Commémoration Nakba Marseille 15.05.2021
Photo NP altermidi DR

À Montpellier, à Toulouse comme dans d’autres grandes villes en France, la commémoration de la Nakba s’est muée en colère contre Israël et ses frappes meurtrières contre la population civile. À Marseille, plusieurs milliers de personnes sont venues apporter leur soutien et leur amitié aux Palestiniens le samedi 15 mai.


 

« Israël assassin », « Gaza ! Gaza ! Marseille est avec toi » : la place Bargemon, toute proche de l’Hôtel de ville central, est envahie par les slogans, les banderoles et toutes sortes de drapeaux. Palestinien, évidement, mais aussi des syndicats et des partis politiques — surtout la FI et Lutte Ouvrière. Initialement prévu pour commémorer le 73e anniversaire de la Nakba, le rassemblement appelé par le Collectif Palestine en Résistances s’est transformé, sous le poids de l’émotion, mais aussi de la colère, en une manifestation pour dénoncer le pilonnage terrestre et les bombardements aériens massifs sur la Bande de Gaza, la poursuite de l’épuration ethnique autour de Jérusalem, et les attaques contre la Mosquée Al Aqsa.

À Marseille, comme dans d’autres villes, les manifestations n’étaient pas autorisées, seuls les rassemblements l’étaient. La décision d’interdire les manifestations sous prétexte de « troubles à l’ordre public » a du mal à passer. « Vous ne pouvez pas nous réduire au silence », « Israël coupable, Macron complice », peut-on lire sur certaines pancartes.

 

Commémoration Nakba Marseille 15.05.2021
Rassemblement sur la Place Bargemon, parcours interdit en ville. Photo NP altermidi DR

 

Si la foule était dense, on a pu noter qu’il y avait énormément de jeunes. Comme Nadia, de l’UD CGT de Haute-Garonne : « Toute une génération est entrée dans la réflexion en politique, dans le militantisme, par la cause palestinienne. Human Rights Watch a récemment qualifié ce qui se passe dans ce pays comme étant de l’apartheid. C’est sans doute pour bien faire comprendre ce qui est fait envers les Palestiniens, et pour dénoncer la permanence de cette politique ».

L’arrestation complètement surréaliste, du président de l’Association France Palestine Solidarité (AFPS) Bertrand Heilbronn, prouve qu’un nouveau pas a été franchi dans la volonté politique d’empêcher tout soutien à la cause palestinienne. En effet, alors qu’il sortait d’une réunion au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères — où il avait été reçu par un conseiller du Ministre au sein d’une délégation comprenant des parlementaires, des représentants associatifs et syndicaux —, il a été interpellé par les mêmes policiers qui l’avaient accompagné jusqu’au lieu du rendez-vous, selon l’AFPS. « Quel est ce pouvoir qui cueille à la sortie d’un ministère le président d’une association défendant le droit et les droits humains, juste après l’avoir reçu, lui signifie sa garde à vue, le menotte à un banc à son arrivée au commissariat ? », interroge l’association.

Pour Pierre Stambul, co-président bien connu de l’Union juive française pour la paix, l’UJFP, « la politique étrangère est abominable en France ». Elle s’est, selon lui, considérablement dégradée ces dernières années : « C’est une politique alignée sur l’impérialisme, la Françafrique, avec des ventes d’armes aux pires régimes autoritaires, non recommandables, tandis que dans le même temps on s’en prend aux pays comme le Vénézuela. Le soutien au sionisme est affirmé avec de plus en plus de force, jusqu’à interdire des manifestations. »

Pierre Stambul, président de l’UJFP. Photo NP altermidi DR

 

 

Nous devons unir toutes nos forces contre l’apartheid en Israël. La seule solution pour les Juifs, c’est de renouer avec leur histoire. On les force à être complices de crimes qui les amènent dans le mur.

 

 

 

 

La rhétorique, orchestrée ces derniers mois par certains élus, pseudo intellectuels ou « éditorialistes » plus idéologues que « commentateurs », qui visent à faire croire qu’antisionisme et antisémitisme sont équivalents, est assez nauséabonde, et surtout très dangereuse. « Il y a une bataille idéologique à mener, même si c’est compliqué. Nous devons unir toutes nos forces contre l’apartheid en Israël. La seule solution pour les Juifs, c’est de renouer avec leur histoire. On les force à être complices de crimes qui les amènent dans le mur, au sens propre du terme », poursuit Pierre Stambul.

La situation ne semble pourtant pas près de s’arranger, si l’on en croit ce fin observateur et connaisseur d’Israël : « Pour l’instant, l’alternative à Netanyahu, c’est l’extrême droite, ceux qui prônent l’interdiction de l’esplanade des Mosquées, l’expulsion des Arabes  palestiniens de leurs quartiers historiques et de Jérusalem-Est, ceux qui crient « Mort aux Arabes » ».

Le 15 mai 1948, au lendemain de la déclaration de l’État d’Israël, des centaines de milliers de Palestiniens furent « déplacés » de force vers des camps de réfugiés en Cisjordanie, Syrie, Jordanie, Liban ou  dans la Bande de Gaza : c’est la Nakba, cet énorme exode considéré comme la « grande catastrophe » ou le « désastre ». 700 000 à 800 000 personnes ont ainsi été expulsées manu militari entre 1948 et 1949, certains historiens considérant qu’il s’agit d’un nettoyage ethnique.

 

Commémoration Nakba Marseille 15.05.2021
Photo NP altermidi DR

 

« Pas de crimes en notre nom »

Les Arabes palestiniens qui ont pu cependant rester en Israël sont aujourd’hui la cible de l’extrême droite qui a décidé de les pourchasser, notamment dans le quartier de Sheikh Jarrah, à  Jérusalem-Est. De fait, 73 ans après, la Nakba n’en finit plus de provoquer des souffrances. « Ils ont fragmenté le pays, et maintenant, ils attaquent toutes les composantes. Tout le monde est agressé, déplore Pierre Stambul, nous demandons l’arrêt immédiat de l’agression, et une motion des Nations Unies pour condamner ces attaques hostiles. »

« Nous exigeons des autorités françaises qu’elles agissent, autrement que par la langue de bois diplomatique, afin d’imposer dans le cadre de l’Union Européenne et des Nations Unies, le respect du droit international, en particulier des Conventions de Genève et des Résolutions des Nations Unies par les autorités israéliennes, ou si cela s’avérait impossible qu’elles prennent les sanctions adéquates. 73 ans de violations du droit international cela suffit ! Justice pour le peuple palestinien ! », communique pour sa part le collectif Palestine en Résistances. « Pas de crimes en notre nom », conclut Pierre Stambul.

Nathalie Pioch

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Reprend des études à chaque licenciement économique, ce qui lui a permis d'obtenir une Licence en Histoire de l'art et archéologie, puis un Master en administration de projets et équipements culturels. Passionnée par l'art roman et les beautés de l'Italie, elle garde aussi une tendresse particulière pour ses racines languedociennes.