Une tribune d’Elon Musk publiée samedi par Welt am Sonntag, l’édition dominicale de Die Welt, dans laquelle le milliardaire américain réaffirme et justifie son soutien au parti d’extrême droite allemand AfD, a entraîné la démission d’une rédactrice en chef du journal conservateur. « Aujourd’hui, un texte d’Elon Musk est paru dans le Welt am Sonntag. Hier, j’ai présenté ma démission après impression », a indiqué Eva Marie Kogel, responsable des contenus éditoriaux, sur X, plateforme détenue par Elon Musk.
Ce dernier réaffirme dans cette tribune que « l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) est la dernière lueur d’espoir pour ce pays », qui se trouve selon lui « au bord de l’effondrement économique et culturel ». Ce proche du président élu Donald Trump loue la « politique d’immigration contrôlée » du parti, ses objectifs économiques de « réduire les impôts » ou encore de « déréglementer le marché ». La classification de l’AfD à l’extrême droite « est clairement fausse », affirme encore Elon Musk, s’appuyant sur le fait que sa cheffe de file Alice Weidel « a une partenaire de même sexe originaire du Sri Lanka ». Certes le parti Alternative für Deutschland (AfD) ne se revendique pas du nazisme, ou d’un quelconque héritage du troisième Reich.
Dans la tribune, l’homme le plus riche du monde est toutefois contredit par le nouveau rédacteur en chef de Die Welt, Jan Philipp Burgard, selon lequel « même un génie peut se tromper ». L’AfD « est un danger pour nos valeurs et notre économie », affirme le journaliste, rappelant qu’un autre dirigeant du parti, Björn Höcke, « a été condamné à plusieurs reprises pour avoir utilisé un slogan nazi interdit ».
Début janvier 2017, la cheffe du parti Frauke Petry ainsi que Beatrix von Storch avaient choqué l’Allemagne en déclarant que pour protéger la frontière germano-autrichienne les policiers devraient pouvoir faire usage de leurs armes à feu en cas d’urgence. Et ce même contre des femmes ou des enfants. Toujours en 2017, le porte-parole du parti Alexander Gauland défendant le programme du parti qui voulait revenir sur l’importance accordée aux 12 années du nazisme dans l’identité allemande, avait déclaré : « Si les Français peuvent être fiers, à juste titre, de leur empereur, et que les Britanniques peuvent l’être pour Nelson et Churchill, alors nous avons le droit d’être fiers de ce que les soldats allemands ont accompli durant deux guerres mondiales. »
Remettre Elon Musk à sa place
Cette tribune croisée fait suite à un tweet publié le 20 décembre par Elon Musk, dans lequel il avait écrit que « seule l’AfD » pouvait « sauver l’Allemagne ». Cette déclaration avait créé un malaise dans le pays en pleine campagne pour les élections anticipées de février. L’AfD y est créditée en moyenne de 19 % des intentions de vote dans les sondages. Outre la démission de Mme Kogel, la tribune pro-AfD d’Elon Musk a de nouveau suscité des réactions indignées. « Nous ne devons pas permettre aux Elon Musk de ce monde, à l’État chinois ou aux usines à trolls russes de saper nos démocraties en Europe », a fustigé Andreas Audretsch, directeur de campagne des Verts.
L’Association des journalistes allemands (DJV) a, quant à elle, protesté contre la « publicité électorale » permise par la rédaction de Die Welt. « Les médias allemands ne doivent pas se permettre de se laisser manipuler comme porte-voix des autocrates et de leurs amis », fustige son dirigeant Mika Beuster. Die Welt appartient au groupe de presse Axel Springer, le plus influent d’Allemagne, qui comprend aussi le tabloïd Bild, le plus lu du pays.
Avec AFP