Se réinstaller, revivre dans les décombres, sous blocus total, dans la peur et l’angoisse de l’avenir. Depuis une semaine maintenant, le blocus est total avec le blocage de l’entrée de l’aide humanitaire. Et des informations les plus folles et terrifiantes continuent de circuler à Gaza.
Heureusement que la solidarité mise en place fonctionne, continue, s’adapte aux nouvelles conditions et persiste à soutenir la vie quotidienne des gazaoui.e.s là où elle le peut. Au milieu de cette détresse, l’action solidaire est le dernier espoir qui reste aux habitant.e.s de Gaza. Les équipes de l’UJFP travaillent sans relâche pour atténuer la souffrance des familles, en particulier celles des agriculteurs qui ont perdu leur unique source de revenus. Chaque fin de semaine Abu Amir en rend compte scrupuleusement et concrètement.
Mais comme Abu Amir le souligne dans ses textes cette semaine :
« La souffrance ne se limite pas à la faim et à la pauvreté ; elle s’étend également à la dimension psychologique. Les habitants de Gaza vivent sous une pression écrasante en raison des menaces continues du gouvernement israélien. Entre les déclarations de responsables israéliens évoquant la volonté de « faire mourir de faim la bande de Gaza » et les menaces d’une nouvelle invasion, la population vit dans une angoisse perpétuelle, prise au piège dans un cycle sans fin de souffrances et d’oppression. Chaque jour apporte son lot de craintes et d’incertitudes, non seulement à cause des conditions de vie insupportables, mais aussi en raison du discours raciste et extrémiste adopté par le gouvernement de Netanyahou, qui prône ouvertement l’anéantissement de Gaza et de ses habitants. Les déclarations des ministres israéliens sont devenues plus radicales que jamais, traitant les Palestiniens comme de simples chiffres sans valeur, et parlant de la bande de Gaza avec un langage de destruction totale et d’extermination. »
Pendant la manifestation monstre du 8 Mars à Montpellier, comme dans toutes les villes de France, Abu Amir nous a envoyé un texte sur le plan israélien ; une douche froide à regarder en face pour organiser la résistance !
« Des sources de sécurité israéliennes ont révélé que Tel-Aviv a mis en place un nouveau plan visant à déplacer la population de la bande de Gaza par des moyens qualifiés de “doux”, afin d’éviter les accusations internationales de crimes de guerre liés au déplacement forcé. Selon le journal Israel Hayom1, le gouvernement israélien travaille à faciliter le départ de milliers de Palestiniens de la bande de Gaza chaque jour par trois principaux itinéraires : terrestre via le passage de Rafah, maritime via le port d’Ashdod et aérien via l’aéroport de Ramon. D’après le rapport, Israël cherche à permettre à environ 2 500 Palestiniens de quitter Gaza quotidiennement. Un mécanisme spécifique a été mis en place pour y parvenir, sous la supervision directe du ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant… Cependant, Israël poursuit ses efforts pour vider la bande de Gaza de sa population, insistant sur le fait qu’il est dans son intérêt de faciliter le départ du plus grand nombre possible de Palestiniens… Les guerres successives contre Gaza, la plus récente ayant éclaté en octobre, ont rendu la vie quasiment impossible pour de nombreux habitants. Les bombardements incessants ont rasé des quartiers entiers et effacé du paysage des zones résidentielles, laissant des centaines de milliers de personnes sans abri. Des familles entières ont tout perdu : des maisons réduites en ruines, des commerces anéantis, des économies de toute une vie parties en fumée en quelques instants. Face à cette réalité, nombreux sont ceux qui envisagent de quitter Gaza, non par choix, mais pour échapper à une mort lente sous les bombes et la famine.
De plus, l’insécurité est omniprésente. Il n’existe plus de refuge sûr à Gaza, même les hôpitaux et les écoles, autrefois considérés comme des abris temporaires, ont été pris pour cible. La peur de voir leur propre vie ou celle de leurs proches anéantie à tout moment est devenue un état d’esprit permanent pour les habitants. Ce climat psychologique oppressant pousse de nombreuses personnes à considérer que rester à Gaza n’est plus une option viable, et que chercher une nouvelle vie ailleurs pourrait être la seule issue, même si cela signifie partir vers des destinations inconnues.
