Depuis dimanche les pompiers luttent contre une multiplication des départs de feux autour du Mont Aigoual dans le Gard. Après l’incendie de dimanche où 32 hectares sont partis en fumée dans le massif situé sous la tombe d’André Chanson, un nouvel incendie s’est déclaré lundi aux alentours de quinze heures dans la zone de la célèbre randonnée pédestre des 4 000 marches qui part de Valleraugue pour rejoindre le Mont Aigoual.
Mardi, l’incendie de montagne se situe en zone haute vers l’Hort de Dieu et descend vers les zones basses, au-dessus de Mallet et Mas Méjean. Dans la soirée, 40 hectares de végétation avaient brulé. Aucune victime n’est à déplorer. Malgré un dispositif de 70 hommes sur place, le feu d’hiver s’est étendu depuis hier. Dans la nuit, une équipe de 20 hommes s’est positionnée pour surveiller et protéger les maisons et habitants des Bressous et Mas Méjean. Pour l’instant, aucune évacuation n’est envisagée.
À proximité de l’observatoire, la station de ski fraîchement rebaptisée Alti Aigoual attendait la neige, elle a vu arriver les flammes. Depuis lundi après-midi, les gérants ont mis la station à la disposition des soldats du feu qui y ont installé le PC pour coordonner la bataille. Outre les 70 pompiers, les moyens mobilisés comprennent 12 véhicules et le précieux renfort de deux Canadairs. Le vent qui s’est levé dans la nuit accroît la préoccupation des pompiers. En début de matinée, le PC installé sur place est noyé dans le brouillard. « Un feu dans une station de ski au mois de février, c’est pas courant », témoigne un membre de l’ONF également sur place.
« Le feu n’est pas fixé, pour l’instant il a parcouru 100 hectares essentiellement domaniaux, indique le Colonel Nicolas Coste qui coordonne les opérations sur place. Le chef du groupement territorial Cévennes-Aigoual est un spécialiste des feux tactiques. Il est parti récemment en mission d’appui de la sécurité civile lors des incendies en Australie. « Nous avons sécurisé la zone de l’Arboretum de l’Hort de Dieux mais nous sommes sur un terrain très accidenté avec des foyers qui brûlent sur les hauteurs entre 750 et 1000 m d’altitude. C’est très difficile d’accès, les flans droit et gauche ne sont pas accessibles aux engins. Nous combattons le feu par le haut. Aux premières heures de la journée, j’ai demandé une reconnaissance en hélicoptère. Les conditions météo ne nous permettent pas de faire décoller les Canadair. Nous avons actuellement sur la zone des vents entre 80 et 100 km heure, le combat est rude. Compte tenu des particularités de ce feu notre équipe drone SDIS du Gard va entrer en action ».
Habituellement les feux d’hiver s’éteignent dans la nuit du fait de la baisse de température. Ici, ce n’est pas le cas. Dans le camion PC sur le parking de la station de ski, l’ambiance est proche de la SF. Dehors à moins deux degrés, le vent qui souffle par rafales pousse les nappes de brouillard au raz du sol. On peine à s’imaginer que ça brûle à proximité. Une information tombe, indiquant qu’une équipe a localisé de nouveaux foyers au-delà du ruisseau du Valat. La frontière que le colonel ne voulait pas voir dépassée a été franchie. Informé de la nouvelle, Thomas Vidal, le Maire de Val d’Aigoual qui vient de rejoindre le PC pousse un gros soupir. « C’est pas vrai… ».
Dans la vallée tout le monde se connaît ce qui facilite la circulation des informations. Pompiers, personnels de l’ONF et de la commune de Val d’Aigoual travaillent main dans la main. Le garde champêtre envoie des photos du nouveau foyer qui est transmise au Colonel Coste.
« C’est déplorable de voir partir en fumée cette forêt. On se demande où cela va s’arrêter, constate Thomas Vidal, Il faut rendre hommage aux efforts des pompiers qui luttent sans relâche ; on ne dénombre aucune victime et ils ont réussi à sauvegarder l’Arboretum qui est un patrimoine naturel inestimable ». Le maire s’inquiète de l’étirement chronologique de la saison des feux, « le changement climatique n’y est pas étranger ». De mémoire d’enfant du pays, on n’a pas connu ici d’incendie de cette importance depuis longtemps.
Une nouvelle annonce de départ de feu tombe. Elle est localisée dans les environs du Col du pas. L’information confirme les doutes qui planaient. Il ne peut y avoir de cause à effet naturel entre les deux feux. L’origine des départs n’est vraisemblablement pas accidentelle. Cet aspect du problème concerne la gendarmerie qui a ouvert une enquête. Pour l’heure, plusieurs hectares sont encore menacés.
Jean-Marie Dinh
