Des précisions pour une meilleure compréhension de ces chroniques journalières, notamment pour celles et ceux qui rejoignent leur lecture récemment ou de façon discontinue : le compte rendu précis et factuel des violences et violations du droit, commises par Israël, que compile Marsel quotidiennement dans un récit prennent leur source dans une observation documentée à la fois sur le terrain et à partir de différentes déclarations officielles ou médiatiques. Cet ensemble en constitue un document essentiel.

L’emploi très fréquent dans ces chroniques du mot « martyr » fait référence au fait « d’être assassiné par la guerre », c’est à dire mort. En ce moment, journellement il y a entre 150 et 200 morts par jour dans toute la bande de Gaza.


 

 

Le soir du 30 Mars, à l’envoi des photos à nos amis de Gaza d’une action de boycott de Carrefour pour commémorer la journée de la terre, Abu Amir répond très vite :

« Merci à vous et à tous ceux qui ont commémoré la Journée de la terre palestinienne. Vous représentez le centre de la solidarité face à l’abandon que le monde nous fait. »

Abu Amir déclare le 31 mars :

« Avant l’arrivée du mois de Ramadan, la plupart des habitants de la bande de Gaza et moi-même pensions que ce mois béni apporterait calme et réconfort à tous, d’autant plus qu’il s’agit d’un mois généreux et qu’il n’est pas permis d’y verser du sang. Mais Israël avait une opinion différente. L’occupant ne connaît pas ces rituels et ce qu’ils signifient, et ne connaît qu’un seul langage : le meurtre et la destruction.
La férocité et la brutalité de l’occupant se sont accrues en détruisant la bande de Gaza et en provoquant un maximum de morts palestiniens. L’occupant a détruit des zones entières pendant le mois de Ramadan, avec le soutien de l’Amérique, qui a fourni et continue de fournir des armes qui tuent les Palestiniens.
Même la résolution du Conseil de Sécurité en faveur d’un cessez-le-feu immédiat n’a pas encore été mise en œuvre et Israël n’y a pas adhéré parce que ce pays est au-dessus des lois et n’est pas soumis aux décisions du Conseil de sécurité, de la Cour pénale ou de toute autre résolution internationale. Par conséquent, tout ce dont le monde peut parler à cet égard, c’est du montant de l’aide et de la manière dont elle est acheminée. Mais face à tous ces crimes commis par l’occupant, le monde reste silencieux. C’est la caractéristique de cette époque : le silence. Alors, massacrons en silence pour ne pas déranger le monde.

Compte rendu de l’activité de l’équipe

Dans le prolongement de l’action humanitaire que nous menons au service des agriculteurs déplacés cette semaine, l’équipe de l’UJFP à Gaza a offert un petit-déjeuner aux agriculteurs qui jeûnaient les 22, 23 et 24 mars, vendredi, samedi et dimanche.

Nous avons également pu communiquer avec certaines institutions qui ont fourni gratuitement au camp 1 400 poulets, que nous avons cuisinés et distribués à toutes les familles du camp pendant deux jours, à raison de 700 repas par jour.

Des boîtes de lait
Nous avons également reçu 800 shekels, de Razan [Une Palestinienne de Cisjordanie qui a collecté cet argent lors de son passage à Marseille], à Gaza. Nous avons ajouté 600 shekels à cette somme et avons pu acheter 48 boîtes de lait, qui ont été distribuées aux nouveau-nés du camp. Il y a beaucoup de nouveau-nés qui souffrent énormément des conditions humanitaires difficiles dues à la pénurie de lait et de [couches] pampers.

Des bouteilles de gaz

Le 29 mars, l’équipe de l’UJFP a collecté cent bouteilles de gaz de cuisine dans le camp. Elle va les remplir au cours de la semaine prochaine et les distribuer aux agriculteurs pauvres du camp.


Nous continuons à travailler au service de ces agriculteurs. Nous les avons épaulés pour le travail de la terre par le passé, et nous faisons toujours ce que nous pouvons pour alléger leurs souffrances pendant leur déplacement et les aider à résister à la catastrophe humanitaire qui frappe la bande de Gaza et qui se poursuit encore aujourd’hui.


 

À minuit le 1er Avril, Marsel envoie l’information qui sera relayée par les médias dans la journée du 2 Avril concernant les travailleurs humanitaires bombardés et tués par l’armée israélienne. Israël a délibérément ciblé et assassiné sept membres de l’ONG humanitaire World Central Kitchen (WCK), qui étaient sur place pour alimenter des femmes, hommes et enfants contre la famine. Photos et une vidéo des corps inanimés, morts avec leurs passeports.

Le commentaire de Marsel est le suivant :

«  Leur crime, je ne sais pas quel est leur crime, peut-être qu’ils ont essayé de transporter des colis alimentaires qui sont internationalement interdits aux Palestiniens et ont violé les lois méprisables et sadiques des deux poids, deux mesures. L’occupation a assassiné une équipe étrangère. »

Cette organisation humanitaire a déclaré qu’elle arrêtait temporairement et immédiatement ses opérations dans la région et qu’elle prendrait prochainement des décisions concernant l’avenir de son travail.

L’agence média Palestine donne l’information suivante :

Dans une déclaration du 2 avril 2024, le coordinateur humanitaire pour le territoire palestinien occupé, James Eugene McGoldrick, affirme qu’« il ne s’agit pas d’un incident isolé. Au 20 mars, au moins 196 humanitaires avaient été tués dans le territoire palestinien occupé depuis octobre 2023. Ce chiffre est près de trois fois supérieur au nombre de morts enregistrés dans un seul conflit au cours d’une année ». Il ajoute également que « depuis octobre 2023, le territoire palestinien occupé est devenu l’un des endroits les plus dangereux et les plus difficiles dans lesquels travailler au monde. Il n’y a plus d’endroit sûr à Gaza ».

 

Ministère de la Santé à Gaza, communiqué par Marsel :

L’occupation a commis 7 massacres contre des familles dans la bande de Gaza, dont 71 martyrs et 102 blessés dans les hôpitaux au cours des dernières 24 heures.


 

Message d’Abu Amir par WhatsApp le 2 Avril au soir

Je ne peux plus parler des massacres que l’occupation commet contre notre peuple à Gaza. L’occupation se lance dans une course contre la montre pour tuer autant de personnes que possible. La population de Gaza n’a plus aucun espoir que ce génocide et ce nettoyage ethnique prennent fin. Pendant 6 mois, l’occupation a commis et continue de commettre des massacres devant le monde entier.

