Le 4 juin, la réplique de la célèbre grotte préhistorique, installée à la Villa Méditerranée, ouvre au public. Une nécessité pour en conserver la trace car l’inéluctable montée du niveau de la mer la condamne à disparaître sous l’eau. Et une prouesse technologique puisqu’il a fallu faire appel à des procédés originaux.


 

La restitution de la grotte Cosquer est née de deux constats. D’une part le besoin de sauver, fût-ce artificiellement, un site préhistorique majeur quasi inaccessible par sa situation à 37 mètres sous l’eau et menacé à terme d’être englouti par la mer. D’autre part redonner une fonction à la Villa Méditerranée, superbe structure architecturale appartenant à la Région Sud-Provence-Alpes-Côte d’Azur, restée une coquille vide, sans projet défini. En 2016, le Conseil régional décide d’en faire le lieu qui accueillera la réplique de la grotte et choisit pour réaliser ce chantier le groupe Kléber Rossillon. 

Ce gestionnaire de lieux culturels et touristiques, qui a remporté l’appel d’offres et la délégation de service public jusqu’en 2045, a une certaine expérience dans ce domaine, notamment la grotte Chauvet 2 dont il a déjà réalisé la réplique. Mais cette nouvelle entreprise représente de nombreux défis, comme l’impossibilité de se rendre dans la grotte pour étudier sur place les peintures et les gravures qui a obligé les équipes à se servir uniquement des modélisations en 3D1. En s’appuyant sur les photogrammétries de 344 lasers scans et les images en 360 HD, l’ensemble du site a été reconstitué. « C’est un travail très scientifique qu’on a voulu rendre. La précision est de l’ordre du 10e de millimètre », précise Frédéric Prades, directeur de Cosquer-Méditerranée. Plus de 50 versions ont été proposées afin d’obtenir le résultat le plus adapté au support contraint. Car contrairement à Chauvet, où tout a été construit autour du duplicata de la caverne du Pont d’Arc, une autre difficulté a consisté à s’adapter au bâtiment existant, la Villa Méditerranée, et à faire entrer 2 300 m2 dans 1 750 m2. « On a dû contourner des obstacles mais la restitution est très précise. On a supprimé des endroits très peu accessibles et sans intérêt, mais 85 % de la grotte sont reconstitués et près de 95 % des peintures et des gravures », poursuit Frédéric Prades. 

 

Une exploration immersive

Enfin, l’objectif est de proposer une approche la plus réaliste possible des œuvres bien sûr, mais aussi de l’aspect géologique, autrement dit les stalactites et stalagmites assez remarquables. Il s’agit également de restituer la topographie complexe, les différences de niveau, les passages étroits et évidemment la présence de la mer. Tous les acteurs ont donc travaillé à proposer une immersion, comme si on était soi-même l’inventeur du site, c’est-à-dire le plongeur Henri Cosquer. Ce qui, là encore, a obligé les équipes à faire preuve d’inventivité : « il a fallu retraduire l’aspect des gouttes d’eau dans la cavité, donner un sentiment de profondeur grâce à la présence de bassins ».

La visite se veut donc “en mode exploration sous-marine” façon Vingt mille lieux sous les mers2. On accèdera à la restitution par un ponton flottant menant à un espace évoquant l’univers de la plongée au moment de la découverte de la grotte (1985). Puis il faudra emprunter une cage de descente simulant l’immersion à 37 mètres sous l’eau, pour enfin monter à bord de modules d’exploration sur un parcours de 220 mètres. Des jeux de lumière et de mouvement dévoileront au fur et à mesure les différentes gravures et peintures. Enfin, pour approfondir la connaissance du paléolithique supérieur, ou la montée des mers et le réchauffement climatique, le centre d’interprétation apportera des compléments d’information et des réponses supplémentaires.

Nathalie Pioch

Ouverture officielle au public : samedi 4 juin 2022

Billetterie déjà en ligne + infos : grotte-cosquer.com

En complément, retrouvez notre article dans le 4e numéro (mai-juillet 2022) d’altermidi mag disponible en kiosque.

Notes:

  1. La société PERSPECTIVES[S], basée à Aix-en-Provence, a développé un logiciel spécifique pour traiter les données fournies par la DRAC-Paca (Direction régionale des affaires culturelles).
  2. Vingt Mille Lieues sous les mers est un roman d’aventures de Jules Verne, paru en 1869-1870. Il relate le voyage de trois naufragés capturés par le capitaine Nemo, mystérieux inventeur qui parcourt les fonds des mers à bord du Nautilus, un sous-marin très en avance sur les technologies de l’époque.
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Reprend des études à chaque licenciement économique, ce qui lui a permis d'obtenir une Licence en Histoire de l'art et archéologie, puis un Master en administration de projets et équipements culturels. Passionnée par l'art roman et les beautés de l'Italie, elle garde aussi une tendresse particulière pour ses racines languedociennes.