d’enfants émis par des drones israéliens via des haut-parleurs pour les attirer hors de chez eux et les cibler.

Défense Civile à Rafah : Ce soir, l’aviation d’occupation israélienne a visé une maison habitée dans le camp de Yabna, dans le centre de Rafah, faisant un certain nombre de martyrs et de blessés, dont la plupart étaient des enfants. Les équipes tentent toujours de récupérer les martyrs et les blessés malgré la surpopulation de la zone peuplée.


 

Dans la matinée du 17 Avril, à l’envoi des articles Marsel nous écrit :

« Vos efforts sont considérables pour ouvrir la voie à l’humanité et lutter contre tout ce qui contredit les valeurs humaines. »

Dans cette tourmente Marsel évoque des idées, des propositions, des espoirs, des utopies…

« À l’approche des 200 jours de guerre contre Gaza presque tous les habitants de la bande de Gaza seront déplacés, en tout cas la grande majorité d’entre eux l’ont été. Mon idée pour le 200e jour de guerre est de montrer le mauvais visage de la guerre. Par exemple, je compare les visages des gens avant la guerre et ceux d’aujourd’hui, qui ont vieilli car ils sont restés en enfer pendant des décennies. Nous faisons voir aux personnes déplacées leur photo d’avant et celle du 200e jour et nous parlons : ce qu’elles ont ressenti, leurs tragédies pendant la guerre, la façon dont elles ont survécu et si elles ont survécu, complètement ou non.

Nous pourrions organiser simultanément un événement de vol de cerfs-volants entre la France et la bande de Gaza, au cours duquel les enfants exigeraient la fin de la guerre. »


 

Marsel dans l’après-midi du 17 Avril

Quatre martyrs, dont deux enfants, ont été tués lorsque l’occupation a bombardé l’école Shuhaibar, qui héberge des personnes déplacées, dans le camp de Beach, à l’ouest de la ville de Gaza.

Premier ministre israélien : Le gouvernement a approuvé le « Plan de Renaissance » pour réhabiliter l’enveloppe des colonies de Gaza d’une valeur de 19 milliards de shekels.

De violents raids israéliens secouent actuellement certaines parties de la ville de Gaza.

Retrait des véhicules israéliens du nord de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza.


 

Dans la nuit du 17 au 18 Avril informations de Marsel :

Les équipes de la Défense civile ont pu récupérer un certain nombre de martyrs et transporter un certain nombre de blessés, après que des avions d’occupation israéliens aient ciblé ce soir une résidence située sur une terre agricole dans le quartier d’Al-Salam, à l’est du gouvernorat de Rafah.

On voit le geste humanitaire de la jeunesse de Gaza qui sauve un chat coincé à la frontière égypto-palestinienne.

« Dans les moments où les mots se dissolvent face à l’éloquence d’une image, l’impuissance silencieuse devient peut-être le choix supérieur. Plus on approfondit l’éloquence et le symbolisme de l’image, plus l’essence des mots s’efface, laissant place à l’enchantement du profond silence pour révéler sa magie dans la critique et dans la transmission de profondes leçons.

De nombreux murs et barbelés délimitent les espaces, tandis qu’un chat est perché à une hauteur significative au-dessus de la clôture frontalière. Prisonnier du désespoir, à chaque instant qu’il passe au sommet de la clôture il est en proie à une menace de mort imminente. Dépourvu de perception et de prouesses analytiques, le chat s’appuie uniquement sur son instinct de survie. Cette pulsion primordiale oblige le chat à jeter son regard vers la bande de Gaza et à lancer son appel à l’aide, attendant l’aide avec une confiance inébranlable. Pourtant, malgré les assauts incessants des forces d’occupation qui ont ciblé chaque fibre de leur être depuis leur naissance, les Palestiniens n’ont pas été dépouillés de leur humanité.