Nous savons que le colonialisme est brutal partout où il sévit, mais nous n’avons rien vu de plus laid et de plus criminel que l’occupation israélienne, qui a complètement démoli tout ce qui est humain.

Nous avons perdu beaucoup de nos familles et de nos proches, et maintenant nous nous couchons, ne sachant pas si nous verrons le jour ou si nous serons enterrés sous les décombres de nos maisons.

Notre tristesse est devenue une partie de nos vies et nous sommes perdus dans ce monde où nous marchons vers l’inconnu.

Gaza n’est plus ce qu’elle était et nos vies n’ont plus de valeur.

Nous sommes devenus de simples nombres : nombre de déplacés ou nombre de tombes.


 

Dans la matinée du 3 Avril, Marsel nous envoie cette liste de chiffres, une horreur pour l’humanité ; l’État d’Israël est sorti des rails, jusqu’à quand le monde laissera-t-il faire ?

Bureau des médias du gouvernement : Une mise à jour sur les statistiques les plus importantes de la guerre génocidaire menée par l’occupation dans la bande de Gaza pour le 180e jour :

– 2 922 massacres commis par l’armée d’occupation.

– 39 975 martyrs et personnes disparues. 32 975 martyrs arrivés dans les hôpitaux.

– 14 500 enfants martyrs. 30 enfants ont été martyrisés à cause de la famine.

– 9 560 femmes martyres.

– 484 martyrs du personnel médical. 65 martyrs de la Défense Civile. 140 journalistes martyrs.

– 7 000 disparus. 75 577 infectés.

– 73 % des victimes sont des enfants et des femmes.

– 17 000 enfants vivent sans leurs parents ni l’un d’eux.

– 11 000 blessés doivent voyager pour recevoir des soins « vitaux et dangereux ».

– 10 000 patients atteints de cancer risquent la mort et ont besoin d’un traitement.

– 1 088 764 infectés par des maladies infectieuses à la suite d’un déplacement.

– 8 000 cas d’infection par une hépatite virale due au déplacement.

– 60 000 femmes enceintes sont à risque en raison du manque d’accès aux soins de santé.

– 350 000 patients chroniques sont à risque en raison de la non-administration de médicaments. 310 cas d’arrestation de personnels de santé.

– 12 cas d’arrestation de journalistes dont les noms sont connus.

– 2 millions de personnes déplacées dans la bande de Gaza.

– 171 sièges du gouvernement détruit par l’occupation.

– 100 écoles et universités ont été entièrement détruites par l’occupation.

– 305 écoles et universités partiellement détruites par l’occupation.

– 229 mosquées ont été entièrement détruites par l’occupation.

– 297 mosquées partiellement détruites par l’occupation.

– 3 églises ciblées et détruites par l’occupation.

– 70 000 logements ont été entièrement détruits par l’occupation.

– 290 000 logements partiellement détruits par l’occupation et inhabitables.

– 70 000 tonnes d’explosifs largués par l’occupation sur Gaza.

– 32 hôpitaux mis hors service par l’occupation.

– 53 centres de santé que l’occupation a mis hors service.

– 159 établissements de santé visés par l’occupation.

– 126 ambulances ont été ciblées par l’armée d’occupation.

– 200 sites archéologiques et patrimoniaux détruits par l’occupation.


 

Vendeur qualifié

Au matin du 5 Avril, Marsel nous raconte l’histoire d’une rencontre au coin d’une rue : cette histoire met en lumière le quotidien particulier d’une vie où tous les repères sont brouillés, explosés, basculés dans cette situation de guerre génocidaire, sociocidaire, où la famine organise la vie quotidienne.

« Au coin de la route rêves dispersés et tentatives de survie. Après avoir dépassé cet homme de quelques mètres, je suis revenu rapidement, mais si précipitamment que je ne pouvais plus discerner mon chemin. Je revins sur mes pas, son attitude et ses marchandises attirant l’essentiel de mon attention. Le jeune homme, âgé d’environ une vingtaine d’années, a révélé sous son chapeau des traits qu’il aurait peut-être cherché à cacher par honte. Son visage respirait l’innocence, en particulier ce sourire qui ornait son visage la plupart du temps. C’était un jeune homme sympathique, avec un sac à dos en bandoulière et des boîtes ressemblant à des médicaments à la main. Ses paroles m’ont arrêté, m’incitant à une double écoute pour garantir l’exactitude de ce que j’ai entendu au milieu de sa promotion au ton doux de ses produits : vitamines avec zinc, vitamine C avec zinc. À ma connaissance, je sais bien que les vitamines, comme les médicaments, nécessitent une prescription médicale. Les médicaments sont-ils devenus un produit vendu au coin des rues en raison du manque de contrôle du ministère de la Santé dans le contexte de l’état d’urgence provoqué par la guerre ?

Je me suis retourné, je l’ai salué et j’ai commencé à en apprendre davantage sur ce jeune homme et sa marchandise, qui devrait idéalement se trouver sur les étagères des pharmacies et être délivrée sur ordonnance. Dans un premier temps, j’ai essayé de tester le jeune homme. J’ai demandé une boîte de vitamines, feignant d’ignorer son contenu. Je me suis renseigné sur le contenu de la boîte, ses avantages et sa date de péremption. Ses réponses m’ont assuré que ce jeune homme est bien informé sur ses marchandises et n’est pas simplement un vendeur ambulant. Interrogé sur le moment optimal pour prendre de la vitamine C, il m’a répondu qu’elle peut être consommée à tout moment de la journée, de préférence le matin ou l’après-midi, contrairement à la vitamine D, qui doit être prise le matin avec un repas gras et une exposition au soleil.

Interrogé sur la nécessité d’une prescription, il a précisé que si la vitamine D nécessite une prescription médicale et une analyse pour mesurer les taux de vitamine D avant la prescription, la vitamine C n’implique pas de tels prérequis. L’assurance du jeune homme, son discours articulé et ses réponses spontanées et fondées sur ses connaissances m’ont amené à m’enquérir de son expertise et à dévoiler son histoire. Ici, dans ce coin de déplacement, convergent rêves et espoirs, désespoir et privation, génocide et naissance. Ici, les contradictions s’entrelacent pour produire de Gaza une formule chimique rare, non fabriquée mais pourtant détectable. À Gaza même, le jeune M.J. est physicien, pharmacien et géologue, animé par une profonde passion pour l’astronomie et les sciences spatiales. Parlant couramment l’anglais, le français et l’arabe, il est originaire de la banlieue est de Khan Yunis. Sa résidence de quatre étages était en ruines, enfouissant ses rêves sous des tonnes de décombres avec ses certificats.

