Bruxelles devrait accorder au nucléaire et au gaz le label d’énergie de transition, à l’issue de négociations en faux-semblants avec Paris et Berlin, analyse Le Monde.


 

Le nucléaire pour combattre le changement climatique ?

« À l’heure où les Européens ont décidé d’atteindre la neutralité carbone en 2050 conformément à l’accord de Paris, où la dépendance au gaz russe inquiète de plus en plus, et où les prix de l’énergie flambent, il s’agit là d’un enjeu crucial », affirme le quotidien du soir français.

La conjonction de la flambée des prix de l’énergie et de l’impératif de réduire les émissions propulse le nucléaire sur le devant de la scène, pas seulement en France. Pour Business Insider Polska, le compromis qui se dessine sur la classification européenne des différentes énergies est un pas important pour les investissements privés dans le nucléaire.

Face à cette nouvelle donne, poussé par les lobbyistes des secteurs du nucléaire et du gaz qui veulent financer leurs futurs investissements, Bruxelles se demande si les centrales nucléaires peuvent être considérées comme des sources d’énergie durables.

« Les revendications des uns et des autres ne peuvent être satisfaites que partiellement si l’on veut se mettre d’accord sur un programme », affirme le journal libéral finnois Ilta-Sanomat, « selon des rapports qui ont fuité, la solution pourrait être un compromis qui considère le nucléaire et le gaz naturel comme des énergies écologiques. Un compromis qui édulcorerait les promesses écologiques de l’UE, puisque ces deux technologies ne sont pas aussi propres, et encore moins durables, que l’éolien ou le solaire ».

Pour la Deutschlandfunk1, la construction de centrales nucléaires ne saurait être une issue à la crise climatique : « Premièrement, parce qu’il faut agir très vite. Si l’on veut respecter les objectifs climatiques de l’accord de Paris, la sortie du charbon doit se faire d’ici 2030 dans les pays industrialisés, et peu de temps après dans les pays en développement. La construction de réacteurs nucléaires demande des années, voire, souvent, des décennies. Et les nouveaux réacteurs de petite taille, tels que ceux proposés par Bill Gates et Emmanuel Macron, n’existent pour l’heure qu’en théorie. Et d’ici à ce que le projet se concrétise, de l’eau passera sous les ponts. Deuxièmement, les centrales nucléaires sont bien trop chères. Elles ne peuvent concurrencer les éoliennes et le solaire que si elles sont énormément subventionnées. »

La militante environnementaliste Greta Thunberg a elle aussi fait part de sa consternation dans une lettre ouverte publiée par le site d’information européen Euractiv : « Alors que les militants pour le climat s’étaient battus pour s’assurer que [la labellisation] ouvrirait la voie à des vraies actions en faveur du climat, les “dirigeants” se sont mis en quatre pour qualifier les énergies nucléaire et fossile de “durables”, bien qu’elles ne soient ni vertes ni durables. Cela pourrait aboutir à un véritable cauchemar climatique », tonne la jeune Suédoise.

La Commission européenne devait finaliser sa proposition le 30 décembre afin de la soumettre (pour simple avis), comme le veut la procédure, à un groupe d’experts. Et, si tout se passe comme prévu, la Commission présentera son projet le 18 janvier.

Avec de fortes chances pour que les intérêts du secteur nucléaire soient préservés en dépit du bon sens et de l’avenir.

Notes:

  1. Station de radio publique allemande