En entendant l’appel de détresse du chat et en étant témoin de sa situation précaire au sommet de la clôture, entouré du spectre de la mort, ils n’ont pas hésité. Ils n’ont convoqué aucune réunion, n’ont émis aucune condamnation et n’ont pas non plus été influencés par le veto du chef tribal. Leur seul objectif était d’aider le chat. Ignorant le danger et les répercussions potentielles de l’escalade d’une clôture frontalière, ils ont récupéré une échelle et se sont prêtés main-forte. Le jeune homme tendit la main vers le chat, l’attirant dans ses bras, où il s’assit sereinement, sans tenter de s’enfuir.

Bien que de nombreuses personnes aident les chats, rares sont ceux qui sont prêts à risquer leur vie pour en sauver un. Beaucoup ont troqué leur humanité pour s’accrocher à la vie, tandis que seule une poignée est prête à sacrifier leur vie pour préserver l’essence même de l’humanité. Exprimons notre gratitude et notre respect à nos jeunes pour leurs blessures, leur endurance, leur détermination qui a rendu l’occupation désespérée et les précieuses leçons humaines qu’ils transmettent au milieu de notre réalité déshumanisante. »

Marsel


 

18 avril, Marsel nous envoie ces informations terribles recueillies auprès de médias arabes :

Les tractations politiques entre l’occupation israélienne et les puissances impérialistes continuent de se faire sur le dos du peuple gazaoui…

Rapport : L’administration Biden accepte une invasion israélienne de Rafah en échange d’une attaque limitée contre l’Iran.

Gaza – Site en ligne Al-Alam 24 : Une source égyptienne a déclaré que « l’administration américaine a montré son acceptation du plan présenté précédemment par le gouvernement d’occupation (israélien) concernant l’opération militaire à Rafah en échange de la non-exécution d’une attaque à grande échelle contre l’Iran ».

Jeudi, journal « Al-Arabi Al-Jadeed » : La source égyptienne a ajouté : « Le plan israélien repose sur la méthode de déplacement, en divisant Rafah en carrés numérotés, en ciblant une place après l’autre, en poussant les (personnes déplacées) qui s’y trouvent à s’en éloigner, spécifiquement vers Khan Yunis et Al., région de Mawasi. » La source a souligné : « Dans le cadre des préparatifs égyptiens dans ce contexte, il y a eu une augmentation de la capacité des camps de la ville de Khan Yunis, qui est gérée par le Croissant-Rouge égyptien, et une augmentation des montants de l’aide, en coordination avec la partie israélienne. »

La source a déclaré : « L’armée d’occupation a dirigé des frappes aériennes sur plusieurs zones adjacentes à la bande frontalière entre la bande de Gaza et l’Égypte » et que « les responsables égyptiens compétents ont été informés avant de mener certaines de ces frappes, qui ont eu lieu à Philadelphie — axe sur un terrain vide adjacent à la frontière avec l’Égypte — affirmant qu’ils étaient utilisés pour faire passer des armes en contrebande au Hamas. » La source égyptienne a estimé que Le Caire « s’est trouvé contraint d’affronter sur le terrain l’opération militaire prévue, afin d’atténuer la gravité de ses répercussions, à la lumière des nouveaux accords entre l’administration américaine et le gouvernement d’occupation. »

Pendant ce temps, ABC a cité aujourd’hui un responsable américain disant : Une attaque israélienne contre l’Iran n’est pas attendue avant la Pâque juive, qui commence la semaine prochaine et se poursuit jusqu’à la fin de ce mois, mais il a ajouté que cette affaire pourrait changer. Le responsable américain a ajouté : Une partie de la direction des Gardiens de la révolution iraniens est toujours déployée et une autre section se trouve dans des sites souterrains.

 

Compte rendu d’Abu Amir le 19 Avril : l’organisation de l’urgence pour les paysans déplacés et la destruction massive du village des paysans où se trouvait le projet agricole

Un rapport sur le travail humanitaire dans le camp des agriculteurs déplacés de l’Est de Khan Yunis :

La crise humanitaire s’est considérablement aggravée dans la plupart des régions de Gaza, notamment en raison de la cessation des activités de la plus grande organisation humanitaire de la bande de Gaza, qui fournissait de la nourriture à une grande partie des personnes déplacées, ce qui a provoqué une famine dans diverses régions de la bande de Gaza.

