Dans un geste désespéré, un étudiant s’est immolé par le feu vendredi 8 novembre devant le CROUS du 7e arrondissement de Lyon. Le jeune homme, entre la vie et la mort, avait posté un message sur Facebook pour expliquer son geste «irréparable» : il n’arrivait plus à s’en sortir financièrement.
Le drame est survenu peu avant 15 heures dans le 7e arrondissement devant le bâtiment du Crous de Lyon. Prévenue de son geste par un SMS, la petite amie de la victime, a alerté les services de secours qui sont rapidement arrivés sur les lieux. «Brûlé à 90%», le jeune homme, a été traité sur place avant d’être transporté au Centre des brûlés à l’hôpital Edouard Herriot.
Juste avant de passer à l’acte, l’étudiant a publié un long message sur Facebook, rapporte Le Progrès. Dans ce texte, il évoque notamment ses difficultés financières et se revendique dans la lutte contre le fascisme et le libéralisme.
Âgé de 22 ans, il était originaire de Saint Etienne. Il étudiait en L2, et s’était vu refusé sa bourse Crous de 450 euros par mois car il avait redoublé une deuxième fois. Brûlé à 90%, son pronostic vital est engagé, selon le procureur de la République de Lyon.
La ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal s’est rendue samedi à Lyon pour rencontrer la présidente de l’université et les équipes du CROUS pour leur faire «part de sa profonde émotion face à l’acte dramatique» du jeune homme, «auquel elle a adressé ses premières pensées», selon le ministère. L’université Lyon II a refusé de commenter l’affaire, et elle a annoncé sur Twitter mettre en place mardi une cellule d’écoute psychologique.
Un acte désespéré révélateur
Ce drame met en lumière la grande variabilité des conditions de vie des étudiants, où l’âge, l’environnement social et économique de la famille apparaissent comme les facteurs les plus discriminants. La grande majorité des étudiants vit une situation de mal-être due au manque de ressources financières, à un avenir incertain, à la solitude, à la pression des examens.
En France, le coût de l’accès aux études supérieures ne cesse d’augmenter. Aux frais d’inscription en hausse, s’ajoutent la nécessité de subvenir aux besoins alimentaires, souvent négligé et de se loger. Face au manque de logements universitaires, les étudiants doivent se tourner vers d’autres formes de logement beaucoup plus onéreuses. Cela dans un contexte où les aides publiques permettant un rééquilibrage des ressources monétaires sont continuellement revues à la baisse comme l’illustre le nouveau dispositif des APL.
Si les situations de précarité se multiplient chez les étudiants, leurs conditions de vie sont très largement occultées dans un pays en prise avec la crise économique où le gouvernement a mis dans le collimateur les aides concernant les foyers aux plus faibles ressources.
Une caractéristique majeure chez l’étudiant pauvre est qu’il ne possède aucune maîtrise sur l’avenir. Non seulement il n’a aucune prise sur les événements dont il dépend de façon vitale (emploi, conditions de travail, revenus, coût de la vie) mais, il ne dispose pas de moyens efficaces pour parer individuellement ou collectivement aux difficultés qui surgissent.
Appel à manifester
L’étudiant était un militant de l’antenne Solidaire de l’université Lyon II. «Il est arrivé avant la plupart d’entre nous», explique une de ses camarades. «Il militait depuis deux ou trois ans au niveau local et national», complète une autre. Le jeune homme est décrit par ses amis comme un «syndicaliste impliqué, toujours prêt à aider les autres, chaleureux, humain». Il a milité dans plusieurs structures avant de rejoindre le syndicat Solidaire.
Pour ses camarades du syndicat Solidaire étudiant-e-s, «la précarité a un impact sur notre santé mentale, et quand on milite on est aux premières loges de la précarité».
Dans son message, l’étudiant accuse tour à tour le fascisme, qui divise, le libéralisme qui «crée des inégalités», les derniers présidents pour avoir créer des «incertitudes», «Le Pen» et les éditorialistes qui «créent des peurs plus que secondaires».
Et signe de cet engagement, le jeune homme a conclu son billet de façon éloquente : «mon dernier souhait, c’est aussi que mes camarades continuent de lutter, pour en finir définitivement avec tout ça. Vive le socialisme, vive l’autogestion, et vive la sécu.»
Solidaire étudiant-e-s a appelé à manifester devant tous les CROUS de France mardi 12 novembre. Le syndicat a publié avec SUD samedi 9 novembre un communiqué commun. Ce sont «ces institutions inhumaines, cette précarité, cette violence trop commune que l’Etat et l’Université […] qui ont guidé son geste, profondément politique, acte désespéré mais aussi et surtout geste de lutte contre un système fascisant et raciste qui broie», souligne le communiqué.
Avec AFP
Libre commentaire d’une étudiante.
Il y a environ 25000 suicides en France … il est vrai que ça fait moins de battage médiatique que le nombre de morts sur la route… il faut bien reconnaître que pour un État, c’est plus facile de construire des radars que de rendre les gens heureux …