Ceux qui partent à la recherche d’un gagne-pain pour satisfaire la faim de leurs enfants, et savent qu’en échange, c’est la mort et la lave de plomb, et pourtant ils partent. Ici apparaît l’alchimie particulière du Palestinien qui le pousse à se sacrifier pour la survie des autres. »


 

Médias sous contrôle

Concernant la chaîne d’information Al- Jazeera1 maintenant interdite par décret en Israël :

Marsel envoie une vidéo qui montre qu’Al-Jazeera a acquis des images montrant les forces d’occupation ciblant des hommes dans le nord de Gaza alors qu’ils tentaient de rassembler de l’aide alimentaire parachutée près de la barrière frontalière. « Ces hommes, qui cherchaient désespérément à soulager leur faim, ont été abattus alors qu’ils ne se trouvaient pas à proximité de véhicules militaires ou de soldats. Les images documentent leurs tentatives pour accéder à l’aide et leur retraite au milieu des coups de feu. Un homme, touché par balles, tente de fuir mais succombe tragiquement, entouré de chiens. »


 

Abu Amir nous envoie le 6 Avril ce compte rendu précis, détaillé et de grande qualité sur l’action de leur équipe :

Dans le contexte de l’attaque féroce de l’occupation israélienne contre les habitants de la bande de Gaza, la crise humanitaire s’est intensifiée, en particulier après l’assassinat de l’équipe de travail internationale de la World Central Kitchen et l’annonce par cette institution de la suspension de son travail d’assistance aux habitants de la bande de Gaza. Il convient de noter que cette institution fournit plus de 35 % de l’aide destinée aux personnes déplacées dans la bande de Gaza. La plupart des cuisines des camps de réfugiés/déplacés travaillent par l’intermédiaire de cette institution.

L’occupation a assassiné de sang-froid l’équipe internationale de cette institution en bombardant directement les véhicules transportant l’équipe. Depuis l’annonce de la suspension des activités de cette institution, la plupart des camps sont privés de nourriture. Par conséquent, le fardeau s’est alourdi pour le groupe de Gaza de l’UJFP. Nous avons travaillé 24 heures sur 24 pour fournir de la nourriture à plus de 650 familles dans et autour du camp. Les 30 et 31 mars et le 1er avril, nous avons distribué des repas fournis par l’UJFP.

Trois vidéos à l’adresse suivante

https://drive.google.com/drive/folders/1LOlSBJ0oHYsrSUGN4MnNmMSmBjH-b83r?usp=drive_link

Nous avons également fourni 70 poulets d’une institution le 2 février, qui ont été cuits et distribués aux familles du camp.

20 photos à l’adresse suivante : https://drive.google.com/drive/folders/1GwOFog4BK8TOYcgHAc2Wj1PyALXv0K8i?usp=drive_link

Nous avons également pu organiser un iftar2 collectif pour ceux qui jeûnent dans le camp, le 3 février.

9 photos à l’adresse suivante : https://drive.google.com/drive/folders/1_5v5mrO32AfsMhOINfhP1eNb5k-H7BIg?usp=drive_link

Cette semaine, nous espérons réussir à remplir les bouteilles de gaz. Les bouteilles ont été envoyées à la station et nous attendons une réponse pour les recevoir et les distribuer aux agriculteurs.

Ces activités ont été menées la semaine dernière pour servir les agriculteurs. Nous travaillons actuellement à l’organisation d’un événement de divertissement pour les enfants à l’intérieur du camp afin d’atténuer les effets psychologiques de la guerre sur eux. Cet événement aura lieu le deuxième jour de l’Aïd al-Fitr3.


 

 

Message de Marsel par whatsApp dans la nuit du 7 au 8 Avril :

« Bonsoir, chers camarades. Vous me manquez tous, de la bande de Gaza, de tous ceux qui vous ont connu et de tous ceux à qui vous avez apporté de l’aide sans qu’ils connaissent votre personnalité ou votre visage. Vous avez mes meilleurs vœux et mes remerciements ainsi que les leurs. »

Par la suite Marsel envoie une vidéo sous titrée en français réalisée par le centre Ibn Sina à l’occasion de « la fête des mères ». Cette vidéo est terrible, elle raconte le trajet de l’exode des déplacé.e.s : « une expérience d’évasion, de mort en mort, de ciblage en ciblage ».
Ce sont les bombardements qui accompagnent les déplacé.e.s survolés par les F16 avec des exécutions sans raison à tous les checkpoints, à tous les points de passage où les caméras de reconnaissance faciale font la loi, celle de l’attente aussi avant de pouvoir avancer. Arrivé.e.s à ce que l’on peut supposer le bout pour l’instant, c’est-à-dire Rafah, ce sont les bombardements qui accompagnent la distribution de la farine au siège de l’UNRWA.

« Ci-joint la vidéo de l’initiative Fête des Mères. Au nom des enfants martyrs et pour atténuer la douleur de la perte qui déchire leurs mères, au nom de l’UJFP et du Centre Ibn Sina, nous avons rendu visite à quelques mères à l’occasion de la fête des mères, les honorant et offrant des cadeaux au nom de leurs enfants martyrs et en leur nom. Nous avons également organisé des réunions de suivi. Pour les violations et la manière brutale dont les soldats de l’occupation ont tué ces enfants sans raison et sans pitié. »

https://drive.google.com/file/d/1Hwe3xmLlK87eT0MGAoDCSnto8EUl1T_q/view?usp=drivesdk

Marsel ajoute le commentaire suivant :

« Je suis désolé que la vidéo soit longue, mais le témoignage des mères ne peut être coupé ou supprimé. C’est le témoignage d’un témoin, qui a été couvert du sang du génocide, blessé et saigné, et dont la maladie s’est mêlée au sang de leurs enfants martyrs. C’est le témoignage des témoignages les plus difficiles, le témoignage de mères dont le sang des enfants a été versé et dont les âmes ont été enlevées pour toujours et sans raison. »

Le centre Ibn Sina, dont c’est la raison d’être et la mission, met en place un suivi auprès des mères et un programme pour les enfants pendant la période des vacances avec des activités. Notamment à l’occasion de la Journée des enfants palestiniens.


