Chaos humanitaire, « il n’y a pas de bons et de mauvais naufragé·es. Il y a des personnes en détresse tout simplement ! » (François Thomas Président de SOS Méditerranée). « Dans les filets, on ramène aussi des cadavres… », cette parole de pécheur salarié d’un thonier donne toute la dimension de l’horreur. Selon les estimations de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), près de 30 000 personnes ont perdu la vie dans les eaux de la Méditerranée, depuis 2014. Ce chiffre révèle les failles d’une gestion migratoire qui met chaque jour des milliers de vies en péril.


 

Retenue à Paris pour raison de tempête budgétaire 2025, afin de défendre les responsabilités des Régions pour redresser la situation budgétaire de la France, Carole Delga a réaffirmé en vidéo diffusée au parc des expositions de Montpellier, ce 17 octobre, la volonté de solidarité et d’humanité de la région Occitanie : « à l’heure où les naufrages se succèdent, où les associations de solidarité sont stigmatisées de façon très injuste, ces premières assises du droit de la mer et des solidarités maritimes sont l’occasion de réaffirmer nos valeurs, mais surtout d’envoyer un message de force, un message de détermination absolue. Au gouvernement français bien sûr, à son ministre de l’Intérieur, mais aussi à l’Europe, à son parlement et à la Commission européenne qui vient d’être renouvelée ».

 

La Méditerranée, route migratoire la plus meurtrière au monde

Les Assises du droit de la mer et des solidarités maritimes, coorganisées par SOS Méditerranée, la région Occitanie et son Parlement de la mer, avec le soutien de la Montpellier-Méditerranée-Métropole et du département de l’Hérault, se sont attaquées à un enjeu de taille : le chaos humanitaire qui secoue la Méditerranée, route migratoire la plus meurtrière au monde. 

Il est clair qu’aujourd’hui certains pays européens agitent les peurs, depuis des décennies, l’Europe a affiché une hostilité croissante face aux phénomènes migratoires en Méditerranée, rappelle Jean-Pierre Lacan. Cependant, pour le porte-parole Occitanie de SOS Méditerranée : « ce n’est pas parce que la situation n’est pas optimiste qu’il ne faut rien faire ». Il appelle à renforcer l’action de la société civile et salue l’engagement des collectivités territoriales, notamment la région Occitanie, le département de l’Hérault et la ville de Montpellier. Pour son président François Thomas, l’humain doit être au cœur des politiques européennes : « On oublie de mettre le mot “personne” devant migrant·e ou naufragé·e. Il n’y a pas de bons et mauvais naufragé·es, il y a des personnes en détresse. » Le président de SOS Méditerranée souhaite une solidarité européenne accrue, avec une répartition équitable des demandeurs d’asile parmi les pays membres.

 

[VIDEO] Interview avec Jean-Pierre Lacan porte-parole Occitanie de SOS Méditerranée et François Thomas Président de SOS Méditerranée, l’Europe deviendrait-elle folle ?

« La France doit se mobiliser, les populations doivent se mobiliser », lance Didier Codorniou, président du Parlement de la mer, 1er vice-président de la région Occitanie. Ce premier événement à Montpellier veut en appeler beaucoup d’autres. « Agir, c’est aussi le faire avec force et humilité […] Je suis vraiment très heureux et sensible à cette action que l’on mène tous ensemble et qui devrait donner une approche beaucoup plus internationale à notre démarche. » Rompre avec le discours politique de la peur, pour Didier Codorniou : « la solidarité est une question d’ouverture d’esprit et de cœur, un besoin d’humanité qui nous amène à nos fondamentaux sur le vivre ensemble ».

 

[VIDEO] Interview avec Didier Codorniou, Président du Parlement de la mer, 1er vice-président de la région Occitanie. Comment redonner la priorité à la Fraternité face à un discours politique de la peur ?

