Aide sociale à l’enfance : le département de l’Hérault s’associe aux constats soulevés par la commission d’enquête, mais attend des réponses concrètes de l’État, notamment financières.


 

À la suite de la publication du rapport de la commission d’enquête sur les manquements des politiques publiques de protection de l’enfance, le département de l’Hérault se félicite du travail réalisé et de la prise en compte de certaines de ses observations, mais s’inquiète de leur mise en œuvre au regard de la faiblesse des moyens dédiés par l’État depuis plusieurs années, pourtant nécessaires à une profonde refonte de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Face au constat d’une Aide Sociale à l’enfance  en situation de tension et de l’urgence absolue de protéger davantage de nombreux mineurs en danger, le Président Kléber Mesquida a déposé à l’Assemblée nationale, en janvier dernier, une contribution volontaire auprès de la commission d’enquête sur les manquements des politiques de protection de l’enfance afin de proposer des pistes de solutions concrètes à mettre rapidement en œuvre par les Collectivités.

S’inscrivant dans une démarche volontariste, le Département a en effet souhaité partager avec la commission d’enquête son expérience sur des actions innovantes et efficaces qu’il a expérimentées en Hérault, et à ce titre, a également proposé d’organiser des assises départementales destinées à définir des mesures correctives urgentes et à partager les bonnes pratiques visant à replacer la protection de l’enfance au cœur des priorités nationales. Ainsi, à l’occasion de la publication du rapport de commission d’enquête sur les manquements des politiques publiques de protection de l’enfance, le département de l’Hérault se réjouit de voir que la commission a su se saisir de ce sujet en associant les acteurs de la protection de l’enfance et des collectivités.

De plus, le département tient à réaffirmer son engagement à protéger tous les enfants relevant de la protection de l’enfance, faisant le choix d’y dédier un budget de 237,3 millions d’euros malgré un contexte budgétaire contraint. Enfin, le rapport préconise la création d’un comité de pilotage de suivi de la stratégie de la protection de l’enfance, composé de l’État, des Départements et des associations, permettant aux parlementaires d’élaborer un projet de proposition de loi. Dans cette perspective, le Département déclare se tenir à la disposition de la commission d’enquête pour participer activement au comité de pilotage et à ses travaux.

 

Une démarche volontariste

Le Département se réjouit que plusieurs des propositions formulées dans le rapport de la commission d’enquête, notamment autour du développement de l’offre d’accueil et de la revalorisation des métiers de la protection de l’enfance, fassent partie des 17 propositions de sa contribution volontaire qui s’articulent selon 4 axes :

  1. Le développement de l’offre d’accueil

Le rapport préconise de mobiliser des moyens financiers de l’État pour créer de nouvelles structures de la protection de l’enfance, et de développer l’offre d’accueil. S’inquiétant des réticences de certains élus locaux à l’implantation d’établissements de l’ASE, la rapporteure suggère d’étudier la possibilité de transférer le pouvoir de délivrer le permis de construire au Préfet en cas de manquement du maire.

Cela rejoint le constat et les pistes d’actions du Département qui propose de :

  • Simplifier les procédures administratives avec une dérogation sur 5 ans,
  • Intégrer les places ASE dans les quotas de logements sociaux (loi SRU),
  • Et de mobiliser le patrimoine de l’État pour créer des structures d’accueil.

2. L’attractivité des métiers de la protection de l’enfance

La Commission d’enquête a constaté un défaut d’attractivité des métiers de la protection de l’enfance, évoquant plusieurs pistes de solutions : une formation initiale spécialisée et plus adaptée, le développement des stages et de l’alternance, le renforcement de la formation continue. Mais aussi la revalorisation des conditions de travail et le niveau de rémunération des professionnels (prime Ségur1, harmonisation des rémunérations des assistants familiaux, évolution des règles sur le cumul d’emplois…).

En réponse à cette crise des vocations, la contribution départementale propose de :

  • Revaloriser les métiers du social et médico-social,
  • Reconnaître la pénibilité pour les assistants familiaux et l’intégrer dans le calcul des droits à la retraite,
  • Majorer les rémunérations des apprentis s’engageant dans les métiers de l’Humain,
  • Et d’intégrer de nouveaux profils médicaux.

