Des atouts pour Nîmes

Par Jean-Claude Woillet*

Il n’est pas nécessaire de se présenter aux prochaines élections municipales pour avoir des idées sur la situation et l’avenir de Nîmes. Être citoyen suffi. Il n’est pas non plus indispensable d’attendre d’être invité par les partis pour s’exprimer. Si la démocratie élective est indispensable à l’affirmation des valeurs de la République, elle n’est pas la seule. La démocratie citoyenne en est l’autre face, indispensable à l’existence d’une vie politique forte où chacun se sent comptable des affaires de la cité.

En tant que citoyen nîmois, je souhaite donc exprimer, librement et modestement, mais avec conviction, sans être pour autant candidat à l’élection municipale, ce qui me paraît pouvoir être utile aux affaires de la cité. Les propositions que je formule répondent au souci de lier étroitement : démocratie citoyenne, développement économique, développement social, développement culturel et ouverture au monde, ce qui n’est pas si courant mais qui se révèle possible dès lors qu’on est attentif aux atouts dont dispose en propre Nîmes. Mes propositions s’articulent autour de 5 thèmes qui devraient, à mes yeux, être des thèmes d’avenir pour la ville. Il n’y a pas de droits d’auteur ! Elles sont, au contraire, à la disposition de tous ceux qui peuvent participer à leur mise en œuvre, c’est-à-dire les citoyens nîmois et notamment les futurs élus.

 

Un pouvoir associatif à Nimes

La France compte 1,3 millions d’associations, 23 millions d’adhérents et 16 millions de bénévoles animateurs. Les 165 000 employeurs associatifs gèrent 1,8 millions de salariés. Le budget cumulé des associations est de l’ordre de 70 milliards d’euros, soit 3,5 % du PIB, plus que le secteur de l’hôtellerie restauration et à égalité avec l’agriculture et l’industrie agroalimentaire. Tous ces chiffres sont issus du document « Connaissance des associations », publié en décembre 2010 par le C. N. I. S. Il démontre, s’il en était besoin, le poids du secteur associatif en France. Il l’est aussi ailleurs dans le monde où la vitalité de la vie associative est un important critère de développement.

Face à cette incontournable réalité, un décret du 25 février 1983 à crée le Conseil National de la Vie Associative (C. N. V. A) et le décret du 28 juin 2011 l’a remplacé par le Haut Conseil à la Vie Associative (H. C. V. A), toujours rattaché au premier ministre. C’est dire l’intérêt direct du monde politique pour la vie associative.

Le monde associatif ne se résume évidemment pas à la seule dimension économique et sociale, même si elle est importante, il est aussi le garant d’une démocratie soucieuse des droits de l’homme. La loi de 1901, fondatrice des associations, témoigne des luttes qui avaient été engagées pour ce droit, qui est repris à l’article 20 de la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, sous l’égide de l’ONU.

 

C’est aux associations elles-mêmes à prendre en main leurs affaires

Où en sommes-nous à Nîmes dans ce domaine ? La ville a enregistré plus de 2 000 associations et un guichet unique mis en place au sein de la Direction de la Vie Associative et des Quartiers (D. I. V. A. Q.), ayant succédé au Centre de Promotion de la Vie Associative et des Quartiers (C. E. P. R. O. V. A Q). La ville reconnaît sur son site : «… Les associations, qui constituent un élément fédérateur et dynamique de l’organisation de la cité, réalisent un superbe travail au quotidien et tout au long de l’année ». Les associations sont donc nombreuses et présentes dans beaucoup de secteurs, mais leur simple enregistrement et leur reconnaissance ne suffisent pas. Leurs caractéristiques, leur place et leur poids restent en suspens.

Quel est leur poids et leur place dans la cité ? Combien d’emplois, par exemple ? Quels sont leurs domaines de prédilection ? Quel est le bilan ? Quels sont les évolutions ? Quels sont les moyens ? À toutes ces questions il n’y a pas actuellement de réponse à Nîmes, faute d’une véritable politique de promotion de la vie associative. Les enregistrer ne signifie pas les connaître et moins encore les prendre collectivement en compte dans la vie de la ville. Si l’on souhaite avancer dans ce domaine, c’est aux associations elles-mêmes à prendre en main leurs affaires ; personne d’autre ne le fera. Il y a eu un Conseil National de la Vie Associative. Pourquoi pas un Conseil Local de la Vie Associative (C.L.V.A.) ?

Alors que faire ? Il y à Nîmes 12 grande familles associatives de base, comme ailleurs, ainsi que l’indique par exemple une classification internationale reconnue : culture, sports, éducation – formation – recherche, santé, action sociale, nature – environnement – cadre de vie, économie et emploi, expression et défense des droits, activités internationales, activités religieuses spirituelles et philosophiques, organisations professionnelles, information – communication. Des sous-groupes existent évidemment à l’intérieur de ces familles.Si chaque grande famille, dans la cité, décide d’être représentée par un ou deux délégués, à tour de rôle, le Conseil Local de la Vie Associative peut être constitué. Cela peut être fait par étapes.
Le statut du C.L.V.A. pourrait être celui d’une association reconnue d’utilité publique.

