La Journée internationale des migrant-e-s instaurée par l’O.N.U s’est tenue le 18 décembre. En France, des rassemblements étaient organisés dans de nombreuses villes. Illustration à Martigues, dans les Bouches-du-Rhône.
Des milliers de morts en Méditerranée en quelques années, une Europe « forteresse », des conditions de vie indignes dans des camps de fortune, une Grande-Bretagne qui a « sous-traité » sa frontière à la France… Et pourtant, « les migrations sont une réalité incontournable, la plupart sont motivées par des raisons économiques, des conflits, des persécutions, la répression politique », constate Georges Fournier, responsable de la Ligue des Droits de l’Homme, « s’y ajoutent, toujours plus nombreuses, les migrations climatiques ». Qui traverserait plusieurs pays d’Afrique au risque de subir des persécutions en Libye, qui paierait des passeurs avides, qui accosterait de nuit sur des côtes dont souvent il ne sait rien, qui s’exposerait aux brimades à la frontière franco-italienne, aux coups des policiers dans les Balkans, aux marches dans la neige des Alpes s’il s’agissait de faire du « tourisme social » comme certains osent le dire ?
« Les discours, les pratiques qui déshumanisent les réfugiés et les migrants ont contribué à faire percevoir ces personnes comme une menace », relève Sébastien d’Amnesty International. Et pour celles et ceux qui parviennent, malgré tout, à poser le pied sur une « terre d’accueil », ou prétendue telle, le voyage n’est pas terminé. « Pour les réfugiés, l’issue restera incertaine jusqu’à l’obtention d’une protection, beaucoup de gouvernements proclament que le droit d’asile est essentiel mais certains refoulent même des réfugiés vers des pays où leur vie est menacée », poursuit Sébastien.
En l’occurrence, la suspicion n’est pas l’apanage de l’extrême droite. Témoin cette phrase d’Emmanuel Macron relevée par l’ancienne députée européenne et actuelle vice-présidente de la Ligue des Droits de l’Homme, Marie-Christine Vergiat : « quand vous avez des femmes et des hommes par centaines de milliers chaque année (…) qui viennent de pays qui sont en paix avec lesquels nous entretenons des relations excellentes, à qui on donne des centaines de milliers de visas par an, ce n’est pas du droit d’asile à 90 %. Donc il y a un détournement »1
« Être vigilants face aux fausses certitudes »
En France, la notion de « pays sûr » peut servir à justifier le retour au pays d’origine, même si la personne expulsée a une toute autre perception de ce que peut être « un pays sûr ». Que l’accueil dans un pays européen ne soit que la toute première étape, les militants associatifs, syndicaux ou politiques qui agissent dans ce domaine ne le savent que trop.
Rassemblé-e-s localement devant le café associatif « Le Rallumeur d’étoiles », militants d’Amnesty, de la LDH, de France-Amérique latine, de la FSU et élues ont brandi une immense affiche portant cette inscription : « Liberté, égalité, papiers ». Devant ce lieu « où depuis plusieurs mois nous tenons des permanences d’accueil, nous faisons de l’accompagnement juridique pour les demandeurs d’asile », comme le précise Georges Fournier. « Indépendamment des manifestations de solidarité, des témoignages, l’action quotidienne permet à ces gens d’avoir un moment d’espoir, d’humanité avec un minimum de bienveillance. On n’ a pas besoin d’être des juristes professionnels, de tout savoir. La première chose est de savoir écouter, savoir être ensemble, ce qui n’est pas évident », poursuit-il. Pour ce responsable de la LDH, il faut être « vigilants face aux préjugés et aux fausses certitudes que l’on peut avoir ».
Le 18 décembre 2019, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, déclarait que « tous les migrants ont droit à une protection de tous leurs droits fondamentaux ». Il faudra bien d’autres 18 décembre pour que ces paroles s’incarnent malgré les replis identitaires et les actes de folie meurtrière.
Morgan G.
(Photo DR altermidi)