vendredi 10 mai 2024
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Accueil Société Santé <span style='color:#f9b233;'>Un projet pour réunir le FIVA et l'ONIAM au sein d'une même entité inquiète les associations :</span></br> Une « fusion-absorption » que redoutent les victimes de l’amiante

Un projet pour réunir le FIVA et l'ONIAM au sein d'une même entité inquiète les associations :
Une « fusion-absorption » que redoutent les victimes de l’amiante

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<span style='color:#f9b233;'>Un projet pour réunir le FIVA et l'ONIAM au sein d'une même entité inquiète les associations :</span></br> Une « fusion-absorption » que redoutent les victimes de l’amiante


Les ministères de la Santé et du Budget envisagent de restructurer le Fonds d’indemnisation pour les victimes de l’amiante (FIVA) avec l’Office national des accidents médicaux (ONIAM). L’Association nationale de défense des victimes de l’amiante, l’ANDEVA, a fait part de son désaccord, comme certains syndicats.


 

C’est un nouveau projet gouvernemental qui interpelle les différentes associations de défense de victimes de l’amiante, au premier rang desquelles l’ANDEVA, collectif national qui rassemble plusieurs organisations. Les ministères de la Santé et du Budget ont lancé une concertation pour envisager une fusion entre l’ONIAM (Office national et accidents médicaux), et le FIVA (Fonds d’indemnisation pour les victimes de l’amiante).

Auditionnés par l’Inspection générale des Affaires sociales (IGAS) et par l’Inspection générale des Finances (IGF), l’ANDEVA et la Fédération nationale des accidentés du travail et handicapés (FNATH) ont fait part de leur opposition catégorique à ce projet qu’elles considèrent comme « un recul social ».

Créé par la loi du 23 décembre 2020, le FIVA a été mis en place pour indemniser les victimes de l’amiante et leur famille de façon rapide, avec une efficacité appréciée, puisque plus de 100 000 préjudices ont été reconnus et des indemnités versées aux personnes atteintes d’une maladie liée à l’amiante, ou aux ayants droits de victimes décédées. La « spécialisation » amiante du FIVA permet de traiter de façon directe et centralisée les dossiers et surtout rapidement.

Ce n’est pas le cas de l’ONIAM, créé en 2002 par la loi Kouchner, géré par 23 commissions et 23 magistrats, entraînant ainsi un fonctionnement complexe. En 2017, il a été « sévèrement épinglé » par la Cour des comptes qui lui reproche la lourdeur de son fonctionnement, en particulier la Commission de conciliation et d’indemnisation (CCI), et le rejet sans réelle justification d’un grand nombre de demandes de victimes d’accidents médicaux. Le rapport évoque « une mise en œuvre dévoyée » et préconise « une remise en ordre impérative ». En outre, les délais d’indemnisation très longs, parfois plusieurs années, ont conduit à de nombreuses procédures judiciaires de la part des plaignants. Un plan de redressement a été décidé suite à ces constats.

Dans ce contexte, le rapprochement entre les deux organismes n’est pas bien perçu par les victimes de l’amiante et leurs proches : « il s’agit en fait d’un collage incohérent entre deux structures qui n’ont ni le même financement, ni le même mode de traitement des dossiers, ni les mêmes critères d’indemnisation », relèvent l’ANDEVA et la FNATH dans leur communiqué, qui soulignent aussi que l’ONIAM « a déjà fort à faire avec les victimes de maladies nosocomiales, d’accidents de vaccination, de la Dépakine, du Médiator et quelques autres, sans qu’il soit besoin d’en rajouter ». Avec d’autres associations, elles ont alerté les députés et demandé à être reçues par le groupe parlementaire « amiante ». Son président, Christian Hutin (député du Nord – PS), a interpellé le ministre des Solidarités et de la Santé, rappelant que « si le FIVA a été créé, c’est d’abord parce que la société avait une dette vis-à-vis de dizaines de milliers de victimes actuelles et à venir qu’elle n’avait pas su protéger ».

Forte inquiétude dans les bassins industriels de la région PACA

Près de la zone industrialo-portuaire de Fos et des sites pétrochimiques de Lavéra, où les victimes sont extrêmement nombreuses, ce projet inquiète grandement. L’ADEVIMAP, association de défense des victimes de maladies professionnelles, redoute que cette fusion n’entraîne des retards d’indemnisation. Pour Christiane de Felice, il faut une mobilisation importante : « On s’est battu pour obtenir le FIVA et améliorer le système d’indemnisation des victimes dans les trois mois maximum. Il repose sur le droit du travail, et son financement se fait par la branche accident du travail et maladie professionnelle de l’assurance maladie, qui abonde au fur et à mesure des besoins. L’ONIAM s’appuie sur le droit civil et il est financé par les assurances. On est vraiment dans deux systèmes complètement différents ! »

Autour de l’étang de Berre, mais aussi dans le Var, avec l’association des salariés de l’Arsenal victimes de l’amiante (ASAVA) ou dans les Alpes de Haute-Provence où d’anciens salariés d’Arkéma ont créé la CAPER (Comité amiante prévenir et réparer), la riposte s’organise. Il s’agit d’interpeller les élus, de se rassembler pour s’organiser au niveau régional, notamment avec les syndicats CGT, et d’envisager un plan d’actions. Car la situation est grave, l’amiante étant considérée comme une catastrophe sanitaire nationale, et on redoute encore des milliers de victimes dans les prochaines années. La maladie, particulièrement le mésothéliome (forme très virulente du cancer des poumons et de la plèvre), met plusieurs années avant de se déclencher. On a aussi reconnu l’impact environnemental de l’amiante, notamment parmi les épouses qui nettoyaient les bleus de travail, et donc qui ont été en contact avec la fibre tueuse.

Pour les dizaines de milliers de victimes et leur famille, la responsabilité de l’État est engagée. Les associations estiment qu’il n’est pas question de les rendre invisibles en remettant en cause ce dispositif, et cette fusion serait vécue comme une « véritable provocation   ».

Nathalie Pioch