À Montpellier, le Centre International de Musique Médiévale – Du ciel aux marges (CIMM) s’attache à faire découvrir cette période artistique méconnue en la renseignant grâce aux recherches universitaires, et en la valorisant par des résidences artistiques ponctuées de concerts. Il est l’instigateur du festival Les Marteaux de Gellone qui se tient chaque année au printemps à Saint-Guilhem-le-Désert.


 

La diffusion de la musique médiévale reste encore très confidentielle en France, notamment au regard de l’engouement pour la période baroque qui a pris une ampleur considérable ces dernières années.

Le Centre d’Études Médiévales de Montpellier (CEMM) de l’université Paul-Valéry s’appuie sur une équipe pluridisciplinaire pour décrypter le monde médiéval par la littérature, les arts, dont bien sûr la musique. C’est au sein de cette unité de recherches qu’évolue Gisèle Clément, spécialiste du chant liturgique occidental, notamment les rites processionnaux et le motet1 du XIII-XIVe siècle. Pour faire sortir ce répertoire de son aspect confidentiel et pour valoriser les recherches, elle a fondé le Centre International de Musique Médiévale- Du ciel aux marges. L’objectif étant de promouvoir cet art, d’une part par la pratique en organisant des formations et des résidences artistiques, d’autre part par des concerts et un festival. Avec une volonté de « dépoussiérer » la musique médiévale en la propulsant comme une musique vivante par l’approche anthropologique et historique.

Un des axes du CIMM est d’ailleurs l’archéo-lutherie. Il existe très peu d’instruments de cette période ou alors de façon très fragmentaire ; il faut donc s’appuyer sur les ressources iconographiques que sont les sculptures, les peintures et fresques. Comme les délicats chapiteaux de l’abbaye de Cluny III (vers 1090) représentant « Les tons dans la musique », le tympan du portail de l’abbatiale Saint-Pierre de Moissac (1130) 2 ou les fresques du Campo santo (cimetière médiéval) de Pise peintes par Buffalmaco au XIVe siècle. Des luthiers spécialisés ont ainsi pu restituer des instruments anciens tels que des vielles à archet, la harpe de Guilhem VII ou la guiterne de l’ange d’Elne (d’après une peinture sur l’armoire liturgique située dans la cathédrale de la commune).

Toutes ces recherches, résidences, ateliers, formations concourent à un objectif : essayer de comprendre comment se jouait et se chantait cette musique pour en faire un spectacle actuel. Il convient de se départir de l’idée que la musique médiévale est essentiellement religieuse. Certes, elle est apparue à l’époque paléochrétienne pour accompagner par la monodie (chant à une seule voix) les moines durant leurs cérémonies ; au plain-chant (musique vocale) religieux originel vont peu à peu s’ajouter des instruments et des voix pour se diriger vers une ébauche de polyphonie. Mais dans le même temps, la musique profane va se répandre grâce aux trouvères et aux troubadours dont nombre de compositions nous sont parvenues. C’est l’époque de l’amour courtois et de l’esprit chevaleresque, des musiciens qui sont particulièrement appréciés à la cour des comtes de Toulouse.

Ainsi, le CIMM propose une série de concerts d’automne, à Montpellier, pour présenter les différents aspects de la musique ancienne. Et pour apprécier cet art, quoi de mieux que le remarquable site de Saint-Guilhem où se déroulera au printemps le festival Les marteaux de Gellone ?

Nathalie Pioch

 

Les rendez-vous Langues d’automne sont une série de concerts du festival de Saint-Guilhem annulés en raison de la Covid-19. Ils se tiendront tous à la Maison des chœurs de Montpellier.

 

  • Jeudi 5 novembre à 19h30

Brice Duisit, voix et luth du Xe siècle : Hosannah ! Des fleurs et du miel, la poésie lyrique latine à l’époque romane.

  • Jeudi 12 novembre à 19h30

Ensemble Micrologus (dir. Patrizia Bovi) : Donna, posso io sperare ? : ballades d’amour et madrigaux de Nicolò à Florence au XIVe siècle.

Musica Mundana, ensemble-école promotion 2020 : Goldmund, ou le lys entre les épines.

  • Jeudi 18 novembre à 19h30

Brice Duisit (voix, vièle à archet, direction artistique) , Olivier Féraud (vièle à archet, rebab, luth), et Clément Gauthier (voix, tambourin à cordes) : Ladoncs chantatz, amics !, joute poétique et chant improvisé sur des textes et musiques des troubadours.

 

Nb / Le concert de l’Ensemble Ballata (dir. Baptiste Chopin) : Gorgones et dragons – Résonances d’un Moyen-Âge fantastique et fantasmé, programmé le jeudi 22 octobre est annulé en raison de la situation sanitaire.

Le site du CIMM

 

 

 

Notes:

  1. Le motet est une forme musicale vocale à cappella ou accompagnée dont les paroles sont religieuses et profanes, bien souvent les deux à la fois, car le symbolisme du Moyen-Âge superpose aux différentes voix des textes indépendants les uns des autres.
  2. détail du tympan de Moissac : les 24 vieillards de l’Apocalypse tenant une vièle dans leur main
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Reprend des études à chaque licenciement économique, ce qui lui a permis d'obtenir une Licence en Histoire de l'art et archéologie, puis un Master en administration de projets et équipements culturels. Passionnée par l'art roman et les beautés de l'Italie, elle garde aussi une tendresse particulière pour ses racines languedociennes.