Emmanuel Macron a été réélu hier avec 58,55 % des voix contre 41,45 % pour Marine Le Pen. Évidemment chacun peut se rassurer que l’extrême droite n’ait pas franchi les dernières marches lui ouvrant l’accès au pouvoir dans l’hexagone. Parmi les électeurs d’Emmanuel Macron, 42 % déclarent avoir voté pour lui avant tout pour faire barrage à Marine Le Pen.

Le taux d’abstention est de 28,01 %, selon les derniers chiffres du ministère de l’Intérieur. Un chiffre supérieur à celui de 2017 (25,44 %) où plus d’un Français sur quatre s’était abstenu mais aussi de toutes les dernières élections. Jamais une abstention aussi forte n’a été enregistrée au second tour d’une présidentielle, à l’exception du record de 1969, quand les électeurs de gauche avaient, à l’appel du candidat communiste éliminé au 1er tour, massivement refusé de choisir entre “bonnet blanc et blanc bonnet” (Georges Pompidou et Alain Poher).

 

36,6 % d’abstentions, votes blancs et nuls

Le vote blanc ou nul, bien supérieur au résultat du premier tour, représente 8,6 % des suffrages exprimés. L’abstention additionnée aux votes blancs ou nuls représentent 36,6 %, un record pour un second tour de l’élection présidentielle en France.

Devant la tour Eiffel, le nouveau président a immédiatement satisfait à la figure imposée en déclarant qu’il était le président de tous les Français. Tandis que ses lieutenants laissaient entendre sur les plateaux de télévision que le suffrage exprimé par les Français validait une adhésion à la feuille de route néo-libérale qu’il entend conduire quoi qu’il en coûte. Le président assurait sur la scène du Champ-de-Mars que sa politique « humaniste » allait répondre aux inquiétudes exprimées dans la rue.

Quelques heures après l’arrivée “disneyenne” du président et de la première dame au Champ-de-Mars entourés d’enfants sur fond de L’Hymne à la joie, des policiers ouvraient le feu en plein cœur de Paris faisant deux morts et un blessé. On ne connait pas encore les circonstances de cette intervention mais on ne peut qu’être interpellé par le contraste entre ces deux scènes. Le mythe d’un président qui marche apaisé et rassembleur tel qu’il a été scénarisé par les communicants du président s’ébrèche.

Faisons le vœu que pour les cinq années à venir notre président réalise qu’il n’incarne plus aux yeux des Français le mythe qui l’a porté au pouvoir, que fort de cette conscience, il essaie de contenir ses instincts, sa volonté de gouverner seul, et sa motivation pour la puissance.

La République étouffe, elle est en danger. Notre pays apparaît aujourd’hui bien mal adapté à l’intégration sociale, économique et aux enjeux environnementaux auxquels il doit faire face.

Entre démocratie d’opinion et démocratie institutionnelle, il est difficile et complexe de retrouver le chemin de la démocratie des citoyens qui fait notre force. Pour le découvrir, il faut savoir reconnaître l’espace public comme lieu de construction de la volonté commune. Emmanuel Macron reconnaît la libre communication des pensées et des opinions, il lui revient désormais de mettre en forme un espace de délibération plus riche dans la diversité et plus libre.

Jean-Marie Dinh

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Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.