L’autre raison est le mouvement des personnes déplacées du nord de la bande de Gaza vers le sud, de la région de Nuseirat vers Deir al-Balah et Mawasi Khan Yunis, et enfin de Rafah vers le centre de la bande de Gaza. Les personnes déplacées se déplacent constamment d’une zone à l’autre en fonction des attaques lancées de temps à autre par l’occupant. Il y a deux semaines, les habitants du nord de Nuseirat ont été déplacés à Mawasi Khan Yunis en raison des bombardements intenses dans cette zone. Aujourd’hui, après le retrait de l’occupant du nord de Nuseirat, les habitants sont retournés dans leurs maisons détruites, préférant rester au milieu des décombres de leurs maisons.
Ils sont sous les tentes dans d’autres zones de la bande de Gaza.
Cette situation a considérablement épuisé les habitants de la bande de Gaza et leur a fait perdre une grande partie de leurs moyens de subsistance.

World Central Kitchen a fourni une aide estimée à environ 4 tonnes par le point de passage d’Erez dans le nord de la bande de Gaza et fait savoir son intention de reprendre son travail dans le nord de la bande de Gaza, mais jusqu’à présent son travail dans le sud de la bande de Gaza a été suspendu jusqu’à nouvel ordre.

D’autre part, le nombre d’agriculteurs augmente à la lumière de la nouvelle annoncée par l’occupant de son intention d’entrer bientôt dans la ville de Rafah. Le nombre de familles dans le camp a atteint 738 familles jusqu’à présent.

Les personnes déplacées dans le camp dépendent de l’équipe de l’UJFP Gaza, qui est devenue un membre clé de l’administration du camp et qui est entièrement responsable pour répondre aux besoins du camp en matière de nourriture, d’eau, d’infrastructures et de toutes les fournitures du camp. Des réunions hebdomadaires sont organisées pour l’administration du camp, afin de résoudre les problèmes croissants du camp jour après jour.

Les équipes de l’UJFP à Gaza fournissent des déjeuners trois jours par semaine aux familles dans le camp, ainsi que des paniers de légumes et parfois des fournitures alimentaires. Nous communiquons également avec de nombreuses institutions et affaires sociales pour fournir de la nourriture à ces familles pour le reste de la semaine, mais cela se fait avec beaucoup de difficulté et un travail intense, avec notre insistance constante pour que ces institutions couvrent le reste de la semaine.  Mais la question devient plus difficile car l’occupation rationne l’entrée de l’aide. Plusieurs personnes travaillent dans l’administration du camp pour surveiller les prix de la viande, de la volaille et des légumineuses afin de saisir toute opportunité de baisse des prix pour acheter les besoins du camp, pour faire une variété de repas en proportion du budget alimentaire fourni par l’UJFP.

Photos

La diversité des aliments destinés aux familles, et plus particulièrement aux enfants des camps que nous ciblons directement, est très importante. Nous veillons à ce que les repas soient complets, en essayant d’éviter le plus possible les conserves, dont l’utilisation excessive nuit à leur santé.

 

La situation à Khuza’a qui est la région où le projet agroécologique existait :

L’équipe de l’UJFP Gaza a visité le siège de l’UJFP dans la région de Khuza’a. Après le retrait des forces d’occupation de la ville de Khan Yunis vers les zones occupées en 1948 (comprendre Israël), nous nous sommes rendus au siège de l’UJFP dans la zone de Khuza’a pour constater la laideur des destructions commises par l’occupant dans ces zones en général et ce que l’occupation a détruit des projets agricoles que nous avons mis en place au fil des ans pour aider les agriculteurs dans les zones situées à l’est de Khan Yunis.


