« Dernière sommation, nous allons faire usage de la force » : cette phrase, les manifestant.e.s l’ont entendue plusieurs fois samedi à Marseille, jour de retour des Gilets jaunes dans les rues. Il n’y avait pourtant pas d’excitation particulière en cette magnifique après-midi baignée de soleil. Sur le vieux-port, le ballet des bateaux de touristes en partance pour les îles du Frioul et des navettes maritimes, désormais aux couleurs de la Métropole, voisinaient avec les manifestants réunis sous l’ombrière. Une ombrière, vision rarissime, bouclée en l’occurrence par les forces de police et de gendarmerie. Tout ça pour quelques centaines de personnes : Gilets jaunes venus de plusieurs villes des Bouches-du-Rhône, militants écologistes portant le tee-shirt vert d’ Alternatiba, militants du NPA ou de la France insoumise, « antifas » marseillais…
Le déploiement de « forces de l’ordre » rappelait que dans la semaine le pouvoir avait déjà annoncé l’interdiction des manifestations à Toulouse et Montpellier, qui furent des hauts lieux du mouvement des Gilets jaunes en 2018-2019. Des rassemblements se sont néanmoins tenus en plusieurs lieux de la « ville rose ». À Avignon (Vaucluse), 200 personnes ont participé à cette journée.
Museler les oppositions ?
Tous ces éléments mis bout à bout traduiraient-ils une volonté gouvernementale de faire monter les tensions et de tenter de museler les oppositions ? On n’ose le croire : il ne faut pas imaginer de tels calculs, pas plus qu’il ne faut parler de violences policières dans une démocratie.
En ce 12 septembre à Marseille, la manifestation, aux allures de jeu du chat et de la souris dans les rues et jusqu’aux escaliers de l’ancien Hôtel-Dieu — devenu un hôtel de luxe (photo) — a eu lieu malgré tout. Comme pour dire « On est là« , selon les paroles du célèbre chant des Gilets jaunes entonné à plusieurs reprises.
Certes, les convergences demeurent quantitativement timides mais du slogan « La Ve République est démasquée » aux multiples inscriptions sur les gilets, de la banderole écolo « Dérèglement climatique, urgence démocratique… », qui pouvait se lire en plusieurs sens, aux autocollants réclamant une augmentation des salaires, elles se dessinent. Les centrales syndicales CGT, FSU et Solidaires appellent, elles, à manifester le jeudi 17 septembre.
En cette fin d’été, les colères sont toujours là malgré les messages du pouvoir sur les masques qui rendent fous, les injonctions contradictoires, le tout sécuritaire prôné par Gérald Darmanin… Ceux qui sont déjà obsédés par l’élection présidentielle de 2022, en se rasant ou pas, auraient tort de ne pas les entendre.
Morgan G.
Photo: Course poursuite inattendue sur les marches de l’Hôtel-Dieu, à Marseille, devenu un hôtel de luxe (Photo L.A)