Si les activités sportives peuvent apparaître comme le prolongement évident des valeurs démocratiques, elles masquent aussi les inégalités et les imperfections propres à ce système politique. Les jeux olympiques d’hiver de Pékin qui viennent de s’ouvrir en offrent une belle illustration.


 

Jeux olympiques ou jeu de dupes ? On a entendu pas mal de critiques sur les Jeux olympiques d’hiver de Pékin qui ont débuté le 4 février. Journalistes, athlètes, observateurs professionnels ont tous dénoncés de gros bémols. L’expression libre fut de courte portée, elle s’est heurtée, le 18 janvier, aux règles de l’empire du milieu qui a fait savoir que toute critique « sur l’esprit olympique, en particulier envers les lois et règlements chinois », serait passible de poursuites pénales.

Cette farce qui se joue en circuit fermé1, n’a plus grand chose à voir avec l’esprit olympique, la noble tradition sportive et les valeurs de tolérance, d’ouverture ou de rapprochement entre les peuples… mais le Comité International Olympique (CIO) et Pékin font le dos rond et ça passe.

Le sport mondial est devenu un bien public en quête de régulation. Mais à qui faut-il confier cette régulation ? Les États et les pouvoirs nationaux semblent dépassés par les enjeux de cette mondialisation.

Certains pays ont appelé au boycott diplomatique. Côté français, la ministre des Sports, Roxana Maracineanu, a annoncé qu’elle serait absente de la cérémonie d’ouverture mais se rendrait en Chine par la suite. Une position qui a provoqué le sarcasme de Lu Shaye, l’ambassadeur chinois en France, l’accusant de « ménager la chèvre et le chou ».

Les sponsors privés comme Intel, Coca-Cola, Airbnb, Omega… eux seront bien là, et les médias de masse feront le job. Les chaînes de télévision du monde entier ont déboursé la modique somme de 4,2 milliards de dollars pour les droits de retransmission. C’est tout ce qui compte pour le CIO qui a jeté sa responsabilité sociale2, chère à Pierre de Coubertin3, aux orties.

Jean-Marie Dinh

 

Dessin paru en Une du Courrier international N° 1631, février 2022.

Notes:

  1. Les participants seront confinés de leur atterrissage à leur départ. Ils n’auront, durant l’ensemble de leur séjour, aucun contact avec la population chinoise.
  2. La responsabilité sociale fondamentale du CIO est d’assurer que les Jeux modernes restent un patrimoine culturel universel qui contribue à la résolution des problèmes politiques de l’humanité.
  3. Rénovateur des Jeux olympiques de l’ère moderne en 1894 et fondateur du Comité international olympique, dont il est le président de 1896 à 1925. Durant cette période, il dessine les anneaux olympiques et installe le siège du CIO à Lausanne en 1915 où il crée un musée et une bibliothèque. Il milite également pour la création des Jeux olympiques d’hiver dont la première édition a lieu à Chamonix en 1924.
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Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.