Nous avons d’abord traversé la zone d’Abu Taima pour voir l’horreur : la destruction totale causée par l’occupant, car il n’y a plus aucune maison habitable. La plupart des maisons sont en ruines. Nous avons trouvé des fermiers venus inspecter leurs maisons, et la tristesse les tue, car ils sont devenus des sans-abri. Dès qu’ils nous ont vus, ils se sont rassemblés autour de nous et ont commencé à se plaindre et à expliquer ce qui leur était arrivé, mais ce dont ils parlaient crevait les yeux : la situation parle d’elle-même. Nous avons essayé autant que possible de les réconforter avec quelques mots et de leur dire que leur existence est la plus importante et que tout peut être reconstruit, mais c’était très difficile pour eux, car ils ont tout perdu, leurs maisons, leurs récoltes, et beaucoup de leurs parents et de leurs proches.

Nous les avons quittés après leur avoir dit que nous étions avec eux et que nous allions recommencer, dans l’espoir que leur état psychologique s’améliore. Nous nous sommes ensuite rendus dans le village de Khuza’a. Dès que nous y sommes entrés, nous avons été choqués par le spectacle de la destruction. Des places résidentielles entières ont été rasées au point que l’on peut voir la clôture frontalière depuis le centre du village. Il n’y a pas de mots pour décrire l’ampleur des destructions subies par ce village.

Nous nous sommes ensuite rendus au siège de l’UJFP, qui comprend le château d’eau, la salle de réunion, l’usine de dessalement de l’eau, les deux puits qui alimentent le réservoir d’eau, ainsi que les panneaux solaires qui alimentent chaque puits en énergie électrique. Tous ces éléments ont été brutalement et délibérément détruits pour humilier les agriculteurs et les forcer à quitter leurs terres. L’occupant s’efforce depuis de nombreuses années de détruire tout ce qui sert aux agriculteurs dans les zones frontalières afin de les forcer à partir.

De plus, il a détruit la seule pépinière de toute la région orientale, qui dessert des centaines d’agriculteurs qui dépendent entièrement de la pépinière pour leur fournir gratuitement des plants. Nous n’avons pas pu atteindre la zone de la pépinière parce que l’occupant a rasé la plupart des terres situées entre l’arboretum et la clôture frontalière, derrière laquelle se trouvaient de nombreux chars d’assaut. Par conséquent, ces zones sont devenues exposées et il n’a pas été possible de s’y rendre pour documenter la destruction de cet édifice agricole.


 

Dans la nuit du 21 au 22 Avril Marsel nous envoie le compte rendu de l’activité du centre Ibn Sina auprès des enfants des personnes déplacé.e.s ; cette intervention est rendue possible avec la cagnotte organisée sur le site de l’ UJFP et envoyée à Gaza.

« Bonsoir, camarades, nous menons nos activités successivement à la suite de la menace de l’occupation de bombarder les camps de déplacés à la frontière, selon ce qui a été dit, et il nous a fallu mener nos interventions urgentes, notamment dans le domaine de la santé mentale des enfants, qui a commencé à se détériorer considérablement. »

1. La tente mobile de l’espoir comprend un spectacle de cinéma pour enfants, ainsi que des ateliers de sensibilisation et un soutien psychologique pour les enfants et les mères. Cependant, après que l’occupation a annoncé son intention de déplacer les habitants de Rafah vers la région de Khan Yunis et a intensifié les bombardements sur Rafah, il nous fallait une installation mobile avec un équipement léger. Pour l’instant, nous avons opté pour la création du cinéma mobile, une idée pionnière et première du genre, visant à réunir les familles en un même lieu loin de la peur et de l’isolement, et à atténuer les difficultés rencontrées par les personnes déplacées (les habitants interagissent davantage avec les dessins animés que les enfants eux-mêmes). Nous avons même reçu des demandes de jeunes et même de personnes plus âgées pour diffuser le match d’aujourd’hui pour eux. Aujourd’hui, nous avons réussi à briser la barrière de la peur, et tout le monde a fini leur journée avec le sourire. Tout le monde a pris l’habitude de dormir dans sa tente au camp le soir venu.

2. Activité récréative et accompagnement de groupe pour les enfants.

3. Alors que l’été arrivait et que les températures commençaient à augmenter, les enfants ont continué à porter des vêtements d’hiver épais parce qu’e c’étaient les seuls qu’ils avaient. Nous avons donc commencé à proposer des vêtements d’été pour garçons et filles.

