Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah libanais, l’homme qui tétanise Israël et intrigue l’Occident.

 

Par René Naba

en partenariat avec Madaniya Info

 


Cent ans après Balfour, le sablier de l’Histoire s’est retourné,

le compte à rebours a commencé.

Une part du destin de l’Occident, plus qu’en Ukraine, se joue sur la terre de Palestine.


 

L’allocution

M. Hassan Nasrallah a révélé vendredi 3 novembre qu’il avait été « surpris » par l’opération « déluge al Aqsa », mais s’était engagé dans la bataille entre Israël et le Hamas, dès le 8 octobre 2023, au lendemain de l’offensive du Hamas contre l’État Hébreu.

L’engagement du Hezbollah dans la guerre a contraint Israël à immobiliser dans la région frontalière libano-israélienne « le tiers des effectifs logistiques de l’armée israélienne, y compris des troupes d’élite, la moitié de ses forces navales, alors que 50 % de sa force balistique a été positionnée en direction du Sud-Liban, le forçant à évacuer la population de 45 agglomérations urbaines », a assuré le chef de la formation militaire chiite, dans un discours télévisée d’une durée d’1H40 et répercuté par la chaine Al Jazeera sur l’ensemble du monde arabe.

Cette stratégie de harcèlement a contraint l’État Hébreu à détourner une partie des effectifs de son armée qu’il devait jeter dans la bataille de Gaza, a-t-il estimé.

Israël « n’a pas réalisé un seul exploit militaire en un mois de déchainement contre la population de Gaza (…). La bataille de Gaza a produit des résultats stratégiques qui ont déjà des répercussions sur le présent et l’avenir » de l’État Hébreu, a-t-il assuré donnant à penser que le Hezbollah modulera sa stratégie face à Israël en fonction de l’évolution de la situation sur le plan militaire, sur le terrain à Gaza.

S’il a assuré que le Hezbollah n’a pas été préalablement averti de l’opération « déluge Al Aqsa », une « décision à 100 % palestinienne », il n’en demeure pas moins qu’une forte collaboration existe entre la formation libanaise et le mouvement islamiste palestinien, particulièrement au niveau de la stratégie de la guérilla.

 

Un combat mobile dans un circuit fermé

 

Disposant d’une frontière de 72 km, – 59 Km avec Israël et 13 km avec l’Égypte – l’enclave de Gaza est traversée dans ses entrailles par 360 km de tunnels, un poumon vital pour assurer son ravitaillement en armes et en nourritures, afin de contourner son encerclement. Dans sa guerre contre Israël, le Hamas a emprunté au Hezbollah la stratégie que la formation chiite avait appliquée lors de sa confrontation avec l’État hébreu, en 2006 : Un conflit mobile dans un espace clos, qui avait constitué à l’époque une novation stratégique majeure. Les actions de harcèlement du Hamas derrière les lignes israéliennes relèvent de cette même stratégie.

Évoquant la concentration navale américaine au Moyen-orient — 2 porte-avions, 10 bâtiments d’escorte, 16 000 marins et 300 avions —, Hassan Nasrallah a assuré ne pas craindre les États-Unis : les américains nous ont transmis un message selon lequel « si nous intervenons dans la guerre, ils bombarderont l’Iran. (… ) L’Amérique ne nous impressionne pas. Nous sommes prêts à faire face à leurs flottes », a-il poursuivi, mettant en garde les États-Unis en leur rappelant que « ceux qui ont leur ont infligé une défaite en 1985 sont toujours en vie ». M. Nasrallah faisait allusion à l’abrogation du traité de paix israélo-libanais et au dynamitage de l’ambassade américaine à Beyrouth.

Auparavant, dans une brève intervention à la chaîne du Hezbollah « Al Manar », M. Abdel Malak Al Houhti, le chef des Houthis du Yémen, a précisé que M. Hassan Nasrallah s’exprimait en sa qualité de « commandant en chef de l’“axe de la résistance” à l’hégémonie israélo-américaine » dans la zone.

