Le Ségur de la santé a acté 9 milliards d’euros d’investissement sur dix ans, mais le retard est tel que cette somme étalée dans le temps ne pourra répondre à l’urgence systémique, s’inquiètent dans une tribune au Monde des leaders syndicaux de l’Union nationale des syndicats autonomes (UNSA), Luc Farré et Yann Le Baron.
Le secteur hospitalier est en crise depuis longtemps, bien avant la crise du Covid. Celle-ci a été un révélateur du malaise des personnels hospitaliers. Le Ségur de la santé, négocié et signé par l’UNSA Santé et Sociaux public et privé et par l’Union nationale des syndicats autonomes (UNSA), est une première réponse. La signature de cet accord a permis des améliorations immédiates et importantes des rémunérations. Toucher 183 euros net par mois, soit plus 2 196 euros par an avec une amélioration des grilles de rémunération, est un réel effort de la société.
Alors même que tous les personnels s’impliquent pour être au service des Français usagers dans une période de pandémie sanitaire qui perdure dans le temps, nous ne pouvons que regretter qu’à ce jour certains agents publics de la fonction publique hospitalière ne bénéficient toujours pas du complément de traitement indiciaire, et déplorer que la transposition des mesures salariales ne soit pas effective de façon homogène dans les secteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux du privé.
Conditions de travail
Pourtant, partout, les conditions de travail et le manque d’effectifs se posent cruellement. Les revalorisations salariales sont certes un levier nécessaire à l’attractivité des métiers du secteur de la santé, il n’en demeure pas moins qu’elles ne sauraient suffire à répondre, à elles seules, à l’enjeu de la sauvegarde de notre système de santé.
Dans les faits, les conditions de vie au travail sont des axes qu’il faut maintenant rendre prioritaires. Les conditions de travail doivent redevenir décentes dans les hôpitaux et établissements publics et privés, dans l’intérêt tant des personnels que des usagers.
Pour exemple et sans être exhaustif, nous constatons un manque de brancards, un manque de lits, du matériel vieillissant, un immobilier souvent vétuste… Ce sont des réalités qui impactent le travail au quotidien.
Même si le Ségur de la santé a acté 9 milliards d’euros d’investissement sur dix ans, le retard est tel que nous craignons que cette somme étalée dans le temps ne puisse répondre à l’urgence systémique et se révèle insuffisante.
Fatigue et lassitude
En outre, nos métiers n’attirent plus, et la crise sanitaire aura même provoqué l’accélération de la fuite de trop nombreuses compétences. Le non-respect des congés, les changements d’organisation incessants contribuent à une fatigue et à une lassitude grandissantes des personnels.
Il devient impératif de mettre en œuvre un grand plan Marshall du recrutement et de la formation. Il doit être la source d’un nouvel intérêt durable pour les métiers de la santé et générateur de nouvelles « vocations ».
Concomitamment, il y a urgence à penser, à créer et à mettre en application des mesures de fidélisation et d’ancrage pour celles et ceux qui se débattent au quotidien dans toutes nos structures de santé publiques et privées. De nécessaires changements doivent être conduits dans la gestion des ressources humaines avec, comme leitmotiv, quatre mots : former, recruter, reconnaître et respecter.
Comme nos syndicats l’ont toujours fait, nous poursuivrons nos revendications et nous porterons des propositions pour améliorer le système de santé en France. Nous agirons dans un esprit de négociations pour obtenir des progrès et des avancées. Des mesures concrètes et simples doivent être déployées pour permettre une meilleure attractivité, pour fidéliser les personnels et pour améliorer les conditions de travail et d’exercice.
Luc Farré – Secrétaire général de l’Union Nationale des Syndicats Autonomes Fonction Publique
Yann Le Baron – Secrétaire national de la Fédération UNSA Santé et Sociaux public et privé
Tribune publiée par le Journal Le Monde le 24 décembre 2021