À la tête de la liste Aix en Partage (15,88%), l’ex-doyen de la faculté de droit, Marc Pena, se dit prêt à affronter la triangulaire 2020 qui va l’opposer à la maire sortante LR Maryse Joissains (30,28 %) et à la candidate LRM Anne-Laurence Pétel (20,45 %), le 28 juin prochain. Avec un projet municipal avancé comme « juste, efficace et audacieux », Marc Pena et ses 54 colistiers entendent impulser une dynamique écologiste, solidaire et démocratique, qui rassemble de la France Insoumise, Génération.s le mouvement, Gauche Républicaine socialiste, Parti socialiste, Ecologistes, Nouvelle Donne, PCF, Place Publique à Ensemble. Il peut compter sur les membres d’EELV pour ce dernier « round » des municipales.
Quelles seraient, selon vous, les leçons à tirer de cette pandémie du Covid-19 ?
Il y a eu beaucoup de débats autour de cette pandémie mais cette période particulière a révélé l’état de nos sociétés. Elle a révélé les inégalités et la grande précarité d’une bonne partie de la population. J’ai d’ailleurs participé à mettre du liant lors d’initiatives solidaires, notamment auprès des étudiants qui se sont retrouvés seuls pendant ce confinement. Un de nos colistiers est très investi sur ce terrain, nous avons d’ailleurs fait les choses sans médiatiser là où un syndicat de droite extrême a plutôt instrumentalisé.
D’autre part, notre système de santé était un des plus performants au monde mais on voit qu’il a été grippé à cause de politiques publiques de l’austérité qui se sont succédées et se sont aggravées avec le gouvernement actuel. La France fonctionne à coup de politiques comptables et de délocalisation depuis plusieurs années, mettant en péril des domaines phares comme la santé publique. On a mesuré l’erreur. On a été désarmés à cause de ces politiques publiques. Une société qui accroit les inégalités et est incapable de gérer ses aînés, doit se poser des questions vitales : est-ce qu’on met au centre le bien commun, l’humain ou alors l’argent, le profit qui n’est récolté que par quelques-uns ? Si aujourd’hui on est heureux de ce déconfinement, après un confinement, au passage, digne du moyen-âge, on va devoir affronter les conséquences.
Avec le gouvernement actuel, les plus fragiles vont essuyer les plâtres encore une fois, on le voit déjà avec plus de 800 000 chômeurs annoncés et on veut recommencer comme avant, sans réflexions, sans tirer de leçons de cette épreuve qui invite pourtant à repenser nos sociétés. Au nom de la reprise économique, on dit « c’est vous qui allez porter la crise ». On voit donc bien ce que sera le monde d’après. Le même système qui intensifie les inégalités et amplifie la précarité, sans aucune cohésion sociale. On a déjà les prémisses de la même logique économique insufflée par le Medef : sacrifice, augmentation des horaires de travail, baisse des salaires, etc. C’est pour cela qu’il faut un réveil de la citoyenneté. Mais, le monde du travail va réagir et ne se laissera pas faire. C’est pour cela que localement, nous pouvons faire beaucoup pour sanctionner ce gouvernement et proposer dans chaque commune une alternative économique, sociale, écologique. Il faut montrer qu’une autre perspective écologiste est possible, sinon c’est le populisme qui gagnera à plus ou moins long terme.
Comment se positionne la campagne d’Aix en Partage ?
Notre campagne est claire. On a décidé qu’aucune forme d’alliance n’est possible avec la candidate macroniste. Nous sommes pour un rassemblement à gauche, écologiste. Nous avons reçu le soutien des écologistes et du parti occitan, et Aix en partage arrive en tête pour le pacte de la transition écologiste. C’est ainsi qu’on avance.
Seul le candidat du premier tour pour EELV, qui n’est autre que l’attaché parlementaire de la candidate LRM, sera, lui, avec cette candidate s’il veut garder son poste. Nous sommes la seule alternative dans ce second tour face à une droite qui frise avec l’extrême droite et une droite macroniste en échec.
Notre campagne est d’informer les aixois et citoyens qui se révèlent, encore plus pendant la crise, en attente de changements et de progrès. Car on a en face des candidats qui font de beaux discours sur l’hôpital qu’ils ont appauvri eux-même ou encore sur les délocalisations qu’ils ont initiées eux-mêmes. Les questions culturelles et sociales restent au centre de nos préoccupations également. Tout peut arriver. On a des conditions restreintes de campagne, mais on va innover, on a fait une bonne campagne sur les réseaux sociaux et il va falloir qu’on se déplace quand même en ville. On va organiser des rencontres dans les parcs et soigner nos affiches dans les halls d’immeubles. Nous voulons des débats organisés avec Mme Joissains (LR) et Mme Petel (LRM). Nous ambitionnons la campagne la plus dynamique.
Comment abordez-vous les 64% d’abstention du premier tour ?
