En vertu d’un contrat « pluriannuel », le robot conversationnel de la start-up française Mistral AI pourra utiliser les dépêches d’actualité de l’agence de presse pour répondre aux requêtes de ses utilisateurs.


 

Comment la presse peut-elle protéger ses contenus contre les robots qui les pillent  ? L’agence France-Presse (AFP) a annoncé, jeudi 16 janvier, avoir conclu un accord avec l’entreprise d’intelligence artificielle Mistral AI qui va permettre au robot conversationnel de la start-up d’utiliser les dépêches d’actualité pour répondre aux requêtes de ses utilisateurs.

C’est le premier accord de ce type pour Mistral AI — concurrent des géants américains comme OpenAI (concepteur de l’outil ChatGPT) —, qui ambitionne de devenir le principal acteur européen de l’IA. Cet accord fournira à l’AFP « un nouveau courant de revenus », a souligné le PDG de l’agence, Fabrice Fries. Pour Mistral AI, « l’AFP apporte une source vérifiée, journalistique, dont on pense qu’elle est très importante », selon le patron de la start-up, Arthur Mensch.
La société californienne  OpenAI a notamment signé un accord du même type avec Le Monde, ainsi que le Financial Times, ou encore le groupe allemand Springer (Bild).

Dès jeudi, les dépêches de l’AFP en six langues — français, anglais, espagnol, arabe, allemand, portugais — peuvent être utilisées par le robot conversationnel de Mistral AI, appelé « Le Chat ». Il fonctionne comme ChatGPT, qui a popularisé ces outils dans le grand public : l’utilisateur lui pose une question à laquelle il répond en quelques secondes.
Quand la question a trait à l’actualité, Le Chat va formuler ses réponses en se servant des dépêches de l’AFP, c’est-à-dire les informations envoyées sous forme de textes par l’agence à ses clients abonnés. Une phase de test a lieu dans un premier temps, auprès d’une partie seulement des utilisateurs.
Le Chat peut puiser dans toutes les archives texte de l’agence depuis 1983, mais pas dans ses photos, vidéos ou infographies. Au total, cela représente 38 millions de dépêches, produites au rythme de 2 300 par jour, selon M. Fries.

Dans le grand public, beaucoup de gens ont une utilisation différente de ces outils d’IA générative. Ils s’en servent pour des questions de vie quotidienne, auxquelles ces programmes répondent en piochant des éléments sur internet. Les deux usages « sont complémentaires », a estimé M. Mensch. Pour des questions « qui nécessitent de l’information vérifiée, c’est l’AFP qui fournira » le matériau de base des réponses et, quand les requêtes porteront « sur le shopping ou la météo par exemple, c’est plutôt le web », a-t-il expliqué.

En 2023, l’AFP a réalisé un bénéfice pour la cinquième année consécutive, avec un résultat net de 1,1 million d’euros, selon les chiffres publiés en avril 2024. Outre ses revenus commerciaux, l’AFP reçoit par l’État français une compensation des coûts liés à ses missions d’intérêt général (113,3 millions d’euros en 2023).

Contrairement à d’autres accords de ce type, les contenus AFP ne serviront pas à entraîner et faire progresser les modèles informatiques de Mistral AI, ont assuré les deux parties. Ces contenus sont « un module qui vient se brancher à notre système et peut être débranché » à expiration du contrat, a déclaré M. Mensch.
« Ça n’est pas un paiement pour solde de tout compte, comme c’est souvent le cas dans les accords d’entraînement de modèles, mais du développement de revenus récurrents », a fait valoir M. Fries.

avec AFP