Le hashtag #ÉtudiantsFantômes a été relayé par nombre d’étudiants le 12 janvier sur Twitter, l’amenant au top des tendances françaises. Clara, l’une des étudiantes montpelliéraines à l’initiative du mouvement présente ce dernier.


 

 

Le 12 janvier, le hashtag #ÉtudiantsFantômes faisait la une des tendances françaises sur le réseau social Twitter. Un seul clic révélait de nombreux témoignages d’étudiants partout en France. Ils y expliquaient leurs difficultés suite à la crise sanitaire et dénonçaient l’indifférence du gouvernement à leur égard.

 

Plusieurs membres d’#EtudiantsFantômes tenant leur banderole, lors de la manifestation étudiante du 26 janvier 2021. – Crédit: Instagram de EtudiantsFantômes

Entretien:

Quelques étudiants en première année de Licence de sciences politiques à l’université de Montpellier sont à l’origine de ce hashtag. Clara en fait partie. Elle présente ce mouvement issu des réseaux sociaux.

 

Quel a été l’élément déclencheur derrière #ÉtudiantsFantômes ?

L’annonce de la ministre de l’Enseignement supérieur, Mme Vidal, du 11 janvier, celle où elle parle des bonbons sur les tables, nous a beaucoup choqué. Suite à ça, c’est un peu toute notre promotion qui s’est révoltée. D’abord, environ une dizaine de personnes, de laquelle je fais partie, puis c’est ensuite toute la promotion qui a décidé de s’organiser pour pouvoir relayer le hashtag.

 

Pourquoi avoir choisi une telle appellation ?

Une amie de ma promotion a décidé d’appeler le mouvement « étudiants fantômes », parce qu’on se sentait assez transparents à cette époque-là. Et la rareté de la considération des étudiants de la part du gouvernement ou dans les médias nous laissait un petit peu perplexe, étant donné qu’on avait l’impression de beaucoup souffrir de cette situation. Ce qui s’est vérifié avec les chiffres, d’ailleurs.

 

Quelles sont les revendications du mouvement ?

On est encore en train de rédiger toutes nos revendications, mais nous savons déjà qu’on s’est révolté par rapport à nos conditions en distanciel, parce qu’on trouve notre traitement injuste et on pense que le gouvernement n’a pas notre vision des choses pour pouvoir prendre les bonnes décisions pour nous. On aimerait principalement un réel retour au semi-présentiel pour venir en aide aux étudiants qui décrochent, pour répondre aux étudiants qui ont besoin de relations sociales au minimum, mais aussi aux étudiants handicapés et neuroatypiques qui ne sont pas du tout accompagnés. C’était déjà le cas avant, mais avec la crise, ils se retrouvent encore plus seuls, autant dans la pédagogie que socialement. On demande un retour au semi-présentiel, au moins, car on sait qu’on est dans un contexte particulier et qu’on ne peut pas non plus demander la lune. Mais maintenant, on aimerait juste qu’on nous fasse confiance.

 

Quelles ont été, et sont encore, les principales difficultés des étudiants pendant cette crise ?

L’ensemble des étudiants ont vécu l’isolement, la peur du décrochage, pour certains, la dépression et pour 23 % des étudiants, les pensées suicidaires. L’isolement est un cas généralisé chez les étudiants, mais parfois, il va de pair avec la précarité. Ce qui rend les choses encore plus difficiles. Il y a des étudiants qui restent dans leur 9m², dans leur chambre de bonne, qui ne peuvent voir personne, et qui sont dans un environnement de travail toxique, puisqu’il est totalement lié avec leur lieu de vie. Je pense que cela dépend aussi des conditions de vie des étudiants, mais il y a déjà des conditions de travail beaucoup trop anxiogènes pour qu’on puisse supporter notre condition.

 

Vous attendiez-vous à ce que le hashtag soit autant repris ?

Pas du tout. Et même, pour l’anecdote, au départ c’était à demi-sérieux. On y croyait pas nous-même, et on pensait pas que ça aurait autant d’ampleur. On ne s’est pas rendu compte que notre hashtag avait atteint des sommets avant qu’on soit en TT France. Et depuis, on a toujours du mal à comprendre quand des médias nous contactent ou que des étudiants veulent nous féliciter. C’est extrêmement touchant de voir que notre combat est maintenant relayé et qu’il est l’affaire de tous.

 

Quels projets pour la suite de #ÉtudiantsFantômes ?

Pour l’instant tout est en discussion, on est encore en création d’association et en train d’écrire nos revendications. Mais, évidemment, on ne compte vraiment pas en rester aux hashtags. On l’a déjà montré en relayant les manifestations. Après, il reste à voir si on ne développe pas notre association en plusieurs branches dans des villes différentes pour couvrir un maximum de terrain. Ou essayer de faire des partenariats avec des cabinets de psychologie qui peuvent se porter bénévoles pour pouvoir couvrir les campus, car un psychologue pour 30 000 étudiants, cela n’est pas assez. Et enfin, voir si on organise d’autres manifestations dans le respect des gestes barrières, au cas où nos revendications ne seraient pas entendues.

 

Propos recueillis par Valentine Benech