Le public lyrique est toujours présent, de Toulouse à Nice. Encore quelques dates proches et déjà de nouveaux programmes annoncés dans le Sud.
Les fans d’opéra sont motivés, prêts à se déplacer, à covoiturer, à embarquer leurs amis pour redécouvrir des œuvres phares, des titres oubliés, ou des nouveautés. L’été est arrivé, les festivals n’ont pas encore commencé, les saisons lyriques s’achèvent brillamment dans le Sud, en Occitanie, en Région PACA. Malgré les restrictions financières, l’opéra bouge, de grands moments sont déjà en préparation… Suivez un petit parcours lyrique en trois étapes — et on ira même à Bordeaux.
Ô Toulouse… La ville rose !
Le Capitole de Toulouse a vécu à nouveau une histoire formidable avec son Vaisseau fantôme qui s’est achevé fin mai. La mise en scène classique de Michel Fau est restée fidèle aux sources wagnériennes. Outre les costumes signés Christian Lacroix, les décors d’Antoine Fontaine ont été impressionnants, avec leurs deux bateaux immenses. De quoi rappeler les frissons éprouvés en 1988 à Montpellier pour le Wagner de légende monté par Tobias Richter, extraordinaire à tous points de vue (le Hollandais était Monte Pederson !). À Toulouse, cette nouvelle fresque réussie a réuni des interprètes fabuleux, mené par un « maître du temps », le maestro Franck Beermann*.
La conclusion est proche mais l’enthousiaste directeur artistique Christophe Ghristi promet une dernière grande surprise, du 20 au 29 juin : Adrienne Lecouvreur de Cilea, mis en scène par Ivan Stefanutti, avec une superbe distribution dirigée par Giampaolo Bisanti. La passion fatale, dont Voltaire disait : « Cette histoire est inspirée de faits réels », est transposée du XVIIIe siècle au XXe siècle, et on va revivre poison, jalousie… Cette production, qui dispose de beaux atouts, devrait être un beau bouquet final.

SAISON 2025-2026
Belle saison à venir ! En résumé, une dizaine d’opéras ou œuvres lyriques, dont des nouveautés : Thaïs de Massenet avec Stefano Poda et Hervé Niquet, un Don Giovanni de Mozart inédit, signé par Agnès Jaoui, une Salomé de Strauss, élaborée par Matthias Goerne, et une Carmen de Bizet repensée par Jean-Louis Grinda. Outre ces quatre productions est prévue la reprise de Lucia de Lammermoor de Donizetti et d’Otello de Verdi, ainsi que trois versions de concert : Theodora de Haendel (avec Lea Desandre et Véronique Gens !), Armide de Lully, et d’étonnantes Boréades de Rameau. À ne pas rater, la création française de La Passagère de Mieczyslaw Weinberg, une œuvre émouvante qui retrace la rencontre d’une survivante d’Auschwitz avec une ancienne gardienne du camp.