4. En interviewant un enfant et ses parents on apprend que l’enfant a perdu la parole à cause du choc. La maison voisine de sa maison a été bombardée par les missiles israéliens F-16, ce qui a fait que la fillette a souffert d’une perte complète de la parole ainsi que d’une hyperactivité. Par ailleurs elle souffre d’allergies au blé et aux céréales, elle est donc obligée de manger des aliments spécifiques tels que des légumes et des fruits.


 

« Est-ce que nous Ibn Sina, l’UFP et le mouvement de solidarité français faisons des miracles ? Ou Est-ce que ce sont ces enfants qui font des miracles ? Je suis sûr que si les dirigeants de l’occupation avaient compris, d’un point de vue militaire, le degré de détente et de bonheur de cet enfant, ils auraient immédiatement déclaré leur échec. S’ils voyaient la situation d’un point de vue familial en tant que parents et considéraient les enfants du camp comme leurs enfants, loin de la sale politique de discrimination ethnique et raciale, ils auraient jeté de leurs mains les outils de meurtre et auraient immédiatement arrêté le génocide. »

Ces propos de « rêve » de Marsel utilisent un temps qui est celui du conditionnel…


 

Aujourd’hui, 23 avril.

Par téléphone Abu Amir nous donne des informations de la dégradation importante à Gaza :

« La situation dans la bande de Gaza se détériore. À Nuseirat l’armée a rasé des quartiers entiers. Ce matin encore nous venons d’apprendre la destruction d’un immeuble où vivent des gens que nous connaissons. Nous attendons avec anxiété des informations. »

Dans le camp des paysans et de leurs familles

Depuis le retrait de WCK (World Central Kitchen), le camp est affamé. Nous nous efforçons de trouver d’autres sources de nourriture. Comme équipe UJFP, nous sommes membres de l’organisation du camp, nous en assurons même la présidence. On attend de nous que nous réglions tous les problèmes.
Un problème essentiel est celui de l’eau. La pompe du forage qui nous alimentait est grillée, et on a de sérieux problèmes avec le gaz qui permet d’actionner le générateur. La solution serait une batterie solaire, qu’un voisin du camp accepterait d’utiliser sur son forage pour nous donner de l’eau, mais une batterie solaire, c’est très, très cher. Il faut voir suivant la puissance, mais pour 600 watts, le prix qui était auparavant de 800 shekels (pour une batterie neuve) est maintenant de 2 500 shekels pour une batterie d’occasion. Tout le monde en cherche dans toute la bande de Gaza.

Cela fait une semaine que nous n’avons pas d’eau, j’ai pu débrouiller deux jours d’eau potable, j’espère arriver à faire venir un camion la semaine prochaine pour 2 autres jours d’eau potable. Mais le problème est entier pour l’eau des autres besoins, hygiène en particulier.

Il y a d’énormes problèmes avec l’argent : grâce à la solidarité française transmise par l’UJFP, il a de l’argent sur son compte mais il n’y a plus de cash à Gaza. Je me débrouille parce qu’on me connaît et que mes interlocuteurs me font confiance. Les distributeurs automatiques de billets sont assaillis par des milliers de personnes voulant retirer de l’argent.
La pénurie a provoqué l’apparition de voleurs armés qui essaient de s’emparer de l’argent liquide qu’ils peuvent trouver. Les commerçants qui peuvent accéder au cash à partir des cartes bancaires demandent un pourcentage indigne : 25 %.

Western Union prélève aussi des sommes importantes sur les virements, ce qui n’existait pas autrefois.
Il faut dire qu’il y a vraiment pénurie de cash. Partout aux carrefours, on voit des milliers de petits vendeurs, qui vendent tout et n’importe quoi, et gardent leur monnaie sur eux en cash, sans rien ré-injecter dans le système financier.

