Nouveau Premier ministre en remplacement d’Édouard Philippe, Jean Castex suscite des réactions de tous les bords politiques. Quelques personnalités de droite le félicitent, et plusieurs voix déplorent dans cette nomination l’absence de tournant politique promis par Emmanuel Macron.


 

Les députés se préparaient, vendredi, à une longue journée de travail sur le projet de loi de finances rectificative, lorsque la démission du Premier ministre a tout arrêté.

Le flou sur le locataire de Matignon a été levé à 9h38 à l’Assemblée nationale, les travaux sont stoppés net à la suite à l’annonce de la démission du Premier ministre, Edouard Philippe, qui entraîne celle du gouvernement.  Édouard Philippe retourne au Havre, fraîchement réélu maire de la ville, et laisse sa place de Premier ministre à Jean Castex, le « Monsieur déconfinement » du gouvernement.

Le nouveau chef du gouvernement officiait en Occitanie, Maire de Prades (LR) depuis 2008 une petite ville de 6 000 habitants  dans les Pyrénées-Orientales. À la suite de la passation des pouvoirs à Matignon, le nouveau Premier ministre Jean Castex a dit espérer pouvoir annoncer la formation de son gouvernement avant lundi et prononcer son discours de politique générale « en milieu de semaine prochaine ». Catapulté  à Matignon par Emmanuel Macron, après qu’Édouard Philippe a remis sa démission. Le haut fonctionnaire dit « mesurer l’immensité de la tâche » qui l’attend, dans un communiqué mis en ligne sur le site de la ville de Prades, dont il est maire. 

À droite, cette nouvelle nomination à Matignon suscite des réactions contrastées. Jean Castex a démissionné du parti Les Républicains (LR) dans une lettre reçue vendredi matin par le parti, a-t-on appris auprès du parti.

Jean Castex n’est « pas identifié comme de droite » auprès du grand public et il « n’a jamais exercé de responsabilités » mais « de fait, à partir du moment où il s’inscrit dans la politique menée par Emmanuel Macron, bien évidemment il n’est plus aux Républicains », a réagi dès vendredi matin Christian Jacob, président de LR. Selon lui, « on pouvait attendre un virage politique, mais c’est technocratique » avec un homme « retenu pour gérer les affaires courantes ».

Xavier Bertrand a quant à lui loué « les qualités de serviteur de l’État de Jean Castex ». Et le président de la Région Hauts-de-France précise : « Elles seront indispensables dans les moments difficiles que nous allons connaître… ».

Valérie Pécresse a félicité, dans un tweet, Jean Castex pour sa nomination. « Souhaitons qu’elle traduise un virage politique d’Emmanuel Macron vers plus de fermeté, de lutte contre les fractures et de décentralisation », poursuit la présidente de la Région Île-de-France.

Attitude plus mesurée pour Stéphane Troussel (Parti socialiste), qui loue, certes, la « capacité » de Jean Castex « à entretenir des bonnes relations personnelles, mettre les sujets sur la table en toute clarté », ou encore à « assumer les clivages ». Mais « son rôle de Premier ministre change la donne », estime le président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis pour qui Emmanuel Macron « a impulsé une politique et de droite et de droite » depuis le début de son quinquennat.

« La droite succède à la droite »

Une nomination « de droite », c’est d’ailleurs le maître-mot dans la plupart des réactions politiques à gauche. Pour Olivier Faure, patron du PS, « le Président de la République confirme sans surprise son cap. Le jour d’après sera de droite comme le jour d’avant ». Le porte-parole du PS, Boris Vallaud, est sur la même ligne, estimant sur Twitter que « la droite succède à la droite ».

Manon Aubry (eurodéputée La France insoumise) déplore, quant à elle, que « tout change pour que rien ne change » avec la nomination de Jean Castex « pour mener la même politique anti-sociale et anti-écologique ».

On n’en pense pas moins du nouveau Premier ministre à EELV, où le numéro un du parti écologiste, Julien Bayou, pointe du doigt la « fin d’un faux suspense » : « À un homme de droite succède un homme de droite, qu’on a jamais entendu sur l’écologie ».

« Ce qu’attendent les citoyens, c’est un grand virage sur l’écologie et la solidarité », estime Matthieu Orphelin, député du groupe Écologie Démocratie Solidarité, sur BFM TV. « Ce n’est pas les thèmes sur lesquels on attend le plus Jean Castex ».

« Le président veut gouverner seul »

Enfin, l’arrivée de Jean Castex à Matignon est perçue par plusieurs personnalités politiques comme une manœuvre d’Emmanuel Macron en vue de l’élection présidentielle 2022. Jean-Christophe Lagarde (UDI), y voit « un message clair » : « Le Président veut gouverner seul et en direct pour préparer la présidentielle. Ça ne fait pas trop réinvention, mais plutôt déjà-vu », estime le patron de l’UDI.

Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, estime sur Twitter qu’« en nommant Jean Castex à Matignon, Emmanuel Macron supprime de fait la fonction institutionnelle et politique du Premier Ministre et s’accapare tous les pouvoirs ».

Une ligne que défend aussi sur Twitter Éric Ciotti, pour qui « Emmanuel Macron dissout Matignon. Menacé par la popularité d’Édouard Philippe, il dérive désormais de plus en plus vers un pouvoir totalement personnel et autoritaire », estime le député LR.

Avec AFP