En Grèce, l’entreprise de livraison de plats cuisinés efood entendait licencier 115 livreurs si ceux-ci refusaient de renoncer à leur contrat salarié pour travailler en tant qu’indépendants. Mais les livreurs se sont mobilisés et ont bénéficié d’un soutien populaire : des milliers de clients ont désinstallé l’application efood de leur smartphone ces dernières semaines pour faire pression sur l’entreprise. Face à la fronde, celle-ci a cédé et promis des CDI à plus de 2 000 de ses livreurs.

« Les employés d’efood ont décroché une double-victoire : d’une part, ils ont obtenu des contrats à durée indéterminée ; de l’autre, leur succès se répercute sur l’ensemble de la société qui s’identifie très largement à eux… des milliers de travailleurs dans tout le pays les ont soutenus car la plupart d’entre eux sont confrontés quotidiennement à des conditions de travail similaires », commente le portail d’information grec Documento.

Partout en Europe les législations évoluent pour réglementer les conditions de travail de ce secteur d’activité qui concerne essentiellement les jeunes.

Depuis le mois de février, les 70 000 chauffeurs Uber britanniques accèdent au salaire minimum et aux congés payés, droits réservés jusque-là aux salariés. Uber est contraint  par une décision de justice. La Cour suprême britannique a estimé que les chauffeurs pouvaient être considérés comme des “workers” (travailleurs) et donc bénéficier de droits sociaux. Dans la loi britannique, il s’agit d’un statut entre celui d’indépendant et celui d’employé salarié, qui bénéficie d’un contrat de travail en bonne et due forme.

En Espagne, jusqu’à présent, les coursiers travaillaient comme pseudo-travailleurs indépendants, mais une loi adoptée en mai oblige désormais les services de livraison comme Deliveroo, Glovo ou Uber Eats à salarier tous leurs livreurs. Elle est entrée en vigueur le 12 août.

Et dans l’Hexagone ? Pour l’heure dans notre “start-up nation”, aucune décision judiciaire n’a fait jurisprudence pour modifier les statuts de tous les livreurs et chauffeurs, mais des réformes sont en cours. Combien de temps les plateformes de VTC (conducteur de voiture avec chauffeur) et de livraison de repas pourront-elles encore profiter des avantages du statut d’autoentrepreneur des chauffeurs et livreurs qui travaillent pour elles ? La question se pose car la pratique est de plus en plus remise en cause en Europe. À la CGT, on s’inquiète d’un troisième statut qui permettrait aux plateformes de salarier ses travailleurs en leur supprimant certains droits, comme les congés payés par exemple.

Dans une démocratie comme la nôtre, la soi-disant nouvelle économie ne devrait pas se développer en faisant fi des droits du travail. À l’instar des citoyens grecs, les bénéficiaires de ce type de service ont certainement une carte à jouer pour le faire comprendre aux entreprises de livraison et au gouvernement…

JMDH

 

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Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.