3. La prise en charge des enfants porteurs de handicap

Constatant de profonds dysfonctionnements et des inégalités territoriales dans la prise en charge des enfants de l’ASE en situation de handicap ou présentant des troubles du comportement, le rapport préconise notamment de construire un accompagnement adapté.

Face à ce constat partagé, le Département propose également des actions visant à améliorer la prise en charge des enfants porteurs de handicap en :

  • Créant des structures à double habilitation (ARS et Département),
  • Renforçant les moyens pour la pédopsychiatrie,
  • Développant des dispositifs spécialisés.

4. Privilégier la prévention des risques

Face au constat d’un continuum de violences auquel sont exposés les enfants, et qui se traduit notamment par une santé physique et mentale moins bonne, un taux d’échec scolaire plus élevé ou encore un risque de précarité accrue pour les jeunes issus de l’ASE, le rapport appelle l’État à la rénovation de la gouvernance de la protection de l’enfance, avec une stratégie interministérielle et une loi de programmation quinquennale de 5 ans minimum.

Ces recommandations s’inscrivent pleinement dans la démarche du Département de porter des actions pérennes de prévention des risques, de suivi de la santé des enfants dès la naissance et d’accompagnement à la parentalité.

Le Département propose donc de :

  • Sanctuariser les crédits pour la prévention précoce
  • Soutenir les Maisons des 1000 jours
  • Créer un forfait « santé protégée »
  • Renforcer l’appui à la parentalité

 

Vigilance sur les actions réellement mises en œuvre

Cependant, malgré de nombreux points positifs abordés dans ce rapport, le Département regrette que les mesures proposées ne soient pas davantage opérationnelles et indique qu’il restera vigilant sur les moyens humains et financiers alloués par l’État aux collectivités chargées de la protection de l’enfance pour la mise en œuvre d’actions concrètes et efficaces.

De plus, se joignant aux déclarations des Départements de France, le Département s’inquiète que la responsabilité des défaillances et des carences de la protection de l’enfance soit régulièrement imputée par les médias aux collectivités et aux professionnels des services de protection de l’enfance, et non pas à l’État, dont le désengagement financier historique depuis plusieurs années a largement contribué au délabrement de la protection de l’enfance observé par la Commission d’enquête.

Enfin, le Département réaffirme son soutien aux professionnels de la protection de l’enfance qui œuvrent quotidiennement pour protéger les enfants en danger. Et rappelle que l’urgence de l’enjeu nécessite des moyens humains et financiers importants, ainsi qu’une mise en œuvre rapide d’actions efficaces et adaptées afin de prévenir ces violences faites aux enfants.

 

Pour aller plus loin…

Le Département relève que plusieurs de ses actions sont mentionnées dans ce rapport, illustrant l’innovation et l’efficacité de ses actions en matière de prévention et de protection de l’enfance.

L’enjeu de santé publique

Ce rapport s’appuie par exemple sur l’étude épidémiologique POSER (Promouvoir, Observer la Santé des Enfants en Région) de l’ONPE (Observatoire national de la protection de l’enfance) qui concerne la santé de 2 367 mineurs et majeurs confiés à l’ASE dans plusieurs départements, dont celui de l’Hérault. Le constat de cette étude est édifiant : taux de prématurité, insuffisances pondérales et surpoids, forte morbidité psychiatrique ou encore troubles du langage…

C’est donc un véritable enjeu de santé publique qui nécessite la mise en place en urgence d’une politique de prévention à la hauteur des besoins et l’élaboration d’une nouvelle stratégie en matière de prise en charge de la santé des enfants concernés.

 

Credit Photo Anne Alauzen

 

Notes:

  1. Par l’arrêté du 6 août 2024, les salarié·es à temps plein du secteur sanitaire, social et médicosocial privé bénéficient à compter du mois d’août d’une prime mensuelle de 183€ euros net, représentant pour l’employeur un montant de 248€ brut auquel il faut ajouter les charges patronales. Cette décision, par ailleurs rétroactive au 1er janvier 2024 pour certaines structures, est inapplicable sans compensations financières de l’État par des associations qui exercent de véritables délégations de service public et ne disposent pas de fonds propres.