Nous y sommes. Le calendrier gouvernemental du déconfinement par étapes, à apprendre par cœur ou à coller sur le frigo, nous donne rendez-vous pour le mercredi 19 mai, dans un premier temps.


 

Pour une fois que c’est une bonne nouvelle, on ne va pas bouder notre plaisir. Les terrasses des cafés seront enfin rouvertes. Il paraît que c’est un aspect de « l’art de vivre français ». On avoue ne pas très bien comprendre en quoi ce serait l’apanage de ces « gaulois réfractaires ». Pourquoi, nos voisins italiens et espagnols ne font pas la même chose ? Et les Anglais, avec leurs pubs qui survivront même à la fin de la monarchie ? Enfin, bref, trêve d’interrogations métaphysiques : on aura donc le droit de rêvasser en terrasse — pas trop longtemps, faut penser à l’économie et au remboursement de la dette cher à Bruno Lemaire et Éric Woerth — et de prendre le soleil (un truc qui n’est pas encore à vendre). On aura le droit de siroter un café, une bière (Corona ?), un rosé du Sud pour soutenir la viticulture régionale… « C’est la fêêête », comme ils disent à Groland1.

On pourra souffler, s’aérer l’esprit mis à rude épreuve depuis plus d’un an, juste histoire d’oublier ces animateurs télé qui posent des questions sur l’alcool dans leurs jeux, assorties aussitôt du conseil : « à consommer avec modération ». Faudrait voir à sortir de l’ambiguïté tout de même. Quelques minutes, quelques heures peut-être, dans une journée où on ne sera pas assailli par les images d’écouvillons dans le nez, de vaccinations, de spots gouvernementaux culpabilisateurs en diable, de visites d’officiels agglutinés dans des pièces avec force caméras qui les suivent pendant qu’on demande au bon peuple de respecter les gestes barrières. Quelques minutes, quelques heures à ne plus écouter les commentaires sur les variants, les taux d’incidences. Ce n’est pas de l’égoïsme ou du repli face à la souffrance, dont certains grands moralisateurs sont quand même un peu responsables. Ces gestionnaires à courte vue qui, depuis des décennies, nous expliquent que la santé est un coût alors que la vie n’a pas de prix. C’est un réflexe de survie probablement, pour des millions de personnes.

 

Gratuit et essentiel

Et il y a encore mieux que les terrasses, parce qu’en plus, là, c’est gratuit : les balades dans la nature. Rappelez-vous, lors du premier confinement, on avait promis de s’interroger sur ce qui est essentiel pour nos vies. D’autres ont décidé pour nous, mais il n’est pas trop tard.

Pas gratuit en revanche, mais réjouissant quand même : les théâtres, les cinémas et même les concerts vont retrouver le chemin de la vie. Déjà, les appels à « nous retrouver » de la part de structures culturelles régionales commencent à affluer sur les messageries d’altermidi… Et les vraies affiches de cinéma ont fait leur retour dans nos villes. Avec Emmanuelle Béart, c’est quand même mieux.

L’étau va donc se desserrer peu à peu. Le 19 mai, on pourra être dans les rues jusqu’à 21 heures, en raison du report de l’heure du « couvre-feu » comme ils disent. Après cette heure qui correspond à la tombée de la nuit, seuls les chats auront le droit de traîner dans les rues : les gris (normal), les noirs, les blancs, les tigrés, les roux, etc. Le 9 juin, la limite sera fixée à 23 heures avant l’échéance du 30 juin où le « couvre-feu » n’aura plus cours.

De l’autre côte de l’Atlantique, Joe Biden annonce que les Américains vont pouvoir tomber le masque. « Le printemps est inexorable », proclame la banderole qui emprunte ces mots à l’écrivain chilien Pablo Neruda, accrochée sur bon nombre de lieux culturels de nos régions. L’été aussi est inexorable, avec ou sans la plage.

                                                                                                            J-F Arnichand

(Photo Robin A. altermidi DR)

 

Notes:

  1. Pays fictif imaginé en 1992 par l’équipe de Jules-Édouard Moustic pour les besoins de diverses émissions d’humour et de divertissement de Canal+
JF-Arnichand Aka Morgan
"Journaliste durant 25 ans dans la Presse Quotidienne Régionale et sociologue de formation. Se pose tous les matins la question "Où va-t-on ?". S'intéresse particulièrement aux questions sociales, culturelles, au travail et à l'éducation. A part ça, amateur de musiques, de cinéma, de football (personne n'est parfait)...et toujours émerveillé par la lumière méditerranéenne"