Face à la colère des journalistes de l’opposition et des citoyens, le Premier ministre a annoncé la mise en place d’une commission indépendante pour « nourrir utilement l’examen de l’article 24 », prévu mi-janvier, de la proposition de loi Sécurité Globale par le Sénat. La coordination nationale exige quant à elle le retrait du schéma national du maintien de l’ordre ainsi que des article 21, 22, 24 de la proposition de loi.


 

L’article litigieux, voté en première lecture par l’Assemblée nationale , prévoit de pénaliser la diffusion malveillante de l’image des policiers et gendarmes. De nombreux journalistes et citoyens considèrent qu’il s’agit d’une sérieuse atteinte à la liberté de la presse et à la liberté d’expression.

Hier, Matignon a exprimé dans un communiqué « la stupéfaction » du Premier ministre après le refus des syndicats de journalistes et des sociétés de journalistes de participer à la réunion prévue dans la journée.

Au terme d’une réunion avec une délégation de syndicats d’éditeurs de presse et représentants de collectifs de journalistes, mais boycottée par les syndicats de journalistes et les sociétés de journalistes1, Jean Castex a annoncé la création d’une commission indépendante.

C’est le président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), Jean-Marc Burguburu, qui dirigera la commission. Elle devra rendre ses travaux « pour la fin du mois de décembre ». L’objectif est de « nourrir utilement l’examen de la proposition de loi sur la Sécurité Globale en janvier au Sénat dans le respect des prérogatives de la représentation nationale », ont indiqué les services du Premier ministre.

L’annonce de la création de cette commission a eu lieu au terme d’une rencontre improvisée avec une délégation de syndicats d’éditeurs de presse (représentant les patrons de presse) et l’ONG Reporters sans frontières qui ne sont pas représentatifs de la profession, ni des citoyens.

Le boycott des journalistes se fonde notamment sur l’interdiction par la préfecture d’une « Marche des libertés » prévue samedi à Paris. Concernant le défilé, Matignon précise que si la marche n’a pas été autorisée en raison des contraintes de sécurité, la manifestation statique avec prise de parole n’est en aucun cas interdite, ce qui laisse sceptique sur l’argument invoqué.

Dans le communiqué à lire ci-dessous, la coordination nationale, qui rassemble tous les syndicats de journalistes, suivie par les sociétés de journalistes et une quarantaine d’organisations de la société civile, rappelle quelle exige le retrait des articles 21, 22, et 24 de la proposition de loi et du nouveau Schéma national du maintien de l’ordre. Elle annonce qu’elle se tient prête  « à passer outre l’interdit » visant la marche entre République et Bastille demain à Paris.

Avec AFP

 


Communiqué de la coordination nationale #StopLoiSecuriteGlobale


 

Tout ça pour ça ! Le Premier ministre a annoncé, ce jeudi 26 novembre, la création d’une commission indépendante censée statuer sur l’article 24 de la proposition de loi Sécurité Globale. L’idée ne vient pas de Matignon mais de la Place Beauvau. Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, a avoué être à l’origine de la création de ce comité Théodule, lors de son intervention au 20 Heures de France 2.

Contrairement aux affirmations du ministère de l’Intérieur, pas un seul journaliste ou réalisateur n’a été reçu par le Premier ministre. Seuls quatre représentants de syndicats d’éditeurs et l’ONG Reporters sans frontières étaient présents à Matignon.

Dans l’après-midi de ce jeudi 26 novembre, les quatre organisations syndicales représentatives de journalistes (SNJ – SNJ-CGT – CFDT-Journalistes – SGJ-FO) suivies par les sociétés de journalistes et de toutes les organisations que constituent la coordination #StopLoiSecuriteGlobale ont annoncé boycotter l’entrevue avec Jean Castex. Ils constatent avoir eu raison de ne pas participer à cette opération de communication et de diversion.

La coordination nationale #StopLoiSecuriteGlobale reste convaincue que l’article 24 de la proposition de loi, ainsi que les articles 21 et 22 et le nouveau Schéma national du maintien de l’ordre (SNMO) visent à empêcher de documenter les violences policières et cherchent à entraver le travail des journalistes, des réalisateurs et de tout citoyen dans la manifestation de la vérité. La coordination exige le retrait de ces trois articles et du SNMO.

Au même moment, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme a rappelé fermement  : « La CNCDH s’inquiète du transfert de compétences de police judiciaire aux agents de police municipale (…). La Commission formule également de vives critiques à l’égard de l’interdiction de diffuser des images permettant d’identifier les agents des forces de l’ordre, en raison notamment des risques engendrés sur le terrain d’atteintes à la liberté d’informer. Enfin, la CNCDH est opposée à l’utilisation généralisée des caméras aéroportées (drones) qui ouvre des perspectives de surveillance sans précédent, particulièrement menaçantes pour l’exercice des droits et libertés fondamentaux. »

La coordination nationale #StopLoiSecuriteGlobale a déposé un référé-liberté après que la préfecture de police de Paris a interdit la marche des Libertés entre les places de la République et de la Bastille ce samedi 28 novembre à Paris.

Le Tribunal administratif doit statuer ce vendredi 27 novembre à 15 heures.

Quelle que soit la décision la coordination nationale #StopLoiSecuriteGlobale a déjà appelé « à passer outre  l’interdit » en annonçant le maintien de cette marche à Paris, avec un appel publié dès ce vendredi 27 novembre et signé par un arc de forces professionnelles, associatives, syndicales, citoyennes extrêmement large.

Des actions et manifestations sont prévues dans plus de 60 villes en France, ainsi qu’à Berlin et La Haye.

Paris, le 26 novembre 2020.

 

Notes:

  1. Une société de journalistes ou société de rédacteurs est une association de journalistes constituée au sein d’une rédaction. Son objectif est de faire respecter un minimum d’indépendance journalistique, notamment face aux pressions des actionnaires, et de veiller au respect de la charte de déontologie des journalistes.