La Chambre d’agriculture du Gard réagit aux nombreuses prises de position suscitées par la Loi Duplomb, qui devait à l’origine être source de simplification.
À propos de la Loi « Duplomb » et de la perception de l’agriculture
Nous regrettons profondément que ce texte soit présenté comme un retour en arrière et soit perçu comme un recul environnemental majeur, sans nuance ni compréhension des leviers et des enjeux.
Cette lecture rapide, souvent idéologique, jette l’opprobre sur toute une profession, sans tenir compte ni de la réalité du terrain, ni du contexte européen dans lequel nos agriculteurs évoluent. Ce débat reflète un malentendu plus large, presque systémique, entre les attentes exprimées par la société et les moyens réellement donnés à l’agriculture pour y répondre. Les agriculteurs français exercent leur métier dans un cadre qui est sans doute le plus exigeant d’Europe, et donc du monde, que ce soit en matière de normes environnementales, de sécurité sanitaire, de traçabilité ou de bien-être animal. Et pourtant, ce niveau d’exigence ne se traduit ni par une reconnaissance suffisante, ni par une rémunération à la hauteur de leur engagement.
Beaucoup d’agriculteurs ne gagnent tout simplement pas leur vie. En France, près de 30 % d’entre eux vivent avec moins de 350 € par mois. Qui accepterait ça ? Les cas de suicides se multiplient. Tout ceci conduit à une disparition progressive du monde agricole, qui semble malheureusement inexorable.
À force de ne plus leur permettre de vivre de leur travail, nous préparons une réalité que beaucoup feignent d’ignorer : celle d’une alimentation très largement importée, produite dans des conditions que nous refusons ici, pour l’environnement, pour la santé, pour les travailleurs. Sans compter les émissions massives de Co² liées au transport de cette alimentation d’importation.
Nous en appelons donc à la responsabilité du gouvernement et du législateur : il est impératif de construire un cadre cohérent et global, qui permette à la fois d’améliorer les conditions de production et de garantir une rémunération digne à celles et ceux qui nous nourrissent.
Ce problème ne peut pas être traité sous le seul angle de l’agriculture. Il s’agit d’un sujet éminemment collectif, qui touche à notre modèle alimentaire, à nos politiques commerciales et à nos habitudes de consommation. Car cette responsabilité est aussi celle de la société dans son ensemble. Celle des consommateurs, qui veulent acheter toujours moins cher, alors même que la denrée agricole ne représente que 1% de leurs dépenses. Celle des acteurs économiques, enfermés dans des logiques de rentabilité aux conséquences dramatiques. Celle de l’État, des collectivités, des décideurs, des citoyens, de chacun d’entre nous.
Consommer durable, ce n’est pas simplement dénoncer. C’est aussi agir. C’est faire un choix de société. C’est préserver notre souveraineté alimentaire, la qualité de notre alimentation, l’identité de nos territoires, nos paysages, nos savoir-faire et l’avenir d’une profession essentielle. À travers leurs choix de consommation, les citoyens ont un pouvoir immense : celui d’influencer en profondeur le modèle économique, environnemental et social dans lequel nous voulons vivre.
Et ce choix est de notre responsabilité à tous.
Chambre d’agriculture du Gard