Pour l’instant je fais face, avec l’aide de personnes du camp et du Mokhtar Abu Jamal (resté au Caire depuis octobre). »


 

Parfois quand le temps des nouvelles est trop long ou que les pensées sont assaillantes, l’envoi d’un message est impérieux : une réponse d’Abu Amir à l’un de ceux-ci la nuit du 26 au 27/04 :

« La barbarie de l’occupation se poursuit encore dans la guerre d’extermination et de déplacement, et le siège montre toujours son horrible visage, provoquant une véritable famine et une crise majeure du secteur de la santé, qui a atteint le gouffre. Les citoyens attendent toujours une lueur d’espoir pour arrêter la guerre, tandis qu’ils pansent leurs blessures d’une part et enterrent leurs proches de l’autre. Il n’existe plus aucune famille qui n’ait perdu un de ses membres, un proche ou un foyer. Tout le monde ici attend de mourir à tout moment, car il n’y a aucun endroit sûr. »

Matinée du 27/04, d’autres informations et compte rendu d’activité de l’équipe d’Abu Amir :

Un autre crime odieux de l’occupation

« En plus d’une semaine, les corps de plus de 283 martyrs ont été retrouvés dans la fosse commune du complexe médical Nasser. C’est une nouvelle preuve supplémentaire du caractère sanglant et nazi de l’occupation.

Aujourd’hui, d’autres corps de martyrs ont été retrouvés à proximité de l’hôpital Nasser. Des enfants, des femmes et des médecins, menottés, ont été directement exécutés pendant la présence de l’occupation dans la zone. C’est le vrai visage de l’occupation, qui tente de déformer la vérité en faisant croire au monde que ses soldats et ses véhicules sont à Gaza dans le but de poursuivre les membres du Hamas, mais le véritable objectif est d’exterminer le plus grand nombre possible de Palestiniens.

C’est ce que présente la réalité que nous voyons de nos propres yeux, ces charniers sont une preuve claire qui n’accepte aucune interprétation ou déformation du caractère sanglant de l’occupation qui a tué et exterminé tout ce qui est palestinien. 

Les charniers et l’extermination quotidienne de notre peuple nécessitent une pression internationale et politique pour activer les résolutions onusiennes et internationales et mettre en œuvre les mesures de précaution prises par la Cour de justice pour protéger notre peuple et le sauver de la guerre d’extermination.

L’effondrement de la situation sanitaire dans le nord de Gaza représente une catastrophe humanitaire majeure qui menace de mort certaine de nombreux habitants, la plupart des hôpitaux et des cliniques étant hors service et le manque total de fournitures médicales.

La crise humanitaire et la famine dans la bande de Gaza continuent de s’aggraver à la lumière de l’entêtement de l’occupation à rationner l’entrée de l’aide dans la bande de Gaza.

L’occupation exerce une pression en rationnant l’entrée de l’aide et en menaçant d’envahir la ville de Rafah pour relever le plafond des négociations et obtenir le plus grand nombre possible de concessions de l’autre partie, ce qui a rendu la vie presque impossible aux habitants de la bande de Gaza. Nous souffrons de prix incroyablement élevés en raison de la pénurie de produits alimentaires et des mouvements de population continuels à cause des bombardements barbares qui touchent diverses zones de la bande de Gaza.

Cette crise touche les agriculteurs du camp, dont le nombre ne cesse d’augmenter et dont les besoins de subsistance sont devenus de plus en plus difficiles à satisfaire. Plusieurs problèmes se posent, comme par exemple les problèmes d’eau, de médicaments, de légumes, de denrées alimentaires et de produits de nettoyage. Nous travaillons avec toute notre énergie pour communiquer avec chacun et pour apporter le nécessaire. Parfois nous réussissons, nous continuons à travailler pour aider ce groupe qui a beaucoup souffert.

Nous poursuivons toujours le programme qui propose des déjeuners trois jours par semaine avec le soutien de l’UJFP. »

 

mise à jour le 27 avril 2024.

(…)


À propos des témoignages

Juste avant l’attaque du Hamas en territoire israélien le 7 octobre 2023, une mission d’information devait se rendre à Gaza, depuis la France, pour informer de l’action de la société civile gazaouie, sur le terrain. Des relais essentiels en étaient Abu Amir Mutasem Eleïwa. Personnalité indépendante, très respecté dans la bande Gaza, il est l’animateur des Projets paysans. Il est aussi l’interlocuteur privilégié de l’Union Juive Française pour la Paix, qui soutient ce programme.

