En réponse aux sollicitations pressantes des collectivités locales, le 29 mai 2020 le gouvernement a présenté un plan de soutien de 4,5 milliards d’euros pour faire face aux incidences de la crise sanitaire sur les finances des collectivités. L’annonce de ce plan est soumis à la contestation des collectivités, notamment des régions qui le considèrent non adapté aux réalités du terrain.


 

Annoncées au lendemain des travaux du président de la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale, les mesures d’urgence en faveur des collectivités territoriales visent à compenser les pertes financières que celles-ci ont subi suite à l’épidémie liée au COVID-19.

La crise sanitaire a des conséquences lourdes pour le budget des collectivités territoriales françaises. Le Premier ministre a missionné Jean-René Cazeneuve, président de la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale, pour évaluer l’impact de la crise sur les finances locales et élaborer des recommandations.

Les premiers travaux rendus se fondent sur une estimation du manque à gagner pour l’année 2020. Ils mettent en évidence les difficultés financières au-devant desquelles iraient les communes et leurs groupements, ainsi que les conseils départementaux. Sur la base de ces analyses, le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre un premier ensemble de mesures d’urgence dès la prochaine loi de finances rectificative.

Selon les estimations des premiers travaux engagés, les recettes des collectivités territoriales pourraient diminuer de 7,5 milliards d’euros en 2020. Un montant que les collectivités considèrent largement sous-estimé et qui ne prend que très partiellement en compte  le nécessaire investissement1  dans la relance économique qui doit être entrepris à l’échelle des territoires.

Le gouvernement qui sent monter la fronde dans le contexte électoral, a annoncé que ces estimations seront réévaluées, mais pour l’heure il campe sur la base de cette première estimation selon laquelle les pertes s’élèveraient, pour le bloc communal à 3,2 milliards d’euros, pour les départements à 3,4 milliards d’euros et pour les régions à 0,9 milliards d’euros.

 

Avance remboursable pour les départements et oubli des Régions

Face à cette situation, le gouvernement entend mobiliser un soutien financier de 4,5 milliards d’euros afin de compenser une partie des pertes financières des collectivités. Ces mesures concernent pour le moment les collectivités du bloc communal, les départements et les collectivités d’outre-mer.

Pour les collectivités du bloc communal, une clause de sauvegarde de leurs recettes fiscales et domaniales sera mise en place en 2020, calculée selon les recettes moyennes des trois derniers exercices (2017-2019). Ce mécanisme d’un coût total estimé à 750 millions d’euros toucherait entre 12 000 à 13 500 collectivités du bloc communal. Beaucoup de communes touristiques et d’outre-mer seraient concernées.

Les départements pourront, quant à eux, formuler une demande pour bénéficier d’une avance sur leurs droits de mutation à titre onéreux (taxe versée à chaque transaction immobilière) qui ont fortement baissé en 2020. L’enveloppe prévue les concernant s’élève à 2,7 milliards d’euros mais cela reste une avance remboursable.

En charge du développement économique et à ce titre apparaissant comme des acteurs incontournables de la relance, les Régions demeurent les grandes oubliées du dispositif. Le 28 mai, à la veille de l’annonce du plan gouvernementale, estimant que la crise sanitaire a démontré l’agilité des collectivités locales, un collectif d’exécutifs régionaux composé de 19 présidents de Région exhortait pourtant, dans une tribune au « Monde »2, le président de la République à faire « le pari des territoires ».

C’est le 29 mai dernier, alors que Les présidentes et présidents de Région étaient en visioconférence avec Bruno Le Maire pour discuter de la coordination de leurs actions sur le plan de relance économique, que sont tombées comme une douche froide les annonces du gouvernement qui exclut les Régions des mesures adoptées.

Les Régions ont  vécu cette « réponse » comme une provocation et ont immédiatement décidé de quitter la réunion « avec le sentiment de l’humiliation et du temps perdu ».

« Le gouvernement a-t-il mesuré les conséquences économiques et sociales de son attitude ? interroge l’association Régions de France. Dans la foulée, les présidents de Région ont appelé le Premier ministre à clarifier très rapidement la position du gouvernement, sans obtenir de réponses bien concrètes.  « Les travaux se poursuivent pour évaluer les conséquences et les décisions à prendre pour faire face aux conséquences financières de la crise pour les régions », lit-on dans le dossier de presse de présentation du plan d’urgence.

Les mesures d’urgence en faveur des collectivités territoriales seront intégrées au troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020 qui sera présenté en Conseil des ministres mercredi 10 juin.

« Il y a deux manières de considérer les Régions. Soit comme des partenaires de l’action publique responsables pour reconstruire et développer notre pays, c’est le sens de notre action. Soit comme des entités négligeables dont on peut se passer, et l’État retombera dans ses travers de centralisme inefficace », considère Régions de France. La balle est désormais dans le camps du gouvernement.

Jean-Marie Dinh

 

Photo Renaud Muselier Président du conseil régional de PACA en vidéoconférence avec Bruno Le Maire

 

Notes:

  1. Un milliard d’euros va être ajouté à la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) portant son enveloppe de 0,6 à 1,6 milliards d’euros. Elle vise à soutenir les objectifs de relance, notamment sur les questions de transition énergétique et de santé.
  2. – Le Monde : Appel de 19 présidents de régions et collectivités territoriales : « Pour la relance et la reconstruction, nous sommes prêts ! » https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/05/28/appel-de-19-presidents-de-regions-et-collectivites-territoriales-pour-la-relance-et-la-reconstruction-nous-sommes-prets_6041048_3232.html
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Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.