 

Vivre sous des tas d’ordures

Marsel envoie ce texte au soir du 10 Avril :

« Tuer silencieusement »

« Peut-être n’avons-nous pas besoin de commenter les dégâts causés par le siège des ordures dans les tentes des personnes déplacées. Tout le monde connaît ses méfaits et ses dangers mortels. Mais avec tous les virus, bactéries et épidémies que transportent ces montagnes, elles restent plus propres que la saleté des actes d’extermination et de famine de l’occupation, et peut-être que nous, Palestiniens, avons été capables d’apprivoiser les virus jusqu’à ce qu’ils acquièrent de l’affection et de la compassion envers les déplacés d’ici. C’est peut-être la seule explication pour laquelle l’épidémie n’a pas fait des dizaines de milliers de morts, et peut-être que le danger est de former et de tuer des milliers de personnes en silence et sans attention, à la lumière de la préoccupation de chacun d’essayer d’échapper à l’enfer de la guerre.

Du ciel, nous sommes entourés de missiles et d’avions de lave, et du sol, nous sommes entourés de faim et de tas d’ordures qui poussent comme un organisme parasite qui propage l’épidémie et n’exclut personne, les conditions dans lesquelles vivent les déplacés sont inimaginables. Cette réalité ne peut être vécue par aucun être humain, ici, au milieu des concentrations de tentes de déplacés, il n’y a que des tentatives de survie, qui sont des tentatives impuissantes au milieu de tous ces dangers qui les entourent de toutes parts.

Comme si tous ces dangers ne suffisaient pas, de nouveaux risques se profilent à l’horizon et menacent la vie des personnes déplacées sans exception. Un danger qui s’est formé et a accru sa croissance comme un organisme parasite qui a pris la forme de tas d’ordures accumulées assiégeant les tentes des déplacés. À la lumière de ces conditions inhumaines et au milieu de la guerre de la faim, de la guerre d’extermination et de l’assassinat de l’homme uniquement pour son identité, au milieu des tentatives de survie et de la lutte entre la vie et la mort, un nouveau danger existe. Il menace tout le monde, il s’impose et ne peut être ignoré : des montagnes d’ordures qui grandissent et s’étendent entre les tentes des déplacés et autour d’eux comme d’immenses usines à épidémies et maladies qui ont commencé à se propager à une vitesse étonnante avec la présence d’un environnement favorable représentée par une forte densité de population et la destruction des infrastructures et des municipalités par l’occupation.

Cela a restreint le mouvement des nettoyeurs et a rendu difficile la collecte et l’élimination des déchets dans les endroits désignés à cet effet. Les tas d’ordures représentent un environnement idéal pour la fabrication de maladies et d’épidémies et la propagation de bactéries et de virus mortels, car les maladies ont commencé à se propager sous la forme d’épidémies telles que les maladies épidémiques du foie, les vers intestinaux, les maladies respiratoires et digestives, les infections cutanées et autres. Imaginez la puanteur qui se répand dans les lieux, imaginez les germes héréditaires et les patients qui souffrent. Il ne s’agit pas seulement d’un cauchemar nocturne, mais d’une réalité qui s’infiltre dans les tentes des personnes déplacées, menaçant la vie des personnes déplacées elles-mêmes et les tuant en silence. Si cette menace n’est pas efficacement combattue, elle pourrait se transformer en une catastrophe régionale incontrôlable qui menacerait tout le monde. »


 

 

Dans la soirée du 10 au 11 Avril, Marsel envoie le rapport du Centre pour les droits de l’homme « Al Mezan », qu’il a pris soin de traduire de l’arabe en anglais. Ce rapport concerne l’atteinte du système de santé par l’occupation dans la bande de Gaza et son impact sur les patient.e.s atteint.e.s d’insuffisance rénale. https://www.mezan.org/ar/post/46409

« Les forces d’occupation israéliennes poursuivent le génocide dans la bande de Gaza, et dans leurs attaques militaires ils détruisent délibérément les services et le personnel médical, les hôpitaux et les centres spécialisés qui prodiguent des soins de santé aux patients, entravent l’arrivée des dispositifs et équipements médicaux ainsi que du carburant nécessaire à leur fonctionnement, et mettent en danger la vie des malades et des blessés. Leurs souffrances sont doublées, à un moment où les moyens de subsistance de la population civile de la bande de Gaza sont détruits par des actes de bombardements, de destruction, de distorsion et de famine, et où les civils malades et blessés sont privés d’accès aux soins de santé. Les patients atteints d’insuffisance rénale dans la bande de Gaza sont confrontés à des conditions complexes et dangereuses, en raison de la destruction de 5 centres spécialisés dans la fourniture de services de dialyse sur 7, de la pénurie aiguë et continue de médicaments et de fournitures médicales, des obstacles persistants, des attaques contre des zones résidentielles, des déplacements forcés de résidents et des patients contraints à partir. L’article vise à présenter des faits sur la réalité des patients atteints d’insuffisance rénale à la lumière de la poursuite du génocide, des circonstances complexes et des dangers réels qui menacent la vie des patients. »

 

Une politique de ciblage des soins de santé

À l’hôpital Shuhada Al-Aqsa de Dair Al-Balah – Centre Al Mezan
Cibler le système de santé et son impact sur les patients souffrant d’insuffisance rénale dans la bande de Gaza : Les attaques militaires ont causé le martyre de 476 personnels médicaux et médecins spécialistes, et ont ciblé 155 établissements de santé, les ont détruits complètement et partiellement, 32 hôpitaux et 53 centres de santé ont été mis hors service et ont empêché l’approvisionnement en carburant des hôpitaux restants.

Le nombre de patients atteints d’insuffisance rénale avant l’agression contre la bande de Gaza était d’environ 1 100 patients, qui recevaient des séances de traitement et de dialyse dans 7 centres : le complexe médical Al-Shifa, le centre Noura Al-Kaabi au nord de Gaza, l’hôpital pour enfants Al-Rantisi. l’hôpital Al-Quds, l’hôpital des martyrs d’Al-Aqsa à Deir Al-Balah, le complexe médical Nasser à Khan Yunis et l’hôpital Abu Youssef Al-Najjar à Rafah.

Lors de leur assaut militaire contre la bande de Gaza, les forces d’occupation israéliennes ont détruit tous les centres spécialisés dans les services de dialyse, à l’exception des deux sections situées à l’hôpital Shuhada Al-Aqsa et à l’hôpital Abu Youssef Al-Najjar, ce qui menace la vie des patients et les prive de leur droit au traitement.