Retour sur une semaine de suspense psychologique initiée par l’annonce lundi 31 octobre du discours que le chef de la formation a prononcé vendredi 3 novembre.
Une stratégie de montée progressive de la tension visant à aveugler Israël à la frontière libano-israélienne

 

Dès le lancement de l’opération « déluge al Aqsa », le Hezbollah a déployé une stratégie de montée progressive de la tension à la frontière libano-israélienne, plutôt qu’un déploiement de riposte multiforme instantané, afin d’aveugler Israël et de le priver de toute visibilité sur le sud du Liban.

 

 

Tel est le constat fait par les observateurs au terme de 27 jours d’accrochages répétés dans la zone frontalière, marqués notamment par la destruction de 140 caméras de vidéo-surveillance israéliennes, de 33 radars, de 17 systèmes de brouillage des transmissions, provoquant corrélativement l’évacuation de 45 agglomérations urbaines israéliennes du nord de la Galilée. L’engagement du Hezbollah dans la guerre vise, selon les observateurs, à confirmer la crédibilité de la formation chiite, en honorant ses engagements maintes fois proclamés en faveur de sa solidarité avec la Palestine, en même temps qu’un pied de nez aux Occidentaux en tranchant le nœud coulant qu’ils suspendaient autour de son cou par la Softwar menée depuis deux ans par l’OTAN contre le Liban en vue de la strangulation du Hezbollah.

De manière subsidiaire, il confirme le dépassement de l’antagonisme religieux Sunnite/Chiite qui a empoisonné la vie politique régionale depuis la guerre irako-iranienne (1979-1989), largement attisé par les commentateurs occidentaux, particulièrement les islamophilistes français lors de la guerre de Syrie (2011-2021).

 

Nasrallah, l’homme qui tétanise et intrigue Israël et les Occidentaux

 

Tel un oracle, son discours était attendu. Grand décideur régional du fait d’un palmarès militaire prestigieux, son silence intrigue les stratèges occidentaux et son propos turbule, projetant la cohorte de ses contempteurs dans les affres d’une transe interprétative, au point que l’AMAN, la direction du renseignement militaire israélien, a affecté 16 experts pour le décryptage sinon de sa pensée à tout le moins de ses propos ; au point qu’un officier supérieur israélien a consacré une thèse au discours politique du Chef du Hezbollah libanais concluant au fait que Hassan Nasrallah est « le premier dirigeant arabe à disposer d’une capacité d’influence sur le public israélien de par ses discours, depuis le président égyptien Gamal Abdel Nasser ».

Cette thèse du colonel Rounine a été soutenue devant l’Université de Haifa, dont le quotidien Haaretz en a rendu compte dans son édition du 12 juillet 20101.

Mieux, un institut américain nullement suspecté de complaisance avec la formation paramilitaire chiite donnera acte de la valeur combative de ses combattants lors de la bataille de Syrie, au grand dam de ses détracteurs tant occidentaux que de ses rivaux sunnites : « Le Hezbollah a réussi à assumer un rôle distinctif croissant dans la direction des opérations de l’armée syrienne lors d’offensives majeurs des forces gouvernementales. À Qousseir (Juin 2013), le Hezbollah a pris directement en main le commandement des opérations, assumant, parallèlement, la surveillance aérienne permanente du champ de bataille, via des drones », actera Doha Brookings Doha Center2.

D’une sobriété ascétique, l’homme tranche avec la lubricité de bon nombre de roitelets du Golfe, dont les frasques remplissent les pages des gazettes à scandale. D’une rigueur spartiate, il se démarque de bon nombre d’autocrates arabes. Ce fin lettré manie aussi avec aisance le dialecte libanais pour le plus grand plaisir de son auditoire, lassé par la logomachie et la mégalomanie de bon nombre d’autocrates arabes. Sa stratégie de communication est maîtrisée, plus sophistiquée que les plus grands spécialistes occidentaux de l’InfoWars*.

