Le Conseil constitutionnel a censuré jeudi 20 mai l’ex-article 24 de la proposition de loi « sécurité globale » qui punit la « provocation à l’identification » des forces de l’ordre. Au-delà de cette mesure et de la censure partielle de l’utilisation des drones par les forces de l’ordre, la validation des autres mesures inquiète les collectifs citoyens qui restent très vigilants sur le cadre et les conséquences de l’application de cette loi.


 

Dans leur décision, les Sages ont estimé que « le législateur (n’avait) pas suffisamment défini les éléments constitutifs de l’infraction contestée » et dès lors que l’article « (méconnaissait) le principe de la légalité des délits et des peines ». L’article 24, devenu article 52 une fois la loi adoptée par le Parlement le 15 avril, avait suscité une farouche opposition et provoqué des manifestations en novembre et décembre 2020.

Le Conseil constitutionnel a également censuré une large partie de l’article qui organisait l’utilisation des drones par les forces de l’ordre, notamment lors de manifestations. Au total, les Sages de la rue Montpensier ont censuré totalement ou partiellement sept des 22 articles dont ils avaient été saisis.

Les syndicats de police se désolent de ces décisions qui valident pourtant l’escalade sécuritaire dans laquelle s’est engagé le gouvernement. Pour les collectifs régionaux Danger Loi Sécurité Globale1, dont une délégation a tenu hier une conférence de presse devant le Conseil constitutionnel pour alerter sur les effets de ce texte et maintenir une dynamique de vigilance, la censure de la plus haute juridiction est trop incomplète.

« La décision du Conseil Constitutionnel, est une victoire partielle mais une victoire quand même ! », indique Sophie Mazas (LDH) du collectif Danger Loi Sécurité Globale Montpellier. Les collectifs régionaux rappellent notamment que texte adopté qui valide « la généralisation des caméras piéton à toutes les forces de polices municipales, garde champêtre, etc. est autorisée, tout comme l’habilitation des personnels des polices municipales à accéder aux images de vidéosurveillance ».

Ils s’inquiètent de l’entrée des sociétés de sécurité privées dans le dispositif sécuritaire. « Les sociétés de sécurité de transports seront dotées de caméras piétons. La surveillance de la voirie et la possibilité de palpation par tous les salariés de sociétés de sécurité privée est également validée, pouvoirs appartenant précédemment aux fonctionnaires. »

Les collectifs citoyens soulignent par ailleurs que le port d’arme de service durant le temps libre des policiers est autorisé, sans restriction.

Enfin, ils regrettent que le Conseil constitutionnel ait refusé d’examiner la violation de la séparation des pouvoirs, pourtant manifeste, et le conflit d’intérêts d’un des deux auteurs de la proposition de loi. « En refusant cet examen quant à la séparation des pouvoirs, le Conseil constitutionnel prive les citoyens de toute possibilité d’obtenir le respect de la Constitution par le pouvoir exécutif ou le pouvoir législatif ».

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a pour sa part pris acte de cette censure, indiquant qu’il formulerait des propositions en vue d’améliorer le texte, sans en dire davantage.  « Je me félicite des nombreuses dispositions validées qui aideront notre politique de sécurité », a-t-il ajouté.

Jean-Marie Dinh

Notes:

  1. Montpellier, Rennes, Limoges, Auxerre, Lyon, Perpignan, Florac
Avatar photo
Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.