Pas très loin de la Canebière
À Marseille la dernière représentation du Trouvère de Verdi aura lieu mardi prochain, le 10 juin, et vu le succès de cet événement, nombreux sont les lyricomanes qui vont y assister, y compris les Montpelliérains qui viennent retrouver la soprano Angélique Boudeville, dont on se souvient dans Les Nuits d’été et la Neuvième, dirigées par Michael Schønwandt. La récente standing ovation marseillaise a été historique, saluant le succès de cet opéra incompréhensible, coproduit avec Saint-Etienne, sa distribution formidable dirigée par le chef Michele Spotti, les décors impressionnants de Diego Méndez-Casariego, et la magique mise en scène de Louis Désiré, qui assure : « Dessiner la nuit et éclairer l’obscurité me plaît ». Une conclusion pleine d’exploits.
SAISON 2025-2026
Parmi les huit œuvres au programme dévoilées dès le mois de mars, le directeur musical Michele Spotti sera à la baguette pour diriger un Falstaff de Verdi, mis en milieu hospitalier par Denis Podalydès, puis une Ermione de Rossini en version de concert, où l’on retrouve la soprano Karine Deshayes, et enfin un puissant Das Rheingold de Wagner, inventé par Charles Roubaud. Il y aura aussi un Barbier de Séville de Rossini très coloré, la folle journée des Noces de Figaro de Mozart, et un Rigoletto de Verdi. À découvrir, en version de concert, une œuvre du jeune Verdi, I Masnadieri (inspirée des Brigands de Schiller), et à redécouvrir, Le dialogue des Carmélites de Poulenc, dirigé par Debora Waldman : ce sera un grand moment mis en scène par Louis Désiré où vont briller les chanteurs Marc Barrard, Angélique Boudeville et leurs complices ! Les amateurs d’opérette sont gâtés, invités à savourer pas moins de cinq titres : Andalousie et La route fleurie de Francis Lopez, Violettes impériales de Vincent Scotto, Hello Dolly de Jerry Herman, La Grande Duchesse de Gérolstein et Pomme d’Api d’Offenbach.
Au bord de la Garonne belle…
Récemment, certains Occitans passionnés d’art lyrique n’ont pas hésité à se déplacer jusqu’à Bordeaux, où Fidelio de Beethoven a été un extraordinaire hymne à la liberté mené par Joseph Swesen, au cœur d’un monde de l’Occupation, dans une mise en scène de Valentina Carrasco et des décors de Carles Berga. Nazis et résistants, Klaus Barbie et Maurice Papon, Jean Moulin et Lucie Aubrac… Un grand succès et un temps fort, porté aussi par des détenus en fin de peine du Service Pénitentiaire de la Gironde… Dernière escapade possible le 20 juin vers Les Indes Galantes de Rameau, pour l’inauguration du Festival Pulsation, avec la Cappella Mediterranea dirigée par Leonardo García Alarcón, mêlant ruralité, chorégraphie, hip hop et Krump.
SAISON 2025-2026
Bordeaux vient tout juste de proposer son programme et sans doute certains seront tentés d’aller assister à une nouvelle production, Iolanta, ultime opéra de Tchaïkovski, ou à la grande nouveauté La Montagne noire, dernière œuvre d’Augusta Holmès, une rareté. Mais on peut être tenté par La Traviata de Verdi, La Flûte enchantée de Mozart, la version de concert de King Arthur de Purcell, l’adaptation de Lakmé de Delibes, ou les comédies musicales Company et Porgy and Bess.

PACA et pas seulement
La région PACA associe à Marseille les scènes lyriques d’Avignon, Nice et Toulon. Les deux dernières maisons d’opéra ont déjà construit leur programme à venir. Nice qui vient de terminer sa saison par une explosive Carmen, annonce, après une création de Philip Glass Satyagraha, un répertoire plus classique, avec La Clémence de Titus de Mozart, Don Pasquale de Donizetti, Le Villi de Puccini (dans une mise en scène onirique de Stefano Poda), et une Traviata de Verdi, très attendue pour sa belle distribution. Il y aura aussi des opérettes et surtout une création mondiale Un Monde Ensemble de Sergio Monterisi et Magali Thomas, un opéra rock porté par 150 jeunes.
L’opéra de Toulon poursuit ses travaux de rénovation jusqu’en 2027, mais occupe toujours les scènes du Zénith, de Châteauvallon, du Théâtre Liberté, du Palais Neptune… Sa fin de saison est grandiose avec Norma de Bellini les 26 et 28 juin, mise en scène par Emmanuelle Bastet, et les programmes de la prochaine saison sont alléchants : Don Pasquale de Donizetti, Le Vaisseau fantôme de Wagner, en version de concert (avec le chœur de l’ONMO), Le Barbier de Séville de Rossini, Madama Butterfly de Puccini revue par Daniel Benoin, et des œuvres peu connues comme La Petite Sirène de Régis Campo et la création française de Putting it together de Stephen Sondheim.
Ces programmes, ces choix de titres formidables donnent envie de parcourir le vaste monde lyrique, mais les difficultés financières que rencontrent les maisons d’opéra ne doivent pas être oubliées, elles sont une épée de Damoclès qui menace la création…** Restent à découvrir dans le Sud les projets 2025-2026 d’Avignon et de Montpellier. C’est pour bientôt, dans les jours à venir, et il y aura encore de belles surprises ! À suivre.
Michèle Fizaine
* Retransmission du « Vaisseau fantôme » de Wagner au Capitole de Toulouse, le 22 juin à 20h sur Radio Classique.
** Rappelons la menace de licenciement qui a touché le chœur de Toulon en janvier, décision suspendue, mais la lutte contre les restrictions décidées par le gouvernement et organisées par les collectivités locales n’est pas terminée. altermidi du 6 février 2025.
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