Tous ces facteurs — destructions massives, conditions de vie précaires, absence de perspectives d’avenir — jouent en faveur du plan israélien, qui semble miser sur le désespoir comme principal levier pour inciter les Palestiniens à partir “volontairement”. Ce n’est pas une simple crise passagère, mais une politique de longue date visant à vider Gaza de ses habitants et à en faire une terre sans peuple. Toutefois, la grande question demeure : les Palestiniens vont-ils céder à ces plans, ou parviendront-ils, malgré la souffrance et les épreuves, à s’accrocher à leur terre, quoi qu’il en coûte ? ».
En attendant et pour tenir bon, debout, vivant, les activités et actions matérielles pour organiser une vie meilleure continuent, persistent et signent la volonté d’un peuple à rester sur sa terre.
Les ateliers de soutien psychologique pour les femmes organisés par l’UJFP
Le premier atelier a eu lieu dans le camp Al-Israa, au centre de Gaza, avec la participation de 30 femmes. Il a mis l’accent sur l’importance du soutien psychologique pour les femmes en période post-conflit et sur leur rôle clé dans la gestion de la famille et de la société malgré les conditions extrêmes imposées par la situation actuelle.
Quant au deuxième atelier, il s’est déroulé dans le camp d’Al-Suwaidi, à Deir al-Balah, également en présence de 30 femmes. Cet atelier portait sur le renforcement de la santé mentale des femmes pendant le mois sacré du Ramadan, tout en leur fournissant des stratégies pratiques pour maintenir leur équilibre psychologique durant cette période exigeante. Le témoignage d’une des femmes :
« Au début de la guerre, je courais d’une maison à l’autre avec mes enfants. Il n’y avait nulle part où aller, nous fuyions simplement. Une nuit, je n’ai trouvé qu’un coin étroit parmi les ruines d’un immeuble détruit. J’ai serré mes enfants contre moi en priant pour que la nuit se passe sans drame. Cette nuit-là, j’ai compris que je devais être forte, que je devais être à la fois leur mère et leur père. Il n’y avait pas d’autre choix. Je veux vivre, non seulement pour mes enfants, mais aussi pour moi… Je veux être forte, non pas parce que j’y suis obligée, mais parce que je le mérite. »
La crise de l’eau, une lutte pour la survie
Parmi les nombreuses crises qui ravagent la bande de Gaza, celle de l’eau figure parmi les plus critiques, notamment dans la région d’Abu Taima, où les habitant.e.s et les agriculteurs souffrent d’une grave pénurie d’eau. L’interruption de l’approvisionnement a eu un impact direct sur la vie quotidienne des habitant.e.s et a paralysé l’activité agricole, aggravant ainsi une crise économique déjà profonde. Extrait du compte rendu d’Abu Amir :
« Dans un effort pour trouver des solutions durables, les équipes de l’UJFP ont récemment achevé la première phase d’un projet visant à résoudre la crise de l’eau à Abu Taima. Une citerne d’eau d’une capacité de 150 mètres cubes a été construite pour stocker et redistribuer l’eau aux habitants de la région, leur offrant ainsi une source d’approvisionnement vitale en ces temps de pénurie aiguë. D’ici la semaine prochaine, le projet sera pleinement opérationnel, permettant à des centaines de familles d’accéder à une ressource vitale dont elles ont été privées pendant trop longtemps. Les agriculteurs, contraints d’abandonner leurs terres par manque d’eau, pourront enfin les cultiver à nouveau, après des mois de désespoir et d’incertitude. »
Par ailleurs, la distribution alimentaire de repas équilibrés trois fois par semaine dans le camp des agriculteurs continue et continuera quoi qu’il arrive.
En fin de compte, aucun siège ne pourra briser la volonté d’un peuple qui croit en son droit à vivre dignement. Aucune privation, aucune oppression ne pourra effacer leurs rêves d’un avenir meilleur, quelles que soient les épreuves et les injustices auxquelles ils sont confrontés.
Brigitte Challande