Le déplacement forcé de la population du nord de Gaza et de la ville de Gaza s’est accompagné de la destruction des centres médicaux et des départements du Collège industriel, y compris des équipements, ce qui a provoqué une perturbation majeure dans la répartition des patients et créé une forte pression sur les deux seuls de l’hôpital Shuhada Al-Aqsa et de l’hôpital Abu Youssef Al-Najjar, de sorte que les besoins réels en patients n’ont pas été satisfaits à leur niveau minimum.

Des sources médicales ont révélé que 18 patients sont morts dans la bande de Gaza en raison de leur incapacité à recevoir des soins et des séances de dialyse dans les centres et les hôpitaux, tandis que 10 d’entre eux sont morts à la suite d’attaques militaires.

La pénurie et le déficit persistants de médicaments, de fournitures médicales et de consommables, notamment de médicaments immunosuppresseurs, menacent la vie des patients, dont 500 patients qui avaient pu avoir une greffe.

Auparavant, les patients souffrant d’insuffisance rénale à l’hôpital Shuhada Al-Aqsa recevaient des services via 21 appareils de dialyse, dont deux appareils isolés dans des chambres et destinés aux patients atteints de foie C, et ils étaient soumis à 3 séances régulières par semaine à raison de 10- 12 heures, jusqu’à ce que les toxines et les liquides soient éliminés du corps du patient. Le nombre de patients atteints d’insuffisance rénale recevant des services à l’hôpital Shuhada Al-Aqsa est passé de 144 à 440 patients, auxquels 3 autres appareils de dialyse ont été ajoutés avec beaucoup de difficulté en raison de l’espace limité, dont un appareil pour enfants, et le service dispose de 24 appareils de dialyse, dont 4 appareils qui ont dépassé les heures de travail officielles de plus de 25 000 heures.

Mme Aisha Muhammad Hassan Matar, 68 ans, résidente du camp de Jabalia, qui souffre de tumeurs et d’insuffisance rénale, a rapporté ce qui suit : « Il y a trois ans, j’avais une insuffisance rénale, en plus d’une maladie tumorale, j’étais dialysée au centre Noura Al-Kaabi, au nord de Gaza, et je suivais des séances de traitement dans ce centre régulièrement 4 heures par jour. Mais suite à l’agression israélienne sur la bande de Gaza et à la destruction du centre Noura Al-Kaabi, j’ai été contraint de fuir le 22/11/2023, vers le sud de Ville de Gaza, et en raison de la situation financière difficile et de mon incapacité à payer le transport, j’ai délibérément cherché et trouvé un abri pour caravane près de l’hôpital Shuhada Al-Aqsa dans la ville de Dair A-Balah afin de pouvoir assister aux séances de traitement. La réalité de l’hôpital des martyrs d’Al-Aqsa est complètement différente et dure, car l’endroit est étroit et connaît une forte congestion de patients, et je ne reçois des soins que deux jours par semaine, deux heures par jour, ce qui n’est pas suffisant et me fait couler du sang. Ma souffrance ne dépend pas seulement de cela, le régime alimentaire n’est pas proportionné à mon état de santé, je vis, je dépends de la nourriture que nous recevons des institutions, et il n’y a pas de viande, de fruits, de légumes ou d’eau stérile, et cela a affecté mon état de santé, tous les aliments contiennent des conservateurs et le médecin m’a dit qu’ils ne convenaient pas aux patients souffrant d’insuffisance rénale due à la malnutrition. Le laboratoire m’a dit que je souffrais d’anémie. »

Concernant le service de dialyse de l’hôpital Abu Yousef Al-Najjar à Rafah, Ikram Mahmoud Taha Obeid, 57 ans, qui vit avec sa famille de 5 personnes dans la rue Saftawi, au nord de Gaza, a rapporté ce qui suit : « Je souffre d’insuffisance rénale depuis environ 8 ans et je recevais des séances de dialyse 3 à 4 fois par semaine, mais à cause de l’agression israélienne sur la bande de Gaza, le 20/11/2023 , j’ai dû fuir avec ma famille de ma zone de résidence au nord de Gaza vers le gouvernorat central, et je suis allé à l’hôpital Shuhada Al-Aqsa dans la ville de Deir Al-Balah afin de reprendre les séances de dialyse. J’ai été surpris par la présence d’un grand nombre de patients à l’intérieur du service et j’ai été confronté à de grandes souffrances en raison des séances de dialyse irrégulières ; réduction de la durée des séances, manque de médicaments, notamment d’injections d’héparine, et j’ai dû attendre des heures et des jours pour recevoir les séance de lavage, ce qui a provoqué une diminution du taux sanguin, et une augmentation du taux de toxines dans mon corps. Mon état de santé s’est détérioré et j’ai commencé à souffrir d’une faiblesse dans le travail du muscle cardiaque et je me suis retrouvé patient cardiaque pendant deux mois et demi. J’ai été contraint de fuir à nouveau vers le gouvernorat de Rafah, à l’extrême sud de la bande de Gaza, en raison des bombardements continus contre les communautés résidentielles du gouvernorat central. Je suis allé à l’hôpital Abu Youssef Al-Najjar pour des séances de dialyse, mais j’ai été surpris par le grand nombre de patients atteints d’insuffisance rénale qui se présentaient à l’hôpital et j’ai remarqué qu’il y avait une grande pression. Sur les machines du département du Collège Industriel, et afin d’avoir une séance de lavage, je me rends tôt le matin à l’hôpital Abu Youssef Al-Najjar pour prendre rendez-vous, et j’attends 48 heures jusqu’à l’heure du la séance de lessive arrive, et j’ai le droit de faire une séance de lessive pendant 2 heures sur 3 heures. Parfois je fais une séance par semaine, et parfois deux séances, et du coup ma souffrance a augmenté et doublé. Je souffre maintenant de l’apparition d’ulcères dans mon corps et d’infections qui apparaissent sur la peau, et je ressens une faiblesse constante de mon corps dans les mouvements, en raison de l’irrégularité des séances de dialyse. »

En conclusion : Les patients souffrant d’insuffisance rénale dans la bande de Gaza, y compris les patients nouvellement greffés, sont confrontés à des conditions de vie extrêmement dangereuses en raison du manque de capacités, de la pénurie de médicaments et de la réduction des heures de lavage. Le danger est doublé à la lumière des régimes alimentaires qui manquent d’aliments appropriés et adaptés à cette catégorie, et par conséquent, de nombreux patients perdent la vie, surtout après la destruction des installations et des centres médicaux spécialisés.