La première chose à faire est de rassurer les électeurs sur le fait que ce second vote n’est pas pathogène. Il était bien plus risqué le 15 mars que le 28 juin. On prend des précautions draconiennes y compris pour nos assesseurs. Nous souhaitons accompagner un vote le plus populaire. D’autre part, il semblerait que les procurations seront simplifiées pour les plus fragiles, nous comptons nous saisir de cette mesure dont nous attendons encore les formalités gouvernementales.
Comment voyez-vous l’avenir au sein de la Métropole, depuis Aix ?
Nous avons conscience que la Métropole n’est pas le diable contrairement à la position de Mme Joissains qui a créé un véritable déséquilibre en jouant la politique de la chaise vide et du village gaulois. La métropole doit être un outil de coopération, d’ordonnancement. Elle offre l’occasion de se démarquer pour qu’Aix soit reconnue, puisse agir et investir les grandes affaires. Il y a des enjeux importants comme la question préoccupante des transports, complètement inappropriés chez nous.
Aix est une ville dynamique, absente du débat métropolitain alors que par exemple, le plateau de l’Arbois pourrait être un pôle métropolitain économique phare. La ville doit être présente aussi pour défendre une Métropole démocratique qui ne soit pas une grosse structure administrative et centralisatrice.
La base de la vie démocratique, selon moi, c’est la commune. La municipalité doit garder le contrôle de la voirie, de la propreté, des piscines, des équipements sportifs, etc. La Métropole doit être cet espace commun pour faire ensemble ce que l’on ne peut faire seul.
Avez-vous des contacts avec la liste du Printemps Marseillais, arrivée en tête du premier tour à Marseille ?
Nous sommes très proches du Printemps marseillais bien sûr et nous communiquons en permanence. Nous espérons que la liste gagne ce second tour. La configuration est différente à Marseille avec ses 16 arrondissements et 8 secteurs car il y a un réel danger RN, selon les quartiers. Marseille est au bord de l’abîme après cette ère Gaudin et la candidate qui veut lui succéder. Il y a une urgence absolue à ce que Marseille change et nous voyons que la seule alternative progressiste et écologiste est avec le Printemps Marseillais.
Que pensez-vous de l’écho en France des mobilisations contre le racisme aux USA ?
Même si comparaison n’est pas raison car la France, état républicain, est différente des USA, les deux pays ont des similitudes. Les deux sociétés sont touchées par des inégalités criantes et par l’impact de la mondialisation. Elles présentent des discriminations récurrentes quotidiennes, dans nombre de quartiers. Les mobilisations citoyennes servent à dénoncer ces dérives où l’on bafouent impunément les droits de l’Homme. Mais au lieu de résoudre le problème, la réponse musclée et autoritaire aggrave d’autant plus la situation déjà délétère. Donc sans comparaison, l’écho américain en France est juste. La société française est à un tournant de son histoire, il s’agit plus que jamais de réaffirmer un état de droit et de défendre les devises de notre république.
Sur le pouvoir, face à la concentration des médias dominants détenus par de grands actionnaires, que pensez-vous des médias alternatifs indépendants qui tentent d’émerger ?
Le paysage médiatique est très largement monolithique. On l’a vu, il n’y a plus de pluralité face aux intérêts des tous puissants. Ce qui m’a frappé notamment durant le confinement, c’est le caractère anxiogène des débats médiatiques. Je ne pense pas que ces médias là ont fait leur travail d’analyse, d’éclairage, de décryptage auxquels pourtant ils sont voués à l’origine. Je ne citerai pas la chaîne privée, mais quand on invite un prétendu spécialiste qui n’est autre qu’une figure sulfureuse, créée par les médias dominants et que l’audimat se fait sur un non-débat dans la haine et la vulgarité, on ne peut parler de journalisme.
Je trouve plus grave l’instrumentalisation des médias de service public par notre gouvernement. Il n’y a plus de débat, par exemple, sur une radio comme France Inter qui appartient pourtant au public. Parallèlement à ce paysage, les réseaux sociaux ont beaucoup fonctionné mais ce ne sont pas des médias ; s’ils servent à communiquer et non à éclairer, ils peuvent être très dangereux car véhiculant des informations fausses.
C’est pourquoi le modèle économique des médias alternatifs doit être complètement revu, soutenu. Les citoyens sont en attente d’éclairage, c’est une question importante pour l’avenir. Quel est le sens de l’information ? Quel analyse journalistique ? Autant de réflexions à avoir pour défendre des médias indépendants et libres, à l’heure où le gouvernement au contraire vient de voter la loi Avia qui menace la liberté d’expression et inciterait plus les réseaux sociaux à supprimer des contenus pourtant légaux.
Propos recueillis par H.B.
Lors du second tour des municipales 2014 à Aix-en-Provence, le PS avait réalisé 36,49% dans une triangulaire LR (52,61%) et FN (10,89%).
Site de la liste Aix en partage : https://aixenpartage.fr/