Des agents territoriaux aux enseignants, en passant par la situation des Accompagnants des élèves en situation de handicap, en grève ce jeudi 8 avril, la FSU 13 fait le constat d’un délitement de la Fonction publique et pousse « un cri d’alarme »  sur une Éducation nationale « en voie de démantèlement ».


 

La Fédération syndicale unitaire (FSU pour les intimes) regroupe majoritairement plusieurs syndicats de l’Éducation nationale mais aussi des agents d’autres secteurs d’activités, comme Pôle emploi ou la Fonction Publique Territoriale. En cette semaine de « mobilisation dans la Fonction publique », la FSU des Bouches-du-Rhône a dressé un état des lieux très critique sur la politique gouvernementale, lors d’une visioconférence de presse organisée le 6 avril. Une alerte sur ce que Caroline Chevé, secrétaire départementale de la FSU 13, appelle « le resserrement du rôle de l’État vers moins de missions » et le « passage à une logique ultra-concurrentielle ». L’enseignante en veut pour preuve « le livre programmatique du ministre » où l’éducation est considérée comme « un marché potentiel pour le 21e siècle » et la réforme du lycée qui intègre cette logique de « mise en concurrence des établissements, des enseignements et des collègues ».

Acte « majeur » de la réforme du Baccalauréat, et pas le moins discutable par sa philosophie : le fameux « Grand oral », digne des grandes écoles : « Nous n’avons pas de consignes précises et peu de temps de travail avec les élèves », déplore Laurent Tramoni (SNES, syndicat du secondaire). Depuis plusieurs semaines, plusieurs syndicats enseignants réclament l’annulation de cette épreuve, encore plus inégalitaire en cette année scolaire très particulière. 

Alors que cette semaine de reconfinement précédant les vacances scolaires de printemps (aux mêmes dates pour tous quelle que soit la zone) oblige enseignants, parents et élèves à renouer avec l’enseignement à distance, Laurent Tramoni mesure les effets de la crise actuelle sur l’Éducation nationale : « l’explosion des besoins des élèves dans les collèges et les lycées, la perte de relations individuelles avec les professeurs, la perte de qualité de l’enseignement, la hausse du nombre de décrocheurs ». Une situation qui « justifierait qu’on s’engage dans des dynamiques de compensations, avec l’arrêt des suppressions de postes, des effectifs allégés ». Mais pour cela, ajoute-t-il, « il faudrait avoir des candidats aux concours de recrutement » et des carrières suffisamment attractives pour ne pas assister, entre autres, au départ des « diplômés scientifiques vers le privé ». Selon Laurent Tramoni, c’est une tout autre évolution qui se profile avec « 1 883 emplois en moins à la rentrée prochaine dont 60 dans l’Académie ».

 

« Un recours massif à la contractualisation »

De Pôle emploi aux territoriaux, en passant par l’enseignement, le constat des syndiqué.es est analogue : partout le manque de volonté politique d’investir réellement. « Au-delà de nos conditions de travail, c’est le service public qui est attaqué », souligne Serge Tavano (territoriaux) qui pointe les conséquences sur les usagers : « À la piscine de Cassis, passée au privé, l’entrée est à 5 euros, cela fait quand même une grosse différence. » Le responsable syndical évoque des « signes avant-coureurs de restriction du nombre de postes sur la métropole »1.

Virginie Akliouat, du SNU-Ipp (syndicat des enseignant.es du primaire) fustige « un budget de l’Éducation nationale ridiculement bas par rapport à nos voisins européens et un recours massif  à la contractualisation, jamais vu dans le premier degré ». La syndicaliste  » lance un cri d’alarme : l’Éducation nationale est en train d’être démantelée ».

La réforme de la formation initiale qui devrait entrer en vigueur à la rentrée de septembre inquiète avec la perspective « d’étudiants contractuels en tiers de classes2 ». Selon Virginie Akliouat, « le gouvernement reconnait que c’est un moyen pour recruter moins d’enseignants ».

Quant à l’aspect crise sanitaire, il n’est pas de nature à calmer le mécontentement des professeurs. « Nous n’avons aucun élément sur les conditions de reprise [la rentrée après les vacances de printemps aura lieu le 26 avril, Ndlr], nous avons des demandes fortes en termes de vaccination, mais aucun calendrier précis n’a été donné pour les enseignants, cette question a juste été évoquée, si le protocole actuel pouvait être applicable et appliqué, ce serait bien », s’insurge la syndicaliste. Le SNU Ipp pointe tout particulièrement le problème du remplacement des enseignants en cas de maladie. Sans remplacement des professeurs, les élèves sont répartis dans les autres classes, en contradiction avec le protocole sanitaire. Et pour éviter « des classes de maternelle à 40 élèves, quand l’enseignant n’est pas remplacé, on demande aux parents de garder les enfants ». Une situation aux allures de pis-aller qui ne peut satisfaire personne.

 

La lumière sur la précarité des AESH

Si les revendications du corps enseignant peuvent accéder à une certaine visibilité, il n’en est pas forcément de même pour des acteurs et actrices de l’éducation souvent oublié.es : les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH).

Dans les Bouches-du-Rhône, la FSU, Solidaires, CGT Educ’action et FO appellent à un rassemblement à Marseille ce jeudi 8 avril pour alerter sur leur situation. Profession largement féminisée, rémunérée entre 600 et 900 euros par mois, les AESH sont au nombre de 100 000 en France. À leur invisibilité et au manque de reconnaissance s’ajoutent « des frais de déplacements à charge lorsqu’elles doivent travailler sur plusieurs communes », précise Virginie Akliouat. Dans les Bouches-du-Rhône, un collectif regroupant organisations syndicales de l’Éducation nationale, fédérations de parents d’élèves et associations, intitulé « Des moyens pour l’inclusion scolaire 13 » a été créé. « C’est la première fois qu’on voit ce type de démarche », souligne Laurent Tramoni.

 

J-F  Arnichand

 

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Notes:

  1. Aix-Marseille-Provence, 92 communes et plus de 1 800 000 habitants
  2. à tiers-temps
JF-Arnichand Aka Morgan
"Journaliste durant 25 ans dans la Presse Quotidienne Régionale et sociologue de formation. Se pose tous les matins la question "Où va-t-on ?". S'intéresse particulièrement aux questions sociales, culturelles, au travail et à l'éducation. A part ça, amateur de musiques, de cinéma, de football (personne n'est parfait)...et toujours émerveillé par la lumière méditerranéenne"