Les images galopent derrière nos yeux. Sète a le pouvoir d’ouvrir grand notre imaginaire. Telle est la pensée qui traverse l’esprit en feuilletant le fascicule « Un été de festivals » qui annonce en condensé la programmation des nombreux festivals qui vont rythmer l’été.


 

Le coup d’envoi est donné dès le printemps avec le bien nommé festival de photographie documentaire ImagesSingulières, du 18 mai au 11 juin. À découvrir lors de cette 15e éditions, le travail réalisé au cimetière Marin par l’artiste en résidence, Lorenzo Castore, sur les images que le temps détruit. Le premier festival lancé, les événements succèdent aux événements de telle sorte que celles et ceux qui auraient la folle idées de tout suivre se retrouvent à la clôture de BD Plage le 27 août, épuisé.e.s et prêt.e.s pour quelques années de repos. Trop riche l’offre culturelle sétoise ? Si cela n’était pas là, ce ne serait pas croyable en ces temps où le monde de l’art et de la culture affronte une crise structurelle profonde.

Chaque année, la mi-printemps est le moment où les principaux acteurs culturels sétois se retrouvent à Montpellier en compagnie du maire François Commeinhes pour livrer le menu d’un grand banquet de gourmandises concoctées de mains maîtresses. Montpellier-Sète, ce trait de côte de 35 kilomètres s’impose comme une évidence pour les amateurs de culture. Un archipel où la création résiste et entend, dans l’union, décrocher le label de capitale européenne de la culture 2028.

Les directeurs artistiques en présence dessinent un portrait subjectif de la ville. Toujours en mouvement, du 31 mai au 4 juin, le festival d’art urbain K-Live, décline ses actions dans l’espace public en confrontant l’œuvre et son public dans une démarche citoyenne. Fidèle à la chanson, du 22 au 27 juin, Quand je pense à Fernande, a inscrit cette année dans son abécédaire deux belles lettres de l’expression française en recevant Dominique A et Arthur H. Coté audiovisuel tout terrain, du 28 juin au 2 juillet, le Festival audiovisuel SunSète rendra hommage à l’émancipé Patrick Dewaere. Toujours les pieds dans le sable, on découvrira les nouveaux talents de la DJ’s-sets, ou les pointures du genre dans le cadre du Worldwide Festival, du 4 au 9 juillet. Le jazz pénétrera dans l’antre magique du Théâtre de la Mer du 15 au 21 juillet avec Jazz à Sète qui accueillera notamment le Beat-Funk de Cory Wong et le légendaire bassiste Stanley Clarke.

 

Présentation de l’été des festivals.

 

L’art peut mourir, ce qui compte c’est qu’il ait répandu des germes sur la terre, disait Miró. Il en va de même pour la poésie, mais c’est évidemment beaucoup mieux quand elle est bien vivante, ce à quoi s’emploie le festival Voix Vives de Méditerranée en Méditerranée du 21 au 29 juillet qui accueille 70 poètes venus de toutes les rives pour élargir nos horizons, en prévision : des centaines de rencontres gratuites et une lecture musicalisée de Catherine Ringer qui illuminera les poèmes érotiques d’Alice Mendelson. Fiest’a Sète, le doyen des festivals sétois célèbre sa 26e édition du 21 juillet au 4 août, avec une semaine de concerts gratuits sur le Bassin de Thau avant de revenir chauffer le Théâtre de la mer avec des pointures comme Eliades Ochoa, membre du Buena Vista Social Club, ou Femi Kuti, et des découvertes en provenance des quatre coins de la planète. Du 9 au 12 août, le Demi festival qui doit son nom au rappeur sétois, Demi Portion, tiendra sa 7e édition dans des coins insolites comme sur le canal Royal ou devant le CRAC.

Au fil des présentations se dessine une double préoccupation dans le propos des directeurs artistiques : celle d’une conjoncture économique menaçante pour la création et celle grandissante d’intégrer la transition écologique. « On se sent concernés, on a réfléchi de façon à produire moins mais mieux », résume le directeur artistique d’ImagesSingulières, Gilles Favier.

Des retombées économiques d’une si foisonnante offre culturelle, il ne fut pas question. Celles-ci pèsent évidemment en termes d’image et d’attractivité. La mise en réseau effective avec la métropole de Montpellier dans le cadre d’une candidature conjointe pour devenir capitale européenne de la culture rehausse les objectifs sans que les intentions stratégiques aient été vraiment annoncées. Dans cette dynamique politique « gagnant-gagnant », l’attractivité d’un territoire peut remplacer la dimension concurrentielle entre les collectivités. Reste à mesurer si les acteurs des secteurs culturels concernés s’y retrouvent économiquement et quel impact cette modélisation peut-elle avoir sur l’expression artistique.

Pour l’heure, l’éclectisme artistique de l’été culturel sétois se révèle généreux comme la perle de l’huître sous le citron de l’actualité. Sète est un lieu où se retrouve encore les personnes persuadées que l’intelligence et la créativité sont capables de changer le monde, ce qui rend cette île si singulière.

Jean-Marie Dinh

 

Photo 1 Lorenzo Castore

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Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.