La proposition de loi visant à « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur », dite loi Duplomb, véritable régression des avancées en matière de santé et d’environnement, a été validée en commission paritaire le 30 juin, puis le 2 juillet au Sénat. Les députés de l’Assemblée nationale ont adopté définitivement le texte mardi 8 juillet .
La version initiale de la loi Duplomb a été pratiquement entièrement validée en commission paritaire par sept sénateurs et sept députés lundi 30 juin au Sénat, à 10 voix pour (RN, LR, centre et Renaissance) et 4 contre (PS et France insoumise) , puis par la Chambre haute le 2 juillet à 232 voix contre 103.
Le texte a été définitivement adopté, mardi 8 juillet, par les députés de l’Assemblée nationale à 316 voix pour, 223 contre et 25 abstentions.
Les demandes de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), Jeunes Agriculteurs (JA) et de la Coordination rurale ont donc été exaucées.
Le texte contient « les mesures les plus dangereuses », notamment la réintroduction du néonicotinoïde acétamipride, pour une durée de trois ans et sans limite, avec une évaluation au bout de trois ans « par un comité opaque qui ne rendra de compte à personne », alerte Aurélie Trouvé, député insoumise, membre de la Commission mixte paritaire (CMP).
Les députés accèdent également aux demandes de facilitation de construction des fermes-usines et de mégabassines. Ces retenues d’eau bénéficient désormais de la « raison impérative d’intérêt public majeur » (RIIPM), notion juridique permettant de manière très exceptionnelle de porter des atteintes à l’environnement. L’allègement des contrôles et la mise sous tutelle de l’Office français de la biodiversité ont aussi été validés.
En revanche, l’ANSE (Agence nationale de sécurité sanitaire), chargée d’homologuer les pesticides, échappe à la volonté de contrôle du gouvernement, l’institution restera indépendante. La réglementation sur les zones humides ne sera quant à elle pas modifiée.
La ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, salue « un signal fort, attendu et nécessaire, adressé à nos agriculteurs » dont la colère a été entendue. La FNSEA et les JA rendent hommage à l’accord parlementaire qui « fait face à une concurrence déloyale toujours plus féroce et destructrice ». Pour la coordination rurale, il s’agit « d’un premier pas pour l’agriculture ».
Graves reculs écologiques
La gauche et les écologistes condamnent un projet de loi qui occulte la réalité, va à l’encontre de l’intérêt général, des enjeux de santé publique, climatiques et environnementaux, pourtant visibles et ressentis, ainsi que des valeurs telles que le partage de la terre et des ressources.
En outre, la réintroduction du néonicotinoïde entérine la non-prise en compte des rapports des scientifiques, des alertes des médecins et du principe de précaution qui aurait pourtant dû raisonnablement être appliqué.
La Confédération paysanne, troisième syndicat agricole, qui s’est fortement mobilisée contre le texte, dénonce ce cadeau au libre échange et à l’agro-industrie, l’accaparement de l’eau au détriment des minorités et souligne « l’absence de revenus qui entrave le métier ».
Le renouvèlement de l’acétamipride, « projet “chlordécone bis” face aux malades, paysans comme citoyens, qui souffrent de cancers liés à l’utilisation des pesticides », concernerait principalement « près de 500 000 hectares, en grande majorité des cultures dédiées à la betterave », souligne la Confédération paysanne.
Pour rappel, la France est le second utilisateur de pesticides en Europe avec 68 000 tonnes de substances actives de produits phytosanitaires vendues en 2022, dont plus de 95 % sont destinées à un usage agricole, et le troisième pays européen autorisant le plus de substances chimiques.
La gauche annonce aller devant le Conseil constitutionnel.
Sasha Verlei
Credit-Photo.-France-nature-environnement
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