Les organisations palestiniennes de défense des droits de l’homme, le Centre Al Mezan, le Centre palestinien pour les droits de l’homme, Al-Haq, l’Organisation mondiale de la santé, les institutions internationales concernées par le droit à la santé et le ministère palestinien de la Santé appellent à la mise en place rapide d’un centre de dialyse proche des camps de personnes déplacées. Elles demandent que soit fourni à la bande de Gaza des dispositifs médicaux, des fournitures et des consommables pour assurer l’absorption du nombre de patients et assurer le service de dialyse conformément aux règles afin de protéger la vie des patients. Nous appelons les institutions humanitaires à fournir une aide alimentaire appropriée aux patients souffrant d’insuffisance rénale, comme des légumes, de la viande et de l’eau minérale, afin de contribuer à renforcer leur immunité et à rendre leur corps capable de résister aux opérations de lavage.

Nous exigeons que la communauté internationale s’acquitte de son devoir et intervienne d’urgence pour mettre fin à la politique de ciblage des soins de santé et à la politique de famine. Qu’elle impose un cessez-le-feu dans la bande de Gaza et assure le retrait des forces d’occupation et mette fin au siège imposé à la bande de Gaza conformément à la résolution 2728 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 25 mars et aux mesures de précaution imposées par la Cour internationale de Justice.

 

Plus tard dans la soirée, Marsel envoie des informations d’ attaques et bombardements :

« Des cercles de feu et de violents bombardements à proximité du pont Wadi, au nord du camp de Nuseirat, au centre de la bande de Gaza. Le camp d’Al-Nuseirat est toujours soumis à de violents bombardements et des fragments des raids israéliens ont atteint les salles de classe et la cour d’une des écoles pour personnes déplacées, un état de peur et de panique domine les familles, en particulier les enfants. La 162e Division militaire israélienne a lancé une opération surprise dans le centre de la bande de Gaza avec bombardements d’artillerie et raids intenses à la périphérie nord du camp de Nuseirat. »

À la fin de ces échanges par WhatsApp Marsel m’écrit : «  Si vous pouvez faire des miracles, nous en avons tellement besoin maintenant. »

Je réponds : «  je ne suis pas très forte en miracles, je peux seulement écrire leur histoire. »

Il m‘écrira : « Nous avons tous besoin d’un miracle. S’il n’y avait pas de miracles, l’espoir s’étiolerait.


 

Information du ministère de la Santé à Gaza, le 11 Avril 2024 :

63 martyrs et 45 blessés sont arrivés dans les hôpitaux au cours des dernières 24 heures suite à l’agression de l’occupation contre la bande de Gaza. Un certain nombre de victimes se trouvent toujours sous les décombres et sur les routes, et les ambulances et les équipes de la protection civile ne peuvent pas les atteindre.

Le bilan de l’agression s’élève à 33 545 martyrs et 76 094 blessés depuis le 7 octobre dernier.

Des morceaux de corps déchirés sont arrivés à l’hôpital baptiste après le bombardement du marché de Firas, dans le centre de la ville de Gaza. Martyrs et blessés lors du bombardement par l’avion d’occupation de la rue Salah al-Din, dans le quartier d’Al-Zaytoun, au sud-est de la ville de Gaza.

 

Information de l’Autorité palestinienne de l’énergie le 11 Avril 2024

68 % des réseaux de distribution d’énergie électrique s’étendant sur toute la bande de Gaza ont été endommagés, tandis que les pertes résultant des dommages causés aux réseaux de distribution, au siège, aux magasins et aux mécanismes de la Société de distribution d’électricité de Gaza sont estimées à environ 300 millions de dollars.

Il est actuellement difficile de quantifier les pertes matérielles résultant des dommages causés aux secteurs de production et de transport ainsi qu’au siège et aux installations de l’Autorité de l’énergie, qui pourraient dépasser 100 millions de dollars. Selon des estimations préliminaires, 90 % des systèmes d’énergie solaire déployés dans la bande de Gaza ont été endommagés à la suite des bombardements et de la destruction d’installations gouvernementales et des habitations des citoyens. L’ampleur des dégâts matériels dans ce secteur étant estimée à plus de 200 millions de dollars.

 

Retourner dans les ruines de chez soi

Les chaînes d’information n’ont cessé de dire que l’armée israélienne s’était retirée de Khan Younis.

Asma, dont le témoignage de la journée de déportation de sa famille vers Rafah le 18/12/23 avait été publié dans une chronique, m’a informée de la situation de Khan Younis actuellement. Elle et sa sœur sont retournés deux fois dans ce qu’il reste de leur appartement, mais comment vivre dans une zone où il n’y a plus d’accès à l’eau, plus d’électricité, plus d’accès à internet, au milieu des ruines où plus aucun voisin n’ose vivre ?

 

Abu Amir par WhatsApp le 12 Avril au soir

Compte tenu des attaques féroces de l’occupant sur toutes les zones de la bande de Gaza, qui se sont intensifiées les premier et deuxième jours de l’Aïd al-Fitr, les citoyens ont été contraints de fuir à nouveau la zone nord de Nuseirat vers Deir Al-Balah, Al-Mawasi, Khan Yunis et Rafah. L’occupant n’a pas permis à la population de la bande de Gaza de vivre en paix pendant ces jours bénis pour les musulmans. En effet, l’occupant a intensifié ses attaques brutales et barbares sur Gaza, malgré les demandes de la communauté internationale ou du Conseil de sécurité pour un cessez-le-feu et la fin du génocide.

 

Ce qui se passe aujourd’hui est absolument inacceptable, car l’occupation est allée trop loin dans sa brutalité et a montré son vrai visage. Combien de temps l’injustice infligée au peuple palestinien va-t-elle se poursuivre, combien de temps le génocide et la discrimination raciale vont-ils continuer ? D’autant plus que nous sommes au XXIe siècle et que le monde appelle à se libérer de l’injustice et de la discrimination, mais qu’il semble que les Palestiniens ne soient pas inclus dans ce monde et qu’ils soient en dehors du cadre de l’humanité. Que lui est-il arrivé, à ce monde qui reste impuissant face à cette occupation brutale ? Les Palestiniens ne croient plus aux slogans que le monde appelle de ses vœux concernant les droits de l’homme. Ce ne sont que de faux slogans auxquels nous ne croyons plus.

 

Retour sur le travail humanitaire effectué par les équipes de l’UJFP à Gaza.

