Initiée en 2018 dans l’Ariège pour défendre une agriculture saine, sans pesticide, la campagne nationale Glyphosate continue d’essaimer partout en France.

Une première opération « analyse d’urine » à laquelle avait d’emblée participé une centaine de personnes, a mis en lumière des résultats édifiants prouvant à 100% la présence de pesticides dans l’organisme. Bien plus grave, ces analyses démontrent un taux de concentration du Glyphosate qui serait en moyenne de 1,113 microgramme/l (11%), là où la réglementation fixe un seuil maximal de 0,1 microgramme/l. Il avoisinerait même les 33% chez certains individus testés.

Depuis le lancement de cette campagne, la mobilisation grandit partout sur le territoire, notamment dans les Bouches du Rhône où une nouvelle coordination affiliée, vient de naître.

Une réunion ouverte le 7 juin dernier à Aix-en-Provence a permis de faire connaître au grand public ce nouveau relais informatif qui programme une journée de tests d’urine, mardi 18 juin à Aix-en-Provence (en septembre à Marseille), dans le but d’éclairer sur l’extrême dangerosité des produits phytosanitaires en vente, plus particulièrement le Roundup (herbicide Monsanto) contenant un fort taux de Glyphosate et des co-formulants hautement toxiques.

Plus de 2400 plaintes citoyennes

Avec plus de 2400 plaintes portées auprès des tribunaux en France aujourd’hui et un nombre croissant de volontaires qui exigent réparation de leur empoisonnement, la campagne Glyphosate bat son plein.

Dans les Bouches du Rhône, la nouvelle antenne entend également répondre aux polémiques liées au rapport parlementaire d’évaluation des méthodes d’analyses des agences sanitaires, datant de jeudi 16 mai 2019.  Régis Delalande, militant écologiste aixois, chapeaute la coordination 13. Il rappelle : « Le sénateur UDI de Haute-Garonne, Pierre Médevielle a remis en cause à tort, la dangerosité du Glyphosate. Les déclarations fantaisistes de ce sénateur ont suscité dès le lendemain de vives critiques de la part même des autres membres de la commission parlementaire. Le député et scientifique Cédric Villani indiquant même que le sénateur Pierre Médevielle n’avait exprimé que des convictions personnelles au détriment du travail sérieux de ses collègues ».

Pour mémoire, le Centre International de Recherche sur le cancer (C.I.R.C) avait dès 2015, classé le fameux désherbant chimique Glyphosate en tant que « cancérogène probable ». Or, et non sans un certain goût pour ce qu’il nomme « amalgame », le sénateur Pierre Médevielle avait affirmé le contraire, semant le trouble et martelant : « S’il était cancérogène, on l’aurait interdit »….

Considérant les méthodes d’évaluation des pesticides « caduques et déficitaires », Régis Delalande commente : « Ces études qui permettent l’autorisation de mise sur le marché des pesticides sont dénoncées depuis longtemps par de nombreuses associations, les Faucheurs Volontaires et la Campagne Glyphosate France. Elles ne prennent pas en compte la molécule active désignée comme telle par les fabricants. Aucune contre-expertise n’est faite ! L’incident de dimanche 13 mai qui fait qu’un sénateur se permet de détourner les conclusions d’un rapport parlementaire en ne faisant référence qu’à la seule molécule Glyphosate est symptomatique de la cacophonie scientifique volontairement entretenue par les fabricants et leurs complices ».