Les trois objectifs des Assises du droit de la mer et des solidarités maritimes

Alors que la Libye, qui est en charge d’une vaste zone de recherche et de sauvetage en Méditerranée, montre une gestion erratique, voire violente des flux migratoires, à Montpellier, ces premières Assises du droit de la mer et des solidarités maritimes veulent porter trois objectifs : 

Réaffirmer la primauté du droit de la mer dans les eaux internationales de la Méditerranée. Un droit fondamental pour assurer une aide humanitaire impartiale. Chaque personne en situation de détresse en mer doit être secourue, indépendamment de son statut ou de son origine.

Renforcer les solidarités avec les ONG de sauvetage en mer. Face au désengagement des États, afin de soutenir ces organisations, un réseau des collectivités territoriales euro-méditerranéennes solidaires sera créé. Un réseau qui devra fédérer les efforts des différentes collectivités pour épauler les ONG, mais mobiliser des ressources et sensibiliser toutes les populations.

Lancer un appel aux institutions européennes élues en 2024. Le 9 juin 2024, les citoyens européens ont élu de nouveaux représentants qui ont désormais la responsabilité d’apporter des solutions concrètes à cette crise. Les Assises adressent un appel urgent à ces institutions pour qu’elles s’engagent à fournir des moyens adaptés pour mettre fin à la catastrophe humanitaire qui se joue en Méditerranée.

« Chaque vie humaine compte », c’est par ces mots que le maire de Montpellier a ouvert ces premières Assises. Pour Michaël Delafosse : « il faut être aux côtés de SOS Méditerranée […] Ils permettent de sauver des vies humaines qui sont notre humanité, nos frères d’humanité, et donc ils doivent être soutenus ! » Il a salué cette initiative et a insisté sur l’engagement de la ville à soutenir des actions humanitaires, et il a aussi tenu à garantir la pérennité de l’événement dont la deuxième édition se tiendra à Montpellier : « nous serons à vos côtés de manière indéfectible ». « À ceux qui cultivent les préjugés et les détestations, je salue votre courage », ajoute-t-il, pour dénoncer la montée des discours xénophobes sur les réseaux sociaux. Mais pour Michaël Delafosse, il y a des raisons d’espérer : « la jeunesse sur ce sujet est une source d’espoir ».

 

[VIDEO] Interview avec Michaël Delafosse, maire de Montpellier et président de la Métropole :

Clare Hart, vice-présidente de la métropole, déléguée au rayonnement international et à la coopération européenne, rappelle l’importance de l’engagement, initié dès le début du mandat de Michaël Delafosse : « La première subvention votée a été pour SOS Méditerranée. » Elle souligne également l’unité entre les collectivités locales : « nous sommes main dans la main derrière SOS Méditerranée, et c’est très important ». Dans un contexte où « la fraternité n’est plus une évidence », l’Occitanie, Montpellier et l’Hérault défendent avec force l’inconditionnalité du sauvetage en mer. Sylvie Pradelle, représentant le conseil départemental de l’Hérault, insiste sur la mission de solidarité qui est au cœur de l’action publique : « La solidarité, c’est le maître mot… c’est notre ADN, apporter une aide aux personnes en difficulté, dont la vie est en danger. » Les collectivités locales, en agissant au-delà de leurs frontières, réaffirment leur engagement pour une solidarité internationale, une valeur essentielle en réponse aux crises humanitaires en Méditerranée.

 

[VIDEO] Interview avec Clare Hart, vice-présidente de la métropole, et Sylvie Pradelle, vice-présidente du conseil départemental de l’Hérault :

« Depuis le début des opérations, SOS Méditerranée a secouru 40 962 personnes », a précisé François Thomas. Puis le président conscient que les migrations ne vont pas s’arrêter pour différentes raisons de géopolitiques, de conflits, de changements climatiques tient à affirmer : « nous serons toujours là pour tendre la main, c’est un devoir, c’est une obligation et malgré toutes les entraves, nous allons continuer et je salue tous les bénévoles de SOS Méditerranée qui sont pas loin de 800 en France ».

Jean Philippe Vallespir