 

La diabolisation du Hezbollah3456

 

Diabolisé à l’extrême, qualifié tour à tour de « terroriste » par le Premier ministre socialiste français Lionel Jospin qui aura droit à un caillassage en règle de la part des sympathisants palestiniens de la milice chiite libanaise ; décrit comme un parrain de la drogue à l’image de Pablo Escobar par l’ancien journaliste du Monde, Yves Mamou ; criminalisé en tant que responsable de la destruction du port de Beyrouth, un quartier pourtant situé en plein cœur du quartier chrétien de la capitale libanaise, de surcroît fief des milices chrétiennes, le Hezbollah, promu au rang de croquemitaine dans la fantasmagorie occidentale, ne daignera jamais répondre à ces calembredaines, répliquant sur le terrain en faisant la démonstration concrète et de sa science militaire et des règles d’engagement du combat avec la puissance militaire majeure du Moyen-Orient, Israël.

La tétanie du débat public en Europe du fait du génocide hitlérien et de la collaboration vichyste conduira d’ailleurs les grandes démocraties occidentales à museler toute dissonance et à éradiquer toute sensibilité pro-palestinienne, par extension pro-Hezbollah, dans les médias publics en Allemagne et en France.

Ah Vichy et son ignominie, qui tétanise tout débat public en France, l’aseptisant de toute critique à l’égard d’Israël, l’assimilant à une forme déguisée d’antisémitisme, au point que l’ultra-bellicisme de l’État Hébreu, ses bains de sang répétitifs — de Deir Yassine (1948), à Dawaniya (1949), à Qibya (1953) par Ariel Sharon, à Kafr Qassem (1956), à Bahr al Baqqar (1970), à Sabra Chatila (1982) — sont présentés comme des actes d’auto-défense de la « sentinelle avancée du Monde Libre face à la barbarie arabo-musulmane », justifiés « au nom de la “pureté des armes” de “l’armée la plus morale du Monde” ».

 

Le Hezbollah, ultime digue de retenue face au grand naufrage arabe

 

Par quatre fois, en effet, l’unique puissance atomique de la zone mordra la poussière face à la milice chiite. En l’an 2000, à la consternation générale des stratèges occidentaux, le dégagement militaire d’Israël du Liban s’est opéré sans négociation ni traité de paix sous la contrainte des coups de boutoir de la milice chiite.

Cet exploit, sans pareil dans les annales de la polémologie** mondiale, propulsera le Liban  — le plus petit pays arabe de surcroît dépourvu d’aviation et de marine — au rang de curseur diplomatique régional… Et constituera, par ricochet, une réplique subliminale à M. Lionel Jospin, apportant la preuve que le Hezbollah n’était pas un mouvement terroriste, mais bel et bien un mouvement de libération nationale.

En 2006, l’imbrication des guerres croisées d’Israël et des États-Unis au Moyen-Orient en vue de redessiner un « Grand Moyen-Orient », conforme à leur stratégie conjointe visant à maintenir leur hégémonie sur cette zone pétrolière, conduit Israël à se livrer à une offensive aérienne en vue d’obtenir le désarmement du Hezbollah, alors que les États-Unis étaient embourbés en Irak dans une guérilla meurtrière.

Préfiguration de la destruction de l’enclave de Gaza en 2023, trente trois jours de bombardements aériens n’auront pas raison de la résistance du Hezbollah, en dépit de la connivence du Premier ministre sunnite libanais de l’époque Fouad Siniora, l’ancien comptable de son patron le milliardaire libano-saoudien Rafic Hariri, et du leadership maronite, roue dentée de toutes les équipées occidentale dans la zone.

En 2012, en Syrie, le Hezbollah, menant une guerre hybride, remportera des batailles décisives à Yabroud et Qalmoun contenant les hordes islamistes qui projetaient de déferler au Liban en vue de s’emparer des ports libanais.

Dans cette sombre séquence dite du « printemps arabe », où l’alliance islamo-atlantiste a fait basculer dans le giron confrériste les deux meilleurs alliés arabes des États-Unis en Méditerranée, l’Égypte et la Tunisie, le Hezbollah fera office d’ultime digue de retenue face au grand naufrage arabe. Brookings Doha Center lui en donnera acte de cet exploit qui changera le cours de la guerre de Syrie.

