Alors que l’Union européenne se « précipite » pour sceller un accord de libre-échange avec les pays du Mercosur, la France, quant à elle, reste campée sur un refus catégorique vu les conditions actuelles et la vive colère des agriculteurs.
En jeu, un traité vieux de 25 ans en gestation, qui prévoit notamment l’importation annuelle de 90 000 à 100 000 tonnes de viande bovine latino-américaine sur le territoire européen. Ce projet est perçu par les agriculteurs français comme une menace complète sur leur mode de production très normée.
La signature de cet accord provoque un retour des mobilisations programmées la semaine prochaine et courant décembre. Arnaud Rousseau, président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), dénonce une Europe qui s’apprête à devenir « une passoire », facilitant l’entrée de produits agricoles qui ne répondent à aucun des standards imposés aux agriculteurs européens. Sur France Inter, il réitère la volonté des agriculteurs à se mobiliser, non pas pour « ennuyer les Français », mais pour défendre une agriculture française qui fait « sens » et qui garantit des produits de qualité. « Nous voulons interpeller les pouvoirs publics. Nous ne ciblons pas les autoroutes, notre but n’est ni de bloquer ni d’affamer la France », déclare-t-il fermement.
Rendez-vous le lundi 18 novembre
Pour l’heure, pas de “giléjaunisation” du mouvement donc, mais le contexte de cette révolte agricole dépasse la simple opposition à l’accord Mercosur. Il est alimenté par un climat de défiance face à une politique européenne perçue comme insensible aux préoccupations territoriales.
La FNSEA, majoritaire dans le secteur agricole français, a donné rendez-vous aux agriculteurs pour des mobilisations à partir du lundi 18 novembre, date symbolique correspondant au sommet du G20 à Rio de Janeiro, où les discussions sur le Mercosur seront à l’ordre du jour. La Coordination rurale et la Confédération paysanne, associations agricoles plus radicales, prévoient également des actions coup de poing. La « révolte agricole » prend forme, soutenue par une alliance syndicale large et déterminée à « faire entendre la voix des agriculteurs européens ».
Situation financière des exploitations : alarmante !
Le refus de cet accord se nourrit aussi d’un contexte économique difficile. Selon Arnaud Rousseau, les trésoreries des exploitants sont au plus bas après une année particulièrement rude : moissons décevantes, maladies sanitaires dans les élevages et retards dans la réception des vaccins. La situation financière des exploitations est alarmante, et les aides promises tardent à se concrétiser, d’autant plus que la dissolution de l’Assemblée nationale a paralysé plusieurs projets de loi essentiels pour le secteur agricole.
La mobilisation s’annonce évolutive et risque bien d’être fortement suivie. Pour ce premier acte saison 2, la FNSEA privilégie les rassemblements devant les préfectures et sur les ronds-points à travers la France, pas de prises d’assaut des autoroutes prévues.
Novembre, décembre, janvier
En Occitanie et Nouvelle-Aquitaine, où la colère des agriculteurs est particulièrement vive, la mobilisation pourrait durer jusqu’à la mi-décembre, voire reprendre en janvier. L’objectif : faire pression pour que l’Europe revoie ses exigences et cesse d’ouvrir ses frontières à des produits qui ne respectent pas les normes.
Cette mobilisation dépasse les frontières françaises. En s’opposant au traité Mercosur, les agriculteurs ne défendent pas seulement leurs exploitations, mais ils alertent sur le risque d’un dumping agricole qui menace la souveraineté alimentaire et environnementale de l’Europe.