La motion de rejet de l’examen de la loi immigration présentée par les écologistes de la NUPES a été adoptée à 270 voix pour et 265 contre. Les débats à l’Assemblée nationale sont interrompus. Le gouvernement convoque une commission mixte paritaire.


 

Le brillant discours humaniste du député écologiste Génération.s, Benjamin Lucas, qui a défendu la motion de rejet en rappelant les valeurs fondamentales de la République des droits de l’Homme, ne pouvait que convaincre à gauche.

La droite et l’extrême droite ont décidé de soutenir la motion de rejet, mais pas pour les mêmes raisons. En effet, la loi immigration telle qu’elle a atterri à l’Assemblée n’est pas, selon LR et le RN, assez dure envers les réfugiés. « Monsieur le ministre, votre texte est invotable pour les députés RN, car il va à l’encontre des attentes des Français qui sont 65 % à vouloir supprimer le droit du sol », a déclaré la députée RN Edwige Diaz.

Pour contrer le passage en force d’un texte jugé trop laxiste, Les Républicains ont mis à exécution leur menace de vote d’une motion de rejet formulée lors des concertations avec l’exécutif sur les points les plus liberticides du texte qui ont fortement divisés la majorité : « Votre gouvernement a laissé piétiner en commission des lois le texte de fermeté issu du Sénat, a-t-il déclaré. Le débat doit se poursuivre mais sur la base du texte adopté au Sénat ».

 

Que va-t-il se passer ensuite ?

 

– Le gouvernement peut décider de renvoyer le texte au Sénat : la version adoptée par les sénateurs le 14 novembre dernier serait à nouveau débattue.

– L’exécutif peut également convoquer une commission mixte paritaire (CMP) 1 composée de sept sénateurs et de sept députés qui tenteront une nouvelle écriture du texte toujours à partir de la version sénatoriale.

Dans les deux cas, le trajet parlementaire reprendrait son cours pour une deuxième lecture du projet de loi.

– Troisième option : l’exécutif retire le texte.

Ce choix, peu probable, satisferait la gauche, les ONG et les associations de soutien aux réfugiés qui dénoncent une atteinte inédite au droit des étrangers. En l’attente de la décision de l’exécutif, elles disent apprécier une trêve dans un débat xénophobe qui génère dans le pays un climat délétère « anti-étranger » qui doit cesser.

L’Élysée annonce qu’Emmanuel Macron a refusé la proposition de démission de Gérald Darmanin qui va s’atteler à trouver une suite pour le texte…

Le gouvernement a tranché : les membres de la commission mixte paritaire (CMP), désignés par les présidents du Sénat et de l’Assemblée, réexamineront la version sénatoriale votée le 14 novembre et tenteront de se mettre d’accord sur un texte final qui sera ensuite soumis au vote des deux assemblées. Cette commission sera formée, côté Sénat, de trois LR et un allié de l’Union centriste, un RDPI (majorité) et deux socialistes. Côté Assemblée nationale, siégeront quatre députés de la majorité, un Les Républicains, un Rassemblement national et un La France insoumise.

 

Vers de nouvelles concertations entre la droite et l’exécutif

 

Avec la présentation d’une mouture revisitée de la version sénatoriale à l’Assemblée nationale, le gouvernement prend le risque d’un nouveau rejet du projet de loi par les députés. S’il tente de faire passer le texte en force par le 49.3, il s’expose à une motion de censure… La droite revient en force et le gouvernement qui ne peut se passer de ses voix va être obligé de faire des concessions. « La recherche d’un accord reste notre méthode », a déclaré Elisabeth Borne à Éric Ciotti, président des Républicains, qui réitère que ses parlementaires « défendront tout le texte du Sénat, rien que le texte du Sénat ».

« Si la conciliation échoue, le projet de loi revient dans la dernière version votée – celle du Sénat –, à l’Assemblée nationale, qui a le dernier mot. », indique Public Sénat… À moins que le gouvernement décide de le retirer.

Le projet de loi immigration — le sort des réfugiés — sera entre les mains de la commission mixte paritaire qui se tiendra à huit clos lundi 18 décembre. Le vote du texte, qui pourrait en sortir plus musclé, est prévu dans la foulée le mardi suivant au Parlement si un accord émerge.

Mise à jour du 13/12/2023

 

 

Notes:

  1. Conformément à la Constitution, la commission mixte paritaire (CMP) est réunie à l’initiative du Premier ministre. Ses membres sont nommés par le président du Sénat et par le président de l’Assemblée nationale.
Sasha Verlei journaliste
Journaliste, Sasha Verlei a de ce métier une vision à la Camus, « un engagement marqué par une passion pour la liberté et la justice ». D’une famille majoritairement composée de femmes libres, engagées et tolérantes, d’un grand-père de gauche, résistant, appelé dès 1944 à contribuer au gouvernement transitoire, également influencée par le parcours atypique de son père, elle a été imprégnée de ces valeurs depuis sa plus tendre enfance. Sa plume se lève, témoin et exutoire d’un vécu, certes, mais surtout, elle est l’outil de son combat pour dénoncer les injustices au sein de notre société sans jamais perdre de vue que le respect de la vie et de l’humain sont l’essentiel.