Le hasard fait parfois bien les choses
Le 19 juin 2025, la France devait coprésider avec l’Arabie saoudite une conférence au siège des Nations Unies à New York en vue de promouvoir une reconnaissance internationale de l’État de Palestine, le jour même où, fâcheuse coïncidence, la justice française doit se prononcer sur le sort de Georges Ibrahim Abdallah, ce militant libanais de confession chrétienne mais communiste qui a dédié sa vie à la reconnaissance d’une Palestine indépendante.
Un télescopage de l’histoire d’autant plus fâcheux que l’homme à l’origine de la conférence internationale sur la Palestine n’est autre qu’Emmanuel Macron, sous le mandat duquel a été votée la LOi IRHA assimilant toute critique d’Israël à de l’antisémitisme.
Comble de perfidie, à deux semaines de cette conférence, la France projetait de livrer à Israël une cargaison militaire, à la date hautement symbolique du 5 juin 2025, date commémorative de la défaite arabe de juin 1967. Les explications alambiquées fournies sur cette affaire par le ministre français de la défense Sébastien Lecornu se sont révélées, à son image, biscornues.
Cette manœuvre équivalait à une prime au bellicisme israélien. Elle a été déjouée par la vigilance des dockers CGT du bassin de Fos. Grâce leur en soit rendus.
Bis repetita placent : dans une distorsion de l’esprit typique des dirigeants occidentaux pour tout ce qui a trait à Israël, Emmanuel Macron a invoqué « le droit d’Israël à se protéger et à assurer sa sécurité » pour justifier l’agression caractérisée de l’État hébreu contre les installations nucléaires iraniennes, le 13 juin 2025.

Vertigineuse est l’inconsistance intellectuelle de Jupiter de France. Israël, l’unique puissance atomique du Moyen-Orient, sème la terreur dans la zone et le balnéaire du Touquet hors sol accuse l’Iran de turbuler la zone, alors que l’État Hébreu n’a jamais souscrit au traité de non-prolifération nucléaire, contrairement à la République Islamique qui a accepté le contrôle de ses activités par l’Agence internationale de l’énergie atomique. Une telle incongruité de comportement est vraisemblablement imputable à la rationalité cartésienne dont la technostructure française s’en vante tant.
Nonobstant ces faits hautement dommageables pour son image, la France fera face, ce jour là, le 19 juin, à un terrible dilemme. Qu’elle maintienne en prison le militant palestinien et sa démarche diplomatique apparaîtra comme antinomique de son objectif onusien. Une gesticulation diplomatique, comme elle est coutumière du fait. Une simple posture déclamatoire. Du «pipeau» en somme.
Georges Ibrahim Abdallah représente en effet un condensé de toutes les turpitudes de la France, le révélateur du dysfonctionnement de ce pays, dont les mythes fondateurs sur lesquels il a longtemps prospéré, auront volé en éclat. Qu’on en juge:
La «Patrie des Droits de l’Homme», dans le cas d’espèce, a commis un abus de droit. Ce faisant, elle apparaît qu’elle est juste la « Patrie de la déclaration des Droits de l’Homme » et non la « Patrie des Droits de l’Homme », selon l’expression de Robert Badinter, ancien ministre socialiste de la Justice et ancien Président du Conseil Constitutionnel.
La France, qui s’est longtemps vécue comme « la fille aînée de l’Église », s’arrogeant à ce titre la fonction de » protectrice des chrétiens d’Orient « , s’est révélée dans le cas de Georges, – pourtant maronite de naissance et ancien élève des congrégations religieuses chrétiennes libanaises – comme exerçant une fonction non de protection, mais de « protectorat » dans la pure tradition coloniale française, traquant sans répit toute pensée dissidente.
Le hasard du calendrier – la concordance de ces deux événements, le 19 juin 2025, la conférence de l’ONU sur la Palestine et le verdict dans l’affaire Georges Ibrahim Abdallah, a scellé dans l’ordre symbolique le lien indissociable entre le militant communiste libanais et la cause palestinienne.
En 77 ans, Israël s’est appliquée méthodiquement à enfouir sous les décombres l’identité palestinienne, alors que, parallèlement, depuis 41 ans, la France s’acharne à emmurer le chrétien libanais pro palestinien.
Signalons au passage qu’Israël ne pratique pas un « génocide », qui signifie étymologiquement « l’extermination concrète intentionnelle totale ou partielle d’un groupe national », mais un SOCIOCIDE, l’anéantissement de la totalité de la société palestinienne dans toutes ses composantes humaines, culturelles et économiques de même que son patrimoine archéologique, artistique, cinématographique, gastronomique et culinaire, s’arrogeant au passage la propriété du Zaatar.
77 ans d’acharnement en vain. Le peuple palestinien résiste tout comme Georges, sans s’adonner au découragement. La rectitude de son comportement constitue une leçon de courage exemplaire pour tous les militants en lutte pour la réalisation de leurs revendications. Un « Homme Debout », dont l’attitude tranche avec la reptation de la faune politico-médiatique française.
Cette affaire a en effet révélé l’extrême servilité de la France à l’égard des États-Unis et d’Israël, comme en témoigne le comportement de l’ancien ministre socialiste de l’Intérieur, Manuel Valls, cet ancien pro palestinien, désormais « lié de manière éternelle à Israël » du fait de son mariage avec une française de confession juive, obéissant, sans piper mot, aux oukases de Hillary Clinton, à l’époque secrétaire d’état des États-Unis, conduisant ce transfuge socialiste de s’abstenir d’émettre une obligation de quitter le territoire français, la fameuse OQTF, très prisée de nos jours par ses successeurs.
Une servilité doublée d’une tétanie du débat public français du fait de la collaboration vichyste avec le nazisme qui obère la raison et obstrue la vue.
Au terme de la mandature macronienne, Manuel Valls, le renégat socialiste, rejoindra sans délai les poubelles de l’histoire, frappé du sceau de l’infamie affligé de la stigmate indélébile de la souillure morale absolue, quand Georges Ibrahim Abdallah sera propulsé à la stature d’Icône vivante du combat politique1.
De défaite en défaite, le peuple palestinien, de déboires judiciaires en déboires judiciaires, Georges Ibrahim Abdallah, iront à la victoire finale, pour reprendre le mot d’ordre révolutionnaire du dirigeant chinois Mao Tsé Toung, un connaisseur, « de défaite en défaite jusqu’à la victoire finale ».
Longue vie au peuple palestinien quelque soit l’issue de son combat.
Longue vie à Georges Ibrahim Abdallah quelque soit l’issue de sa bataille judiciaire.
Et que dans la mémoire des peuples en lutte leur exemple vivent éternellement.
René Naba
Cet article est publié dans le cadre de notre partenariat avec Madanïya info.
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Notes:
- Message de George
Ce n’est qu’ensemble, et seulement ensemble, que les prolétaires et les diverses composantes des masses populaires, peuvent endiguer et conjurer la montée en puissance des tous les processus de fascisation en cours… Encourageons, toujours plus camarades, les divers processus de convergence des luttes aussi bien au niveau local qu’au niveau régional et à plus forte raison au niveau international. Que mille initiatives solidaires fleurissent en faveur de la Palestine et sa prometteuse Résistance ! La solidarité, toute la solidarité, avec les résistants dans les geôles sionistes, et dans les cellules d’isolement au Maroc, en Turquie, en Grèce et aux Philippines et ailleurs de par le monde ! Le capitalisme n’est plus que barbarie, honneur à tous ceux et celles qui s’y opposent dans la diversité de leurs expressions ! Ensemble Camarades, et ce n’est qu’ensemble que nous vaincrons ! A vous tous Camarades et Ami.es mes salutations communistes.