En 2021, enfin, alors que le Liban ployait sous le fardeau de la softwar menée par l’OTAN contre lui en vue de faire plier le mouvement chiite, le Hezbollah forcera Américains et Israéliens à la délimitation des zones de prospection pétrolière offshore, menaçant de détruire les installations israéliennes en cas de tergiversations.

 

Des missiles au-delà de Haïfa

 

À Israël qui pensait terroriser le Liban en menaçant de le renvoyer à « l’état de pierre », Hassan Nasrallah a induit une dissuasion mutuelle, menaçant l’État hébreu de se livrer à des bombardements « au delà de Haifa », mentionnant comme cible potentiel les citernes d’Ammonium, un puissant explosif, situées dans l’enceinte du port de la cité.

En 70 ans, Les États-Unis ont eu recours à toute la panoplie de la stratégie militaire occidentale pour domestiquer le monde arabe et enfouir la cause palestinienne. En Vain.

De la doctrine du choc et de l’effroi (Shock and Awe) ou la doctrine de la « domination rapide » — appliquée en Afghanistan (2001), en Irak (2003), en Libye (2011), enfin à Gaza en 2023, en vue d’étouffer l’émergence de toute puissance susceptible de contrarier leurs ambitions —, à la « doctrine de la domination à spectre total » élaborée par le Pentagone, à sa variante la « théorie du Chaos et son corollaire la théorie du fou », inspirée par Leo Strauss (1899-1973), préconisant « la destruction de toute résistance plutôt qu’en construisant » que le pouvoir exerce en plongeant les masses (les pays vulnérables) dans le chaos, à la théorie de l’amiral Arthur Cebrowski « la guerre sans fin », conceptualisée avec Donald Rumsfeld, secrétaire à la Défense sous George W. Bush Jr du temps de l’invasion américaine de l’Irak…

Toute cette littérature belliciste a débouché sur un désastre américain patent: du retrait d’Afghanistan — ah la débandade de Kaboul —, au retrait d’Irak, à la perte de la Libye, à la contreperformance en Syrie et au Yémen en contrepoint de l’aménagement d’une base aérienne russe dans le centre de la Syrie, à l’accession de l’Iran au seuil de « puissance du seuil » atomique parallèlement à la montée en puissance des forces hostiles à l’hégémonie israélo-américaine dans la zone (le Hachd al Chaabi irakien « Unités de mobilisation populaire », et les houthis du Yémen), corrélativement aux déboires militaires israéliens au Liban face au Hezbollah et à Gaza, face au Hamas et au Jihad Islamique.

 

Trois Premiers ministres israéliens au tapis… en 50 ans et un 4e sur un siège éjectable

 

Avec une régularité de métronome, en 50 ans de conflit, trois Premiers ministres israéliens ont été éjectés du pouvoir à la suite de confrontations militaires arabo-israéliennes : en 1973, Golda Meir, à la suite de la destruction de la Ligne Bar Lev par les égyptiens ; en 1982, dix ans plus tard, Menahem Begin à la suite de l’invasion israélienne du Liban et des massacres des camps palestiniens de Sabra et Chatila ; en 2006, 36 ans après, Ehud Olmert et son chef de l’aviation Dan Haloutz pour leur échec à désarmer et démanteler le Hezbollah libanais. Il est vraisemblable qu’un 4e, Benyamin Netanyahu connaitra un sort identique, en dépit de l’acharnement rabique dont il fait preuve contre les civils innocents à Gaza.

Par glissement successif, Israël a été perçu dans un premier temps comme un fait colonial, le « coup de poignard » de l’Europe au cœur du monde arabe, puis le bras armé de l’Amérique, enfin le « levier stratégique » de l’Occident dans la zone, son croquemitaine, pour finir par être perçu, en dépit de la reptation collective pétromonarchique arabe à son égard, comme le fardeau de l’OTAN, dans une zone en pleine fermentation anti-occidentale.

