La Maison des Jeunes et de la Culture de Martigues (Bouches-du-Rhône) s’interroge sur ce qui est considéré comme « non essentiel » par le gouvernement et sur « l’injonction d’adaptation » en ces temps de mise à l’arrêt des secteurs de la culture et de l’Éducation populaire.


 

Dans le contexte que nous subissons et les mesures sanitaires et sécuritaires qui nous sont imposées, des questions se posent au monde associatif, et plus particulièrement aux associations d’éducation populaire comme l’est notre MJC.

Le gouvernement déclare que nos activités associatives ne sont pas essentielles, oblige à la fermeture de nos lieux, mais sur quels critères ?

Ce pouvoir de définir ce qui relève de l’essentiel de la part de nos dirigeant.es est préoccupant. Car qu’est-ce qu’une association ? La réunion d’au moins 2 personnes dans un but commun autre que celui de partager des bénéfices, article 1 de la Loi 1901. Ainsi, des citoyen.nes regroupés déterminent le caractère essentiel à la vie sociale de leur activité, à un endroit où l’État manque.

La liberté d’association est un droit fondamental reconnu par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 : « Toute personne a droit à la liberté de réunion et d’association pacifiques. »

Une association d’éducation populaire est un espace collectif qui développe nos capacités à comprendre le monde pour pouvoir le transformer.

En déclarant nos activités non essentielles, le gouvernement méprise celles et ceux qui ont créé ces associations, qui les font vivre, qui les animent, qui y adhèrent et qui considèrent que le lien social est essentiel dans notre société si discriminante, où le profit est roi.

Supprimer certains lieux d’éducation populaire (les associations), mais en maintenir d’autres plus politiquement corrects (comme des organes de presse qui assument aujourd’hui pleinement leur inféodation politicienne) pose, au-delà de la cohérence des mesures, un réel problème de démocratie.

 

« L’injonction d’adaptation »

 

Et à la MJC, que faire ? Face à l’injonction d’adaptation rapide toujours plus présente, il nous semble nécessaire de ralentir et de réfléchir à ce que ce mot induit dorénavant. Pourquoi s’adapter ? À quoi ? Et pour qui ?

Pour notre MJC, s’adapter signifie remettre en question ce qu’elle est fondamentalement : un lieu de rencontres physiques, d’activités collectives, de partage de connaissances et de moments de vie qui permettent d’agir sur le monde.

Les outils ne sont pas neutres : les cours et réunions en visioconférences induisent l’utilisation d’écrans, de logiciels, de technologies qui ne sont pas accessibles à toutes et à tous. Cela confirme la mainmise sur nos vies et nos relations des entreprises qui ont intérêt à développer ces matériels. Cela encourage un changement d’organisation sociale que nous n’avons pas choisi, même pas discuté.

Comment utiliser ces outils tout en gardant notre âme ? Et, jusqu’où irons-nous ?

Jusqu’à nous passer des visages pour entrer en relation ? Jusqu’à remplacer nos présences par des images numériques, des hologrammes ? Quelles conséquences pour notre humanité ?

Quelle société se dessine là, grâce à nos comportements complices ?

Le pouvoir est détenu par celles et ceux qui déterminent ce qui est essentiel. Aujourd’hui, nous sommes considérés comme des mineurs irresponsables. Entravés dans nos libertés. Sommés de justifier nos déplacements avec les mots d’ordre d’un formulaire administratif.

Pouvons-nous encore discuter des choix de société faits en notre nom ? Et reste-t-il des espaces qui le permettent ?

L’équipe de la MJC de Martigues

 

Photo DR: MJC Martigues