Ces Projets paysans (château d’eau, coopérative de production, autoproduction de semences, solidarité quotidienne — dont l’ouverture d’une crèche) visent à consolider l’autonomie du territoire et contrecarrer le désir de le fuir. Autre interlocuteur de choix : Marsel Alledawi, responsable du Centre Ibn Sina pour l’enfance, vouée au suivi éducatif et psychologique. C’est l’une des rares structures strictement laïques du territoire.

La mission d’information n’ayant pu pénétrer à Gaza, c’est ensuite par conversations téléphoniques, messageries Messenger et WhatsApp que ces acteurs gazaouis ont entretenu un lien quotidien avec leurs interlocuteurs français. Dont le Marseillais Pierre Stamboul, vice-président de l’Union juive française pour la paix (UJFP), Sarah Katz (International Solidarity Movement), et Brigitte Challande, militante montpelliéraine de la solidarité avec les Palestiniens.

Ci-dessous, ils rendent publique la matière de ces récits reçus quotidiennement depuis Gaza. Cela dans l’espoir de valoriser les ressources de solidarité, les capacités d’adaptation dans les pires situations, dont est capable de faire montre la société civile gazaouie ; tout ne se résumant pas au seul Hamas.

Pour une meilleure compréhension de ce suivi, il faut savoir qu’Abu Amir Mutasem Eleïwa (coordinateur des Projets paysans) s’était déplacé au Caire, à la rencontre de la mission française. Il s’y est alors trouvé bloqué jusqu’à son retour dans la Bande de Gaza à la faveur de la seule trêve humanitaire survenue à ce jour. Enfin, par souci de fluidité, les deux interlocuteurs gazaouis cités ci-dessous le sont le plus souvent sous leurs seuls prénoms (Abu Amir et Marsel). Le mode de retranscription de leurs récits alterne la reprise in extenso de textes et propos de ces deux personnes (alors entre guillemets et en italique), ou bien des synthèses reformulées en seconde main (par exemple en cas de retranscription après coup du contenu de conversations téléphoniques).


 

Depuis le 20 novembre altermidi publie les témoignages quasi quotidien du peuple Gazaouis, tels qu’ils nous arrivent directement du terrain.

Partie 1 du 20 novembre 2023 au 4 janvier 2024. À lire ICI.

Partie 2 du 8 au 17 janvier 2024. À lire ICI.

Partie 3 du 18 au 27 janvier 2024. À lire ICI

Partie 4 du 28 janvier au 13 février 2024. À lire ICI

Partie 5 du 13 au 20 février ICI

Partie du 21 février au 4 mars ICI

Partie du 5 mars au 14 mars ICI

Partie du 15 mars au 30 mars ICI

Partie du 31 mars au 15 avril ICI


Brigitte Challende
Brigitte Challande est au départ infirmière de secteur psychiatrique, puis psychologue clinicienne et enfin administratrice culturelle, mais surtout activiste ; tout un parcours professionnel où elle n’a cessé de s’insérer dans les fissures et les failles de l’institution pour la malmener et tenter de la transformer. Longtemps à l’hôpital de la Colombière où elle a créé l’association «  Les Murs d’ Aurelle» lieu de pratiques artistiques où plus de 200 artistes sont intervenus pendant plus de 20 ans. Puis dans des missions politiques en Cisjordanie et à Gaza en Palestine. Parallèlement elle a mis en acte sa réflexion dans des pratiques et l’écriture d’ouvrages collectifs. Plusieurs Actes de colloque questionnant l’art et la folie ( Art à bord / Personne Autre/ Autre Abord / Personne d’Art et les Rencontres de l’Expérience Sensible aux éditions du Champ Social) «  Gens de Gaza » aux éditions Riveneuve. Sa rencontre avec la presse indépendante lui a permis d’écrire pour le Poing et maintenant pour Altermidi.