 

La signification du nom de code de l’opération « Déluge Al Aqsa »

 

Fait significatif, l’offensive palestinienne du Hamas depuis l’enclave de Gaza a accentué le discrédit de Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne, en traduisant par des actes, dans des faits, sur le terrain, la promotion du Hamas au rang de défenseur des Palestiniens, particulièrement de la Mosquée Al Aqsa, de Jérusalem, dont l’esplanade est en voie de grignotage par les religieux israéliens avec les encouragements tacites de Benyamin Netanyahu.

L’engagement du Hamas dans la bataille confirme le plein retour de l’unique formation sunnite, avec le Jihad islamique dans le combat pour la Palestine qu’elle avait déserté sous la présidence de Khaled Mecha’al [dirigeant politique de la branche syrienne du Hamas, ndlr] en se joignant à la coalition islamo-atlantiste dans la guerre contre la Syrie. De manière sous-jacente, il confirme de manière éclatante le retour par la grande porte du Hamas dans le giron de l’axe anti-Otan, en revendiquant son autonomie face à la Confrérie des Frères Musulmans rejoignant, par sa réconciliation avec la Syrie, « Mihawar Ad Douwal Al Moumana’a » l’axe de l’immunisation au virus de la soumission à l’hégémonie israélo-américaine.

Le massacre massif des civils palestiniens, en révélant leur duplicité, place en porte-à-faux aussi bien l’Arabie saoudite, gardien des Lieux Saints de l’Islam, en plein processus de normalisation avec Israël : la Jordanie, protecteur des Lieux Saints de Jérusalem en raison du fait que la dynastie hachémite se revendique de la descendance de la famille du prophète ; Le Maroc, président du Comité Al Qods1, pour son troc honteux (reconnaissance d’Israël en échange de la reconnaissance d’Israël sur le Sahara occidental), que le Qatar, parrain des Frères Musulmans, pour son acceptation d’Israël dans le dispositif régional du Centcom***, dont le siège est à Doha ; Abou Dhabi, qui lui permet de poursuivre en toute impunité son agression contre le Yémen en tandem avec l’Arabie saoudite ; enfin, Bahreïn de poursuivre la répression de sa population en toute quiétude. Tous réunis pour leur prosternation collective envers Israël.

Au 2 novembre 2023, le bilan des pertes s’établissait comme suit : 9 061 personnes, dont 3 760 enfants, tuées dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre. En Cisjordanie occupée, près de 130 Palestiniens tués par des tirs de soldats ou de colons israéliens, selon l’Autorité palestinienne. Et au Liban, 50 combattants du Hezbollah, en sus de 33 journalistes libanais et palestiniens tués et 55 institutions de presse, cible de l’aviation israélienne, dont le siège de l’Agence France Presse à Gaza.

Côté israélien, plus de 1 400 personnes ont été tuées depuis le 7 octobre, en majorité des civils, le jour de l’attaque du Hamas. Plus de 240 personnes ont aussi été prises en otage ce jour-là. Sur le plan militaire, 333 soldats tués depuis le 7 octobre, dont 17 depuis le début de l’opération terrestre.

 

Anthony Blinken privilégie son appartenance communautaire

 

Anthony Blinken, secrétaire d’état américain, excipant en Israël sa qualité de « juif » et non de représentant de la nation américaine, a privilégié son appartenance communautaire, révélant du même coup la captation du pouvoir décisionnaire américain par le lobby pro-israélien des États-Unis, accentuant, même coup, l’aversion de larges couches du « Sud Global » envers la morgue occidentale du fait de sa partialité.

 

Une gesticulation française inopérante en raison du handicap dirimant représenté par la détention arbitraire de Georges Ibrahim Abdallah

Dans cette perspective, la gesticulation diplomatique française — préconisant, tour à tour, une coalition internationale contre le Hamas sur le modèle de la coalition anti-Daech, puis une coalition maritime humanitaire internationale, enfin le déploiement de troupes pro-occidentales sur la frontière entre Israël et Gaza — est inopérante en raison du handicap dirimant représenté par la détention arbitraire de Georges Ibrahim Abdallah, militant communiste libanais pro-palestinien et doyen des prisonniers politiques dans le Monde. Mèche à combustion lente, l’affaire Georges Ibrahim Abdallah, un déni de droit dans la Patrie des Droits de l’Homme, consume lentement mais sûrement la relation franco-libanaise.