Le rôle du conseil s’articulerait alors autour de six thèmes d’action :
– Étudier les associations, leur poids, leur rôle, leur place, et suivre l’ensemble des questions intéressant la vie associative de la cité.
– Émettre un avis sur les projets et y participer, notamment sous forme de délégation de service public (D. S. P.).
– Proposer des mesures utiles au développement de la cité et de la vie associative (par exemple la création d’un réseau associatif).
– Établir tous les deux ans un bilan de la vie associative nîmoise et de son évolution.
– Constituer des groupes de travail.

Un Conseil Local de la Vie Associative devrait pouvoir s’imposer comme un interlocuteur collectif indispensable et affirmer l’existence d’un véritable pouvoir associatif. Là aussi l’union fait la force. La tâche n’est pas simple et peut demander un peu de temps mais le jeu n’en vaut-il pas la chandelle ? Aux associations de décider et d’agir. Les industriels, les commerçants, les artisans, les agriculteurs son collectivement représentés. Pourquoi pas les associations ? Des responsables associatifs nîmois ont déjà manifesté leur intérêt pour la création d’un conseil local de la vie associative nîmoise. Des initiatives sont en cours. Qui en profiterait ? Tous les Nîmois et bien sûr la démocratie citoyenne.

 

Nîmes : La ville des coopératives

 

Le 27 juillet 1885, rue de Rivoli à Paris, 85 coopératives se réunissent pour la première fois en France. C’est le premier congrès national des coopératives organisé à l’initiative d’Auguste Fabre et d’Edouard de Boyve, deux Nîmois engagés dans une réflexion sur la société et l’exploitation des travailleurs et créateurs de coopératives. La même année, toujours en 1885, Édouard de Boyve participe à Plymouth, en Angleterre, au congrès des coopératives de 17 pays. Il y propose la création d’une fédération internationale des coopératives.

Sa proposition est approuvée par acclamation et l’année suivante, en 1886, est crée une fédération qui deviendra l’Alliance Coopérative Internationale regroupant, aujourd’hui, 100 pays, 230 fédérations nationales, 760 millions de membres. En 1886, l’économiste Charles Gide rejoint le mouvement coopératif initié par les Nîmois, dont il deviendra l’un des principaux représentants en France et dans le monde. Né à Uzès, souvent présent à Nîmes, où il est enterré, il est à l’origine de ce qui est devenu « l’école de Nîmes ». Nîmes est en effet la seule ville de France ayant donné son nom à un courant de pensée économique : la pensée coopérative. L’école de Nîmes est connue des coopérateurs dans le monde entier.

L’histoire coopérative est donc redevable à trois personnalités nîmoises mais au-delà du passé, le présent est aujourd’hui profondément marqué par la réalité des coopératives. Dans le monde, 100 millions d’emplois lui sont redevables. En France 21 000 coopératives, 24 millions de membres, 1 million d’emplois, plus de 100 milliards d’Euros de chiffre d’affaire témoignent de l’importance de la réalité coopérative dans de nombreux secteurs dont l’agriculture, les banques, les assurances, l’artisanat, le commerce etc. Quant à l’avenir, il suffit de constater l’intérêt des travailleurs et notamment des jeunes pour la formule coopérative; De nouvelles formules coopératives sont d’ailleurs apparues, telles que le la Société Coopérative d’Intérêt Collectif – SCIC -, la Coopérative d’Activités et d’Emploi – CAE.

Nîmes et le Gard comptent de nombreuses coopératives. Il est temps de s’appuyer sur le passé coopératif de Nîmes pour en faire un atout. La ville peut-être ce que Charles Gide souhaitait : «… La Rome du mouvement coopératif en France ». Ajoutons que son rayonnement serait international puisque Charles Gide, en1927, avait déjà organisé un congrès international des coopératives à Nîmes ; 60 délégations étrangères étaient présentes.

Qu’attend-on pour faire de Nîmes une capitale coopérative à la pointe des réflexions et des initiatives dans ce domaine, en étroite collaboration avec les organisations existantes.? Nîmes est la seule à pouvoir disposer d’un tel atout, qui associe démocratie coopérative, développement économique et social, développement international. Et qu’attend-on pour : inscrire l’histoire coopérative dans l’histoire de la ville, en informant les habitants et en particulier les jeunes, reconnaître le rôle essentiel joué par trois Nîmois et dédier par exemple au moins une rue à Auguste Fabre? Il n’est pas trop tard car comme l’affirmait Charles Gide. « La véritable marque de vitalité, ce n’est pas de durer, c’est de renaître ».

Cette renaissance a déjà commencé puisque dans la foulée des manifestations organisées à Nîmes autour de l’Année Internationale des Coopératives en 2012, sous l’égide des Nations unies, des citoyens nîmois ont créé ANEPROCOOP – l’Association Nîmoise d’Etude et de Promotion des Coopératives. Parmi les objectifs de l’association figure la création de la Journée Nîmoise des Coopératives – J. N. C. – le 24 octobre de chaque année, par ailleurs journée mondiale des Nations unies. Aux Nîmois de s’approprier la Journée Nîmoise des Coopératives et de revendiquer sa place dans le monde coopératif.

 

* Jean-Claude Woillet, est le président de l’association Promolive – qui regroupe une trentaine de particuliers et petits producteurs 

 

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