La mairie de Toulouse refuse d’accueillir une exposition consacrée à Gaza organisée par Médecins Sans Frontières (MSF) en raison d’un « risque évident de trouble à l’ordre public », ce que dénonce l’ONG. Sous cet argument classique le maire de Toulouse masque une position beaucoup plus engagée. Dans un entretien donné au CRIF en mars dernier, Jean-Luc Moudenc donne véritablement libre court à sa pensée sur la question. Il appelle à « une stratégie de combat ».
La Mairie de Toulouse a été sollicitée en décembre 2024 par MSF (Médecins sans frontières) pour accueillir l’exposition We did what we could, du 6 au 26 janvier 2025, au sein de l’Espace Diversités Laïcité, un lieu culturel géré par la municipalité en centre-ville près de l’église Saint-Aubin, affirme l’ONG dans un communiqué.
La municipalité dirigée par Jean-Luc Moudenc (DVD) a, dans son communiqué de presse envoyé à la radio de proximité « ici Occitanie », estimé qu’il n’était « pas possible de donner une suite favorable à cette proposition » d’exposition car sa tenue « pose un risque évident de trouble à l’ordre public », évoquant les « énormes tensions sur notre territoire » en lien avec « l’attaque terroriste du 7 octobre menée par le Hamas contre la population israélienne, la guerre à Gaza et plus largement au Proche Orient ».
La Ville met également en avant un contexte local qui « demeure tendu notamment par l’interdiction, depuis le 7 octobre, de plusieurs manifestations liées au conflit israélo-palestinien par la préfecture et dont la radicalité posait un problème de trouble à l’ordre public ».
Sous le classique argument du risque de trouble à l’ordre public le maire de Toulouse masque une position beaucoup plus engagée que l’on retrouve dans un entretien donné au CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) en mai dernier. Jean Luc Moudenc y fait de grossiers amalgames et appelle à la mise en œuvre d’une « véritable stratégie de combat » dans les établissements d’enseignement supérieur. « Nous sommes confrontés à l’antisémitisme keffieh, alimenté par une extrême gauche très proactive, qui concerne tous les pays européens et qui a entrepris de mettre sous sa tutelle les établissements d’enseignement supérieur dont les directions n’ont pas la culture de l’autorité ou de la fermeté qui seraient nécessaires mais plutôt celle de l’éternel débat, lequel vire toujours à la domination des gauchistes. »
Jean Luc Moudenc se prononce également pour la dissolution de collectifs soutenant le peuple palestinien « Notre vigilance doit s’exercer à l’égard des collectifs qui, au prétexte du soutien à la cause palestinienne, encensent le Hamas, propageant ainsi la haine et l’antisémitisme. De même, la négation du terrorisme islamiste dans le progrom du 7 octobre doit être punie. J’appelle au courage de nos dirigeants pour la dissolution de ces collectifs. »
Dans une lettre ouverte à l’élu, la présidente nationale de Médecins Sans Frontières (MSF), Isabelle Defourny, se dit « consternée » par ce refus d’accueillir cette exposition qui, précise MSF, avait été présentée à Bayeux (Calvados) « lors du Prix des Correspondants de Guerre en octobre 2024, sans qu’aucun trouble n’ait été rapporté ».
Selon l’ONG, la mairie fait « l’amalgame entre des évènements générés localement ou nationalement par le conflit, et une exposition présentée par une association humanitaire engagée sur le terrain et destinée à rendre compte du sort des Gazaouis ». MSF juge que cela « procède d’une logique de décrédibilisation et de censure de celles et ceux qui tentent d’alerter sur les atrocités en cours à Gaza, et de négation de la souffrance de la population palestinienne ».
Mais pour le maire de Toulouse, si le débat « vire toujours à la domination des gauchistes », le plus simple consiste à empêcher qu’il puisse se tenir ; étrange conception de la démocratie et du trouble à l’ordre public…
avec AFP
Sur l’invisibilisation des Palestiniens la normalisation sur la position israélienne et la marginalisation des voix critiques. Ecoutez le Podcast : Gaza Ici et là-bas