Malgré la catastrophe humanitaire qui s’aggrave jour après jour dans la bande de Gaza en raison de la guerre menée par l’occupant depuis le 7 octobre sur la bande de Gaza, qui a laissé une crise et une grave pénurie d’eau, de nourriture, de vêtements, de pétrole, d’énergie et de tout ce qui est nécessaire à la vie dans la bande de Gaza, les équipes de l’UJFP Gaza continuent leur travail humanitaire au service des personnes déplacées. Nous avons fourni des repas pendant trois jours cette semaine aux personnes déplacées dans le camp, et nous avons également fourni de la nourriture pour le camp pour le reste de la semaine à partir d’autres sources. Nous avons également pu établir une salle de prière grâce à nos propres efforts au centre du camp, afin que les personnes déplacées puissent effectuer des rituels religieux dans le camp.
Nous avons également fait venir une équipe de divertissement dans le camp pour aider à effacer les effets psychologiques que la guerre a laissés sur les enfants et les femmes du camp. Nous avons vu à quel point ils étaient heureux pendant le moment de divertissement.

Les femmes ont demandé à l’équipe d’organiser des séances de soutien psychologique et récréatif à leur intention, et nous travaillons actuellement à l’élaboration d’un programme à cet effet.


 

Continuité et Aggravation des bombardements sur toute la bande de Gaza et préparatifs de l’opération terrestre à Rafah ?

Au soir du 15 Avril, Marsel nous envoie cette information de la chaîne hébraïque Kan :
Avant d’entrer à Rafah : Au cours des deux prochaines semaines, Israël installera 10 000 tentes d’asile à l’extérieur de Rafah en prévision de son entrée dans la ville – des dizaines de milliers de tentes sont encore en cours d’achat, ce qui indique que la voie à suivre pour évacuer les habitants de la ville est en cours.

Au matin du 16 Avril,une information donnée par la radio de l’armée d’occupation :
Dans le cadre des préparatifs israéliens pour une action militaire à Rafah, les Émirats arabes unis se préparent à établir 5 grands complexes d’abris humanitaires dans la bande de Gaza dans le but d’y transporter les déplacés de Rafah.

 

Marsel envoie ces informations le matin du 16 Avril : le 193e jour de la guerre contre Gaza

Attaques, tirs, bombardements, violations de territoires partout dans la bande de Gaza :

« Événements de ce matin, : 4 martyrs et plusieurs blessés suite au bombardement d’occupation d’une maison dans le quartier de Tal Al-Sultan, à l’ouest de Rafah.
Martyrs et blessés suite à l’attaque par l’avion d’occupation de la mosquée des martyrs de Fakhoura dans le camp de Jabalia.
Les forces d’occupation assiègent les écoles abritant des personnes déplacées à Beit Hanoun, dans le nord de la bande de Gaza.
Les avions et l’artillerie de l’occupation bombardent le nord de Nuseirat, ce qui coïncide avec de violents affrontements entre la résistance et l’occupation.
Les avions d’occupation lancent un raid sur Deir al-Balah et bombardent des terres agricoles à Rafah.
Les véhicules d’occupation tirent intensément à l’est de la ville de Khan Yunis. »

Abu Amir confirme le 16 Avril l’aggravation des bombardements et destructions :

« Oui, la situation empire de jour en jour. Depuis plusieurs jours, l’occupation continue de détruire le nord de Nuseirat. Il appelle les habitants à évacuer la zone, puis il largue des bombes depuis des avions pour détruire complètement la zone nord de Nuseirat. »


 

En fin de journée du 16 Avril, Marsel envoie ces nouvelles informations sur le nord de Gaza :

« Un résumé de ce qui se passe à Beit Hanoun et à Jabalia Est : nous confirmons que l’occupation israélienne mène depuis hier une opération militaire à Beit Hanoun et à Jabalia Est. – Des véhicules militaires ont avancé vers les abris de Beit Hanoun. L’école de Mahdia Al-Shawa est assiégée depuis hier soir, lorsque des centaines de personnes déplacées ont été localisées – et un centre d’enquête de terrain a été établi derrière l’école et il a été demandé aux femmes d’enlever le voile – et toutes les familles de Beit Hanoun ont été contraintes de fuir avec l’arrestation d’un certain nombre de jeunes hommes. Cette zone a été la cible de violents bombardements d’artillerie, d’avions de combat et de tirs nourris – jusqu’à présent, des véhicules militaires se trouvent près de la zone d’Abou Safiya, à l’est de Jabalia et de Beit Hanoun. »

Ces informations sont confirmées ensuite par Abu Amir :

« Un nouveau crime contre notre peuple dans lequel l’occupation cherche à vider la ville de Beit Hanoun et la région orientale de Jabalia, au nord de Gaza. Hier soir, l’armée d’occupation a mené une opération militaire et ses bulldozers et ses chars ont avancé vers les centres d’hébergement de Beit Hanoun. L’école Mahdiya al-Shawa, où se trouvent des centaines de personnes déplacées, a été assiégée. L’armée d’occupation a également établi un centre d’enquête sur le terrain derrière l’école et a demandé à tout le monde de partir sous la menace des armes. Les femmes ont été forcées d’enlever leur hijab. Les hommes ont été dépouillés de leurs vêtements de dessus. Toutes les familles de Beit Hanoun ont été contraintes de partir et plusieurs jeunes hommes ont été arrêtés. Ce nouveau crime a eu lieu sous le couvert de violents bombardements d’artillerie, de bombardements d’avions de guerre et de tirs nourris. Des véhicules militaires sont toujours présents à l’heure actuelle près de la zone d’Abou Safiya, à l’est de Jabalia et de Beit Hanoun.

L’occupation n’était pas satisfaite des centaines de massacres qu’elle a commis dans ces zones, détruisant complètement les maisons de ses citoyens et obligeant ses habitants à les fuir pendant de nombreux mois. Et aujourd’hui, il répète le scénario du déplacement forcé de ses habitants par la force des armes… après leur retour au cours des dernières semaines et leur travail pour redonner de la vie à ce qui en restait.

Parlant des crimes de l’occupation, cet après-midi, l’avion d’occupation a bombardé le camp d’Al-Maghazi, tuant 10 enfants et en blessant plusieurs. Le scénario de destruction, de bombardement de maisons et de déplacements se poursuit dans le camp de Nuseirat, alors que l’occupation concentre ses attaques sur le nord de Nuseirat. Depuis plus d’une semaine, l’occupation a brutalement détruit en masse des maisons et des hélicoptères ont été largement déployés dans la région de Nuseirat, tirant continuellement sur les citoyens, blessant des dizaines de citoyens dans la région. Les habitants de la région de Nuseirat ne se sentent plus en sécurité dans leurs maisons et, en une semaine, nous constatons que la plupart des habitants du nord de Nuseirat ont de nouveau été déplacés de leurs maisons vers le sud.

