Le collectif, Réseau Éducation Sans Frontières a saisi La Défenseure des droits. RESF demande ce qui a bien pu se passer pour qu’un jeune sénégalais soit renvoyé à Dakar moins de 24H après son interpellation, alors que la justice venait de le placer sous protection de l’aide sociale à l’enfance.


 

Une reconduite à la frontière en moins de 24 heures chrono, les militants du Réseau Éducation Sans Frontière n’avaient jamais vu ça… A croire que les policiers sont plus que jamais perméables aux cadres politiques et idéologiques qui entourent leur activité professionnelle.

Le fait d’être au contact d’étrangers stigmatisés par nombre de discours politiques et médiatiques stigmatise les agents eux-mêmes, en les assimilant au public qu’ils reçoivent. Leur travail de traitement des dossiers est divisé, entre réception des étrangers et prise de décision. Comme l’a souligné le chercheur Alexis Spire dont les travaux portent sur la sociologie de l’Etat, « cette division du travail, aboutit à une dépersonnalisation du traitement des dossiers, déresponsabilise les agents, et prive l’usager d’explications sur les décisions qui s’appliquent à lui. »

Ousmane est arrivé en avril dernier par avion à Orly. Il présente un vrai passeport mais d’une personne majeure. Les agents de la police aux frontières perçoivent rapidement que la photo ne peut pas correspondre à l’âge réel du passager. Ousmane est alors placé en zone d’attente, puis relâché comme cela se fait régulièrement en attendant que la justice se prononce sur son âge réel.

Fin juillet dernier, un juge reconnaît, justement, le statut de mineur non accompagné d’Ousmane (16 ans), selon RESF. Le jeune homme est alors placé sous protection de l’aide sociale à l’enfance, donc en principe non expulsable… jusqu’à samedi dernier.

Des policiers lui demandent son titre de transport près de la porte de Clichy, comme l’ont raconté nos confrères de l’Humanité, puis ses papiers d’identité… les mêmes qu’il avait présentés lors de son arrivée à Orly. Les policiers comprennent qu’Ousmane est bien en situation irrégulière. Il est admis aussitôt dans un centre de rétention administrative. Une obligation de quitter le territoire français (OQTC,) lui est délivrée dans la foulée ainsi qu’un billet, aller simple, pour Dakar dès le lendemain matin. Mais tout cela, les responsables de RESF qui ont suivi l’histoire ne l’ont su qu’après coup, alors qu’Ousmane était déjà dans l’avion.

Les services de la préfecture de police ont-ils vérifié le statut d’Ousmane avant de le reconduire à la frontière ? Pas de trace du dossier pour l’instant…

 

Selon Ousmane, les policiers ne lui ont pas permis de montrer le document

 

Le responsable du réseau RESF pour les Hauts-de-Seine confie qu’Ousmane a pu être joint au Sénégal et que selon sa version, il a bien dit aux policiers qu’il était mineur, qu’il était sous la  protection de l’aide sociale à l’enfance. Il aurait également dit que le document judiciaire était scanné dans son téléphone qui était éteint à ce moment-là. Les agents ne lui auraient alors pas laissé la possibilité de le rallumer. Ils lui auraient répondu que de toute façon, s’il était mineur et sous protection de l’État, ils le sauraient très vite.

N’ayant pas eu d’explication de la préfecture, RESF a saisi le juge qui avait ordonné le placement d’Ousmane sous protection de l’aide sociale à l’enfance le 28 juillet dernier, en plus de la Défenseure des droits.

Selon la rédaction de France Inter, qui titre à propos du cas d’Ousmane « La France a-t-elle franchi une « ligne rouge » sur les reconduites à la frontière de mineurs isolés ? », il n’y aurait pour l’instant aucune trace du dossier d’Ousmane…

 

Voir aussi13 départements d’Occitanie interpellent Castex

Photo.  Portraits de mineurs étrangers réalisés au sein de la Maison du Jeune Réfugié. Un établissement géré par France Terre d’Asile.