Et d’illustrer : « L’effet de potentialisation (effet cocktail) n’est absolument pas pris en compte par l’E.F.S.A (Autorité européenne de sécurité des aliments) contrairement à l’I.N.S.E.R.M (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale) qui étudie les effets du produit fini tel que fourni aux usagers. Imaginons que soit évaluée la dangerosité de la poudre à canon en étudiant uniquement le salpêtre ou le charbon de bois qui la compose ou que soit évalué le danger potentiel d’une balle de révolver en étudiant seulement la tête de la balle sans se pencher sur le fonctionnement global du révolver lui-même… Quelle absurdité tragique ! »

 

Une campagne pour éclairer

À quels organismes faire confiance quand il s’agit de rechercher les conséquences sur la santé ? Le citoyen doit-il choisir entre les agences de sécurité alimentaire comme l’E.F.S.A et l’A.N.S.E.S (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) ou doit-il plutôt se référer aux instituts de recherches médicales comme le C.I.R.C ou l’I.N.S.E.R.M qui alertent sur les risques que l’exposition aux pesticides fait réellement courir à la santé humaine ? Autant de questions en friche dans les Bouches du Rhône, comme dans tout le pays.

Sonnant l’alarme, appelant à changer les méthodes utilisées par les organismes accréditeurs pour le Glyphosate et tous les pesticides ou molécules chimiques brevetées à une cadence estimée « inquiétante », les militants de la coordination 13 mettent un focus sur les résultats de la campagne, active en France : « Les 2600 analyses faites dans le cadre de la campagne Glyphosate France démontrent l’imprégnation générale de la population par le Glyphosate et donc par les pesticides dont il est un composant. Une imprégnation chimique n’est jamais anodine… Qui peut aujourd’hui prédire de l’avenir sanitaire des personnes exposées ? Que celles et ceux qui continuent à prétendre qu’un pesticide ingéré ou inhalé au quotidien ne présente aucun danger explique pourquoi, dès lors, leur utilisation est interdite pour les particuliers et dans les collectivités locales… »

À l’heure où les débats scientifiques semblent muselés par les lobbys et industriels, la coordination 13 défend l’urgence de l’application du principe de précaution « qui doit prévaloir dans un État de droit et à fortiori dans une République chargée de la protection de ses citoyens ». C’est aussi dans ce contexte que la journée du 18 juin veut rassembler tous les citoyens aixois soucieux de leur consommation alimentaire et impliqués pour que soient enfin dévoilées leurs analyses d’urine. D’autant que ces futurs résultats rendront compte des particularités géographiques dans un département urbanisé qui comprend néanmoins d’importantes zones rurales. Pour Régis Delalande : «  La pollution aux pesticides n’est pas liée à la seule zone d’épandage. La molécule est portée par le vent, l’eau et la contamination se fait bien sûr aussi par l’alimentation ».

À l’issue des tests, chaque citoyen pourra s’il le souhaite participer au dépôt de plainte collective contre l’État français devant le tribunal de grande instance de Paris et la cour de justice de l’Union Européenne pour « mise en danger de la vie d’autrui, tromperie aggravée et atteinte à l’environnement ».

Petite information de taille, le test qui aura lieu dès potron minet le 18 juin à Aix-en-Provence coûte 135 € (85€ pour les analyses et 50€ pour les frais d’huissiers). L’inscription préalable est obligatoire*. Parallèlement, un crowdfunding**, en ligne sur la plateforme de financement Helloasso, a permis à ce jour de récolter plus de 20 000 euros au niveau national. Cet appel à participation a pour but de financer les frais d’organisation et de suivi de la Campagne et de réduire le coût individuel de celles et ceux qui ne pourraient pas financer totalement leurs analyses. L’idée étant d’atteindre le premier palier de 60 000 euros d’ici un peu plus de 7 mois.

H.B.

*campagne.glyphosate.13@gmail.com

**www.helloasso.com/associations/campagneglypho

H.B
Journaliste de terrain, formée en linguiste, j'ai également étudié l'analyse du travail et l'économie sociale et solidaire. J'ai collaboré à différentes rédactions, recherches universitaires et travaillé dans divers domaines dont l'enseignement FLE. Ces multiples chemins ailleurs et ici, me donnent le goût de l'observation et me font aimer le monde, le langage des fleurs et ces mots d'André Chedid : «Cet apprentissage, cette humanité à laquelle on croit toujours».