 

La bataille de Gaza, une bataille décisive dans la reconfiguration des rapports au niveau régional78

 

La bataille de Gaza se veut ainsi une bataille décisive au sens stratégique de Clausewitz2, en ce qu’elle doit provoquer une modification radicale des rapports de forces régionaux et la création d’une nouvelle réalité sur le terrain, et, à défaut de son éradication, par la chute du mouvement islamiste palestinien dans une manœuvre visant à l’étranglement du dernier récalcitrant sunnite pratiquant la lutte armée dans son combat de libération nationale. Elle est engagée sur fond de tractations entre les États-Unis et les États arabes alliés de Washington — les « normalisateurs » — visant à restaurer le pouvoir de l’Autorité Palestinienne à la tête de l’enclave en prévision de la création d’un état palestinien fantoche, pour solde de tout compte de la question palestinienne.

Près de cent ans après la déclaration Balfour portant création d’un « foyer national juif en Palestine », le sablier de l’Histoire s’est retourné. Sur fond de génocide hitlérien et de sociocide palestinien, le compte à rebours a commencé.

L’Union Sacrée de l’Otan autour de son pupille en témoigne : Plus qu’en Ukraine, une part du destin de l’Occident se joue, en cet automne 2023, sur la terre de Palestine.

 


Notes

* InfoWars est un site américain d’extrême droite sur la théorie du complot et les fausses nouvelles appartenant à Alex Jones.

** La polémologie est l’étude de la guerre considérée comme un phénomène d’ordre sociologique.

*** Le United States Central Command ou CENTCOM est l’un des onze Unified Combatant Commands dépendant, depuis le 1ᵉʳ janvier 1983, du département de la Défense des États-Unis. Il est responsable des opérations militaires des États-Unis au Moyen-Orient, en Asie centrale et en Asie du Sud.

Notes:

  1. Il est crée entre les États membres de l’Organisation de la Conférence Islamique le comité Al-Qods (Jérusalem). Au sein de ce comité a été créé une agence dénommée ‘’Agence Bayt Mal Al Qods Acharif’’, à Rabat, ayant pour objectif de : • porter secours à la ville d’Al-Qods Al-Sharif • soutenir les populations et institutions palestiniennes de la ville sainte • protéger la sainte Mosquée d’Al-Aqsa et les autres lieux saints de la ville, et sauvegarder et restaurer son patrimoine civilisationnel, religieux, culturel et architectural.
  2. Dans son ouvrage, Clausewitz insiste sur un premier point fondamental : le but de la guerre est d’anéantir l’ennemi. Par conséquent, tout doit être mis en œuvre pour parvenir à cette fin. Ainsi la violence ne saurait être limitée dès lors qu’elle permet d’atteindre cet objectif.
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René Naba est un écrivain et journaliste, spécialiste du monde arabe. De 1969 à 1979, il est correspondant tournant au bureau régional de l’Agence France-Presse (AFP) à Beyrouth, où il a notamment couvert la guerre civile jordano-palestinienne, le « septembre noir » de 1970, la nationalisation des installations pétrolières d’Irak et de Libye (1972), une dizaine de coups d’État et de détournements d’avion, ainsi que la guerre du Liban (1975-1990), la 3e guerre israélo-arabe d'octobre 1973, les premières négociations de paix égypto-israéliennes de Mena House Le Caire (1979). De 1979 à 1989, il est responsable du monde arabo-musulman au service diplomatique de l'AFP], puis conseiller du directeur général de RMC Moyen-Orient, chargé de l'information, de 1989 à 1995. Membre du groupe consultatif de l'Institut Scandinave des Droits de l'Homme (SIHR), de l'Association d'amitié euro-arabe, il est aussi consultant à l'Institut International pour la Paix, la Justice et les Droits de l'Homme (IIPJDH) depuis 2014. Depuis le 1er septembre 2014, il est chargé de la coordination éditoriale du site Madaniya info. Un site partenaire d' Altermidi.