Dans le cadre de la 46e édition du Cinemed, « Nos vies à la rue », un court métrage de 45 minutes, sortie en 2024, s’inscrit au sein de la sélection Regards d’Occitanie, qui met à l’honneur les productions et enjeux locaux. Réalisé en coproduction par le collectif Parlons clichés et les vidéastes sociaux Ziconophages, le film propose une immersion poignante dans le quotidien à Montpellier de plusieurs sans-abris, hommes et femmes, révélant leurs histoires singulières tout en soulignant leur identité commune.


 

Un documentaire participatif

La production audiovisuelle, portée par les Ziconophages, se présente comme un outil participatif et engagé, facilitant l’expression des sans-abri et leur permettant de revendiquer leur place dans la société. À la fois devant et derrière la caméra, acteurs de leurs récits, les sans-abri volontaires des ateliers Parlons Clichés témoignent également des expériences de leurs camarades, faisant la singularité de ce documentaire. Le documentaire propose des plans séquences caméra en main qui plonge le spectateur dans un parcours immersif. Ces témoignages touchants et authentiques font basculer dans la lumière ces vies souvent ignorées. Carole témoigne : «Les Ziconophages nous ont formés sur une semaine à l’utilisation du matériel. On a retenu ce qu’on a retenu, mais on l’a fait.»

Une immersion dans leur quotidien

Ce court-métrage est une occasion de suivre les pas et récits de ces nomades urbains. On y découvre leurs quotidiens bien remplis entre appels téléphoniques, recherches d’endroits où dormir, moyens de se nourrir, usages des transports, activités passe-temps, petits boulots, démarches administratives et associatives1. Dans un contexte où la gentrification et les politiques d’aménagement rendent la présence des sans-abri de plus en plus difficile, ce documentaire explore leurs choix, leurs craintes et aspirations. Il souligne également la réalité des centres d’accueil souvent saturés où beaucoup ne trouvent pas refuge, en particulier les femmes qui font face à un manque d’intimité, de considération et se sentent souvent en insécurité dans des espaces collectifs majoritairement masculins.

La première scène s’ouvre sur Patrick qui comme tous les matins appelle le 115 en vain : « il n’y a plus de places ». C’est à travers cette réalité qui en a poussé plus d’un à trouver de nouvelles stratégies de survie que le documentaire nous invite à suivre les récits et parcours de Guy qui a déménagé plusieurs fois sa tente, Rodney installé dans un bois, Sophie voyageuse dans les intercités régionaux, Ronan dormant sous les jeux pour enfants, Michel et ses chiens vivants sur un bout de terrain, Carole qui ne dort pas de nuit. Steph, quant à elle, retrouve après des années de vie à la rue celle en appartement. Elle évoque son sentiment de solitude et de cloisonnement ainsi qu’un retour à la norme difficile.

Ce projet collectif a offert à plusieurs participants la possibilité d’accéder à des opportunités au sein de diverses associations notamment en devenant membres actifs du Service intégré d’accueil et d’orientation (SIAO). Ces statuts qu’ils occupent aujourd’hui leur permettent de partager leurs expériences de vie dans la rue et de servir de porte-paroles auprès des autorités publiques et du numéro d’urgence social.

Nouvelle projection et rencontre

La prochaine séance « Des âmes et des ombres – Nos vies la rue », suivie d’une discussion avec l’équipe de tournage et les sans-abris qui ont acceptés de revenir témoigner, est prévue le 06 décembre 2024 à La Base, 15 rue Chaptal à Montpellier. Une belle occasion d’échanger avec eux et de profiter de leurs expériences et sagesses car il n’y a pas qu’une façon de vivre la rue et d’y être amené. Pouvons-nous porter un nouveau regard sur ces philosophes modernes quand la précarité est ou peut devenir aujourd’hui l’affaire de tous, indépendamment de l’âge, du genre et du parcours ?

Eva Royer

L’équipe de tournage accompagnée de certains sans-abris seront à La Base le 6 décembre

Notes:

  1. Les associations et ONG tels Le Siao34, la Bulle douche nomade, la Cloche, le Secours Catholique, Luttopia, le Samu social, Atd quart Monde, Entraide Sdf, Réduire les risques, Gammes Corus jouent un rôle clé dans leur accompagnement et socialisation.
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