Parlant de la région de Khan Yunis, d’où l’occupation s’est retirée après avoir détruit la plupart de ses bâtiments, les habitants ont lancé de nombreux appels demandant à la Défense civile d’évacuer les corps de leurs proches, estimés à des centaines, sous les décombres de leurs maisons. De plus, les équipes de protection civile ne sont toujours pas en mesure de mener à bien leur travail en raison du manque de capacités pour le faire. Pendant des années, l’occupation a refusé d’apporter du matériel aux équipes de la protection civile, ce qui les rend incapables d’effectuer leur travail, que je considère comme l’une des choses nécessaires à apporter.

Avant-hier, je suis entré dans la ville de Khan Yunis, en provenance de Rafah pour retourner à Nuseirat, échappant aux embouteillages sur la route côtière. J’ai décidé d’emprunter la route Salah al-Din, qui traverse le centre de la ville de Khan Yunis. Quelle horreur j’ai vue. Les bâtiments étaient en morceaux. Il n’y avait ni infrastructure ni rues. Les destructions ont été massives, à un taux de 70 %, selon ce que j’ai vu. De par mon travail dans la région sud, je connais bien la ville de Khan Yunis, mais je jure que je ne reconnaissais pas les rues et que je ne savais comment sortir de la ville qu’avec difficulté. C’est ce que fait l’occupation lorsqu’elle pénètre dans une zone de la bande de Gaza et fait des ravages sur le territoire. »

mise à jour le 16 avril 2024.

(…)

À propos des témoignages

Juste avant l’attaque du Hamas en territoire israélien le 7 octobre 2023, une mission d’information devait se rendre à Gaza, depuis la France, pour informer de l’action de la société civile gazaouie, sur le terrain. Des relais essentiels en étaient Abu Amir Mutasem Eleïwa. Personnalité indépendante, très respecté dans la bande Gaza, il est l’animateur des Projets paysans. Il est aussi l’interlocuteur privilégié de l’Union Juive Française pour la Paix, qui soutient ce programme.

Ces Projets paysans (château d’eau, coopérative de production, autoproduction de semences, solidarité quotidienne — dont l’ouverture d’une crèche) visent à consolider l’autonomie du territoire et contrecarrer le désir de le fuir. Autre interlocuteur de choix : Marsel Alledawi, responsable du Centre Ibn Sina pour l’enfance, vouée au suivi éducatif et psychologique. C’est l’une des rares structures strictement laïques du territoire.

La mission d’information n’ayant pu pénétrer à Gaza, c’est ensuite par conversations téléphoniques, messageries Messenger et WhatsApp que ces acteurs gazaouis ont entretenu un lien quotidien avec leurs interlocuteurs français. Dont le Marseillais Pierre Stamboul, vice-président de l’Union juive française pour la paix (UJFP), Sarah Katz (International Solidarity Movement), et Brigitte Challande, militante montpelliéraine de la solidarité avec les Palestiniens.

Ci-dessous, ils rendent publique la matière de ces récits reçus quotidiennement depuis Gaza. Cela dans l’espoir de valoriser les ressources de solidarité, les capacités d’adaptation dans les pires situations, dont est capable de faire montre la société civile gazaouie ; tout ne se résumant pas au seul Hamas.

Pour une meilleure compréhension de ce suivi, il faut savoir qu’Abu Amir Mutasem Eleïwa (coordinateur des Projets paysans) s’était déplacé au Caire, à la rencontre de la mission française. Il s’y est alors trouvé bloqué jusqu’à son retour dans la Bande de Gaza à la faveur de la seule trêve humanitaire survenue à ce jour. Enfin, par souci de fluidité, les deux interlocuteurs gazaouis cités ci-dessous le sont le plus souvent sous leurs seuls prénoms (Abu Amir et Marsel). Le mode de retranscription de leurs récits alterne la reprise in extenso de textes et propos de ces deux personnes (alors entre guillemets et en italique), ou bien des synthèses reformulées en seconde main (par exemple en cas de retranscription après coup du contenu de conversations téléphoniques).

 


 

Depuis le 20 novembre altermidi publie les témoignages quasi quotidien du peuple Gazaouis, tels qu’ils nous arrivent directement du terrain.

Partie 1 du 20 novembre 2023 au 4 janvier 2024. À lire ICI.

Partie 2 du 8 au 17 janvier 2024. À lire ICI.

Partie 3 du 18 au 27 janvier 2024. À lire ICI

Partie 4 du 28 janvier au 13 février 2024. À lire ICI

Partie 5 du 13 au 20 février ICI

Partie du 21 février au 4 mars ICI

Partie du 5 mars au 14 mars ICI

Partie du 15 mars au 30 mars ICI


Notes:

  1. Al Jazeera est une chaîne de télévision satellitaire d’information en continu en langue arabe basée à Doha au Qatar. Elle est détenue par Al Jazeera Media Network, un groupe formellement privé mais étroitement lié à l’État du Qatar.
  2. Repas du soir pendant le jeûne du ramadan, quand le soleil est couché.
  3. Aïd al-Fitr est la fête musulmane marquant la rupture du jeûne du mois de ramadan. Elle est célébrée le premier jour du mois de chawwal (dixième mois du calendrier musulman).
Brigitte Challende
Brigitte Challande est au départ infirmière de secteur psychiatrique, puis psychologue clinicienne et enfin administratrice culturelle, mais surtout activiste ; tout un parcours professionnel où elle n’a cessé de s’insérer dans les fissures et les failles de l’institution pour la malmener et tenter de la transformer. Longtemps à l’hôpital de la Colombière où elle a créé l’association «  Les Murs d’ Aurelle» lieu de pratiques artistiques où plus de 200 artistes sont intervenus pendant plus de 20 ans. Puis dans des missions politiques en Cisjordanie et à Gaza en Palestine. Parallèlement elle a mis en acte sa réflexion dans des pratiques et l’écriture d’ouvrages collectifs. Plusieurs Actes de colloque questionnant l’art et la folie ( Art à bord / Personne Autre/ Autre Abord / Personne d’Art et les Rencontres de l’Expérience Sensible aux éditions du Champ Social) «  Gens de Gaza » aux éditions Riveneuve. Sa rencontre avec la presse indépendante lui a permis d’écrire pour le Poing et maintenant pour Altermidi.