Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a revendiqué dans la nuit la victoire de son parti aux législatives organisées dimanche. Les résultats portant sur la quasi-totalité des bulletins donnent en effet plus de 53 % des voix à sa formation souverainiste Fidesz contre près de 35 % pour l’opposition.


 

En Hongrie, le dirigeant souverainiste Viktor Orbán a remporté, dimanche 3 avril, selon des résultats encore partiels, une quatrième victoire d’affilée, bien plus facilement que prévu, à l’issue de législatives à l’ombre de la guerre en Ukraine.

À 58 ans, le doyen des dirigeants en exercice de l’Union européenne (UE) faisait face à une alliance inédite et disparate de six partis.

Les analystes avaient prédit une bataille serrée mais les résultats sont sans appel : le parti Fidesz de Viktor Orbán recueillait 53,35 % des voix après le dépouillement de 93 % des bulletins, contre 34,75 % pour l’opposition, a précisé le Bureau national électoral. Fort de cette avance, le Premier ministre est assuré de conserver une majorité des deux tiers au Parlement.

« Nous avons remporté une victoire exceptionnelle — une victoire si grande qu’on peut sans doute la voir depuis la lune, et en tout cas certainement depuis Bruxelles », a déclaré grand sourire et sous les applaudissements Viktor Orbán, habitué des bras de fer avec l’UE.

 

« Des conditions injustes et impossibles »

 

Son adversaire Peter Marki-Zay s’est adressé à ses partisans tard dans la soirée. « Je ne vais pas cacher ma tristesse et ma déception », a-t-il réagi. Combatif malgré tout, il a dénoncé « une lutte inégale » face à « la propagande », « une campagne de haine et de mensonges ».

En glissant son bulletin dans l’urne aux côtés de sa famille, ce maire conservateur de 49 ans avait dénoncé plus tôt « des conditions injustes et impossibles » visant à permettre à son rival de « rester éternellement au pouvoir ». Et de citer des médias publics à la botte du gouvernement — lui-même a eu droit à seulement cinq minutes d’antenne à la télévision publique, en tout et pour tout.

Dans la coalition de l’opposition, certains, comme le vice-président du Jobbik1, Marto Gyongyosi, ont dénoncé des « irrégularités ».

Accusé par Bruxelles de multiples atteintes à l’État de droit, Viktor Orban a muselé au fil de 12 années justice et médias, tout en prônant une vision ultra-conservatrice de la société.

Le scrutin s’est tenu pour la première fois sous la surveillance de plus de 200 observateurs internationaux. Chaque camp a aussi déployé des milliers de bénévoles.

Fustigeant « le gouvernement le plus corrompu de l’histoire de la Hongrie, « MZP2 » avait sillonné ces dernières semaines de long en large le pays, à l’écoute des habitants, dans l’espoir de battre en brèche la « propagande » du gouvernement.

 

« Poutine hongrois »

 

Surtout que le conflit en Ukraine voisine a totalement bousculé la donne. « La guerre a éclaté, et la guerre a tout changé », a résumé Viktor Orbán vendredi au cours de son unique rassemblement de campagne. Il s’est posé comme « un protecteur » de la Hongrie, un garant de paix et de stabilité, en refusant de livrer des armes à l’Ukraine et de voter des sanctions qui priveraient les Hongrois des précieux pétrole et gaz russes.

Parallèlement, sur les affiches électorales et dans les médias pro-Orbán, Péter Marki-Zay a été dépeint comme « dangereux », accusé de vouloir précipiter le pays dans la guerre du fait de son ferme soutien à l’Ukraine.

Le candidat a eu beau souligner la proximité cultivée depuis 2010 par le Premier ministre avec le président russe, le traitant de « Poutine hongrois », son discours n’a visiblement pas suffi à convaincre les électeurs.

Les Hongrois étaient par ailleurs appelés à répondre à quatre questions en lien avec la récente loi interdisant d’évoquer auprès des moins de 18 ans « le changement de sexe et l’homosexualité ». Ce référendum, jugé « malsain » par les ONG, qui avait appelé à protester en cochant les cases oui et non, a échoué à réunir suffisamment de votes valides, selon des résultats partiels.

Le mode de scrutin législatif hongrois combine majorité simple par circonscription et proportionnelle, un dispositif mis en œuvre pour la première fois en 2014 et avantageant, selon les analystes, le Fidesz3 au pouvoir.

Avec AFP

 

Voir aussi : Viktor Orban profite du coronavirus pour s’adjuger les pleins pouvoirs

Notes:

  1. L’Alliance des jeunes de droite – Mouvement pour une meilleure Hongrie, communément appelé Jobbik (« le meilleur »), est un parti politique hongrois fondé en 2003. Présentant à ses débuts des racines historiques radicales et nationalistes, le parti était alors souvent considéré comme d’extrême droite et parfois qualifié de néo-nazi.
  2. Márki-Zay Péter (MZP), le président fondateur du Mouvement Hongrie de tous, parti libéral conservateur hongrois fondé le 21 avril 2013, était porté par une alliance inédite qui allait de la gauche à l’extrême droite.
  3. Le Fidesz, de son nom complet Fidesz-Union civique hongroise, fondé en 1988 comme un mouvement de jeunesse opposé au parti unique et à la République populaire de Hongrie, se définissant lui-même comme « libéral, radical et alternatif », est progressivement devenu un parti national-conservateur et de droite populiste, membre du Parti populaire européen et de l’Union démocrate internationale.