Pour la première fois, les États membres de l’Union européenne ont décidé à l’unanimité d’activer la directive 2001/55/CE pour les déplacés « éligibles ». Toutefois, toute personne fuyant la guerre est autorisée à transiter dans l’Union européenne le temps de retourner dans son pays ou de demander l’asile.


 

La directive 2001/55/CE du 20 juillet 2001 offre une protection temporaire immédiate et collective (sans examiner chaque demande individuellement) à des personnes déplacées qui ne peuvent pas rejoindre leur pays d’origine pour une période initiale d’un an qui peut être prolongée jusqu’à 3 ans. Cette protection peut prendre fin « si la situation en Ukraine  permet un retour sûr et durable ».

Les personnes éligibles pourront obtenir un permis de séjour, travailler, disposer d’un hébergement, recevoir une aide sociale lorsqu’ils ne disposent pas de ressources suffisantes, avoir accès à des soins médicaux, à l’éducation et à la formation professionnelle.

Selon le communiqué de presse du Conseil de l’Union européenne du 4 mars 2022, « les ressortissants ukrainiens, ainsi que les ressortissants de pays tiers ou les apatrides bénéficiant de la protection internationale en Ukraine et les membres de leurs familles bénéficieront de la protection temporaire s’ils résidaient en Ukraine le 24 février 2022 ou avant ce jour.

Pour les ressortissants de pays tiers résidant en Ukraine le 24 février ou avant ce jour qui détiennent un permis de séjour permanent et ne peuvent pas retourner en toute sécurité dans leur pays d’origine, les États membres appliquent soit une protection temporaire, soit une protection adéquate en vertu de leur droit national.

Les États membres peuvent également appliquer cette décision à d’autres personnes, y compris tout ressortissant de pays tiers résidant légalement en Ukraine et qui n’est pas en mesure de retourner en toute sécurité dans son pays d’origine, ainsi qu’aux Ukrainiens qui ont fui peu de temps avant le 24 février ou qui se trouvaient sur le territoire de l’UE juste avant cette date, par exemple pour des vacances ou pour leur travail. »

Certaines personnes sont donc exclues du dispositif, sauf décision contraire d’un État membre comme le précise Amnesty International :
– Les personnes avec une résidence permanente en Ukraine, mais qui peuvent retourner de façon durable et sans danger dans leur pays ou région d’origine, même si elles n’y ont pas vécu depuis des années ;
– Les personnes qui étaient en Ukraine de façon non permanente, en demande d’asile, qui n’ont pas encore été reconnues réfugiées, les étudiants, les travailleurs migrants ;
– Les personnes en situation irrégulière en Ukraine.

Toutefois, ces personnes sont autorisées à transiter dans l’Union européenne le temps de retourner dans leur pays ou de demander l’asile, indique l’organisation des droits de l’Homme.

« La protection temporaire n’est pas une reconnaissance du droit d’asile au sens de la Convention de Genève, mais permet aux personnes éligibles d’obtenir un statut légal rapidement, et des droits similaires aux personnes réfugiées. […] Rien n’empêche les personnes fuyant l’Ukraine de faire une demande d’asile dans le cadre habituel. », précise-t-elle.

La directive 2001/55/CE du 20 juillet 2001 a été créée en 2001, au lendemain du conflit en ex-Yougoslavie alors que l’Europe était confrontée pour la première fois à un afflux important de réfugiés. Jusque-là, toutes les demandes d’activation de cette procédure lors de crises majeures comme celle d’Afghanistan ou de Syrie avaient été refusées.

« Nous nous réjouissons que les Ukrainiens soient rapidement protégés. […] En limitant cette aide principalement aux Ukrainiens fuyant le conflit, le Conseil a également montré les limites de la solidarité européenne. Il revient maintenant aux États membres de décider s’ils vont étendre ces mesures à d’autres personnes fuyant l’Ukraine. […] Le fait que cela se produise pour la première fois, mais principalement pour les ressortissants ukrainiens déplacés, montre clairement qu’il existe deux poids deux mesures, souligne Amnesty International. Toute personne fuyant un conflit doit bénéficier d’une protection et d’une aide pour s’établir et doit être traité de la même manière, sans discrimination. »

Sasha Verlei

 

Sources : Amnesty International et communiqué du Conseil de l’Union européenne

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Sasha Verlei journaliste
Journaliste, Sasha Verlei a de ce métier une vision à la Camus, « un engagement marqué par une passion pour la liberté et la justice ». D’une famille majoritairement composée de femmes libres, engagées et tolérantes, d’un grand-père de gauche, résistant, appelé dès 1944 à contribuer au gouvernement transitoire, également influencée par le parcours atypique de son père, elle a été imprégnée de ces valeurs depuis sa plus tendre enfance. Sa plume se lève, témoin et exutoire d’un vécu, certes, mais surtout, elle est l’outil de son combat pour dénoncer les injustices au sein de notre société sans jamais perdre de vue que le respect